Pages
▼
vendredi 9 juillet 2010
César et Cléôpatre - Caesar and Cleopatra, Gabriel Pascal (1945)
Au premier siècle av. J.-C., Jules César, à la poursuite de son rival Pompée, débarque en Égypte à la tête d'une armée. Appelé à prendre parti dans les rivalités entre le souverain égyptien et sa jeune sœur, Cléopâtre, il finit par faire de celle-ci la reine d'Égypte.
Adapté de la pièce de théâtre de Bernard Shaw (par l'auteur lui même), cette production anglaise offre une relecture assez étonnante des personnages, se différenciant grandement des célèbres versions de Cecil B. de Mille et de Mankiewicz. Le récit couvre uniquement les premières années du règne de Cléopatre, la rencontre avec César et le conflit avec son frère Ptolémée. Alors que les versions les plus connues s'attardait sur l'aspect séducteur flamboyant de la reine d'Egypte, l'interprétation de Vivien Leigh surprend. Au début du film, elle n'a de reine que le titre, pour le reste c'est une adolescente ignorante et apeurée, dominée par sa tutrice rêvant de prendre le pouvoir. La rencontre avec César change tout quand il va décider de la prendre en main et lui faire assumer son statut de reine.
La relation entre les deux fait tout le sel du film. Claude Rains campe un des meilleurs César vu au cinéma, encore meilleur que Rex Harrison dans le Mankiewicz. Vieil homme rusé et fin psychologue, il fait preuve tout du long d'une finesse et d'une hauteur brillamment illustrées par quelques situations et dialogues savoureux, tel toutes les fois où il épargne (à la stupéfaction de ses généraux et Cléopâtre) plusieurs fois et à bon escient certains ennemis mortels ce qui s'avérera souvent payant. A l'opposé Vivien Leigh montre une Cléôpatre sautillante et délicieusement immature, César raillant plus d'une fois sa bêtise tandis qu'elle le titille constamment sur son grand âge.
Plus le récit avance plus, la future reine séductrice et impitoyable se dessine et malgré une certaine tension amoureuse César fera essentiellement office de mentor, souvent décontenancé par son élève.Entre le vieux sage et la nymphette insouciante, le film basculerait presque dans la screwball comedy lors de certains échanges entre les deux tel se moment où le palais est assiégé et que César passe plus de temps à réprimander Cléopatre qu'a manoeuvrer ses hommes, amusant. Ce traitement décalé s'applique aussi sur les autres personnages, tel Ptolémée qui devient ici un gamin de 12 ans manipulé par ses conseillers et ne souhaitant prendre le pouvoir que pour se venger des maltraitances de sa grande soeur.
Visuellement Gabriel Pascal livre un très bel objet. Partagé entre décors studios (pour l'essentiel) et extérieurs. Les décors sont somptueux, le technicolor si particulier des productions anglaise donne une tonalité bien différente des péplums hollywoodiens (pas encore revenus à la mode quand sort le film) et Pascal offre quelques vues et cadrages de toute beauté. Gros problème malheureusement, l'origine théâtrale du projet se fait cruellement sentir et le film est terriblement bavard, allant du passionnant au franchement irritant. Pas un vrai moment spectaculaire pour réhausser tout ça alors que les moyens sont pourtant là. Quelques amorce brillantes comme lorsque César et Cléopatre sautent dans le Nil depuis les rempart du palis pour échapper à l'assaut des hommes de Ptolémée mais une ellipse de 6 mois nous frustre de la bataille qui suit. Idem pour la conclusion lorsque les hommes de César font face à la population égyptienne et lors de la grande bataille finale, quelques vignettes brillantes entraperçues fondu enchaîné mais rien de bien probant. Vraiment dommage, du coup ça demeure une curiosité intéressante quand on aurait pu avoir un vrai bon film, pas désagréable loin de là tout de même.
Trouvable en dvd zone 2 dans une édition plutôt correcte, voir les captures chatoyantes !
Merci pour la présentation de ce film !
RépondreSupprimerJ'ai eu l'occasion de découvrir un certain nombre de péplums cette année, mais celui-ci manque encore à ma collection...
Je ne connais que le film de Mankiewicz avec Elizabeth Taylor, et encore, je n'en ai vu que la première partie.
Intéressant de voir que le scénario du film adapte en fait une pièce de G.B Shaw, dont le "Pygmalion " qui inspira deux adaptations de "My fair lady" est savoureux, mais dont les autres pièces restent quelque peu méconnues.
Le jeu de Vivien Leigh et de Claude Rains, deux grands comédiens, doit être très intéressant à suivre. ;)
La version de Mankiewicz reste la plus réussie, mais celle de Cecil B. Demille délicieusement excessive et scandaleuse est très intéressante aussi. Sinon sur votre conseil. Sinon sur votre conseil j'ai entamé la lecture (passionnante pour l'instant !) des "Hauts de Hurlevent" avant de tenter l'adaptation de Wyler. En tout cas juste à vue d'oeil le casting est assez parfait quand dans l'image qu'on se fait des personnages...
RépondreSupprimerApparemment, les différents péplums où il est question de Cléopâtre en présentent une vision assez différente (il y a aussi celui où le rôle principal est joué par Claudette Colbert, mais j'ignore ce qu'il vaut).
RépondreSupprimerJe suis heureuse que vous vous soyez plongé dans "Les Hauts de Hurlevent", et que celui-ci vous passionne ! Le roman est extrêmement prenant, et Laurence Olivier et Merle Oberon correspondent bien à la vision qu'on peut avoir des personnages à la lecture.
J'espère lire prochainement votre avis sur le livre et sur le film. ;)