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vendredi 30 juillet 2010
Le Messager - The Go-Between, Joseph Losey (1970)
Un garçon issu d'une famille modeste est invité par son camarade de classe dans une famille de l'aristocratie britannique. Il deviendra ainsi le messager de la jeune fille de la maison vivant des amours interdites.Cette adaptation de Leslie Poles Hartley constitue un des tout meilleurs films de Losey. Mélange de romance et de récit initiatique enfantin, le récit nous dépeint les mésaventures d'un jeune garçon amené à servir de messager à un couple que tout oppose. Elle (Julie Christie) est issue de l'aristocratie et promise à un riche Lord tandis que lui (Alan Bates) n'est qu'un modeste fermier du voisinage. Losey ne décroche jamais du point de vue du jeune Leo (Dominique Guard belle révélation), les différentes thématiques (l'opposition des classes, le cloisonnement des jeunes filles...) se faisant par sa découverte des travers du monde des adultes.
L'intrigue se développe ainsi de manière lente et limpide, Léo se rapprochant de Marian suite à la maladie de son camarade jeu et ne découvrant que de loin dans un premier temps les liens des deux amants. Porté par la musique tour à tour légère et pesante à la fois de Michel Legrand (dont un des thèmes au piano sert de générique à "Faites entrer l'accusé" !) les échanges épistolaires entre les amoureux sont traité de manière ludique dans un premier temps, exprimant l'enthousiasme du messager juvénile ravi de faire plaisir à Lady Marian dont il est amoureux. Rattrapé par la responsabilité énorme qui lui incombe,le jeu tourne court pour le héros qui découvre tout les freins sociaux qui rendent ses vas et vient cruciaux. C'est ce trajet à effectuer qui symbolise finalement le fossé social rendant l'union impossible, Losey évitant le cliché de l'antagonisme frontal entre pauvre et riche pour une approche plus subtile.
Loin de donner dans la grande envolées romantique (alors que le côté film en costume le laisse présager) Losey filme le tout dans un style feutré, presque froid.L'ambiance rurale, estivale et oisive n'est que poudre aux yeux masquant ce qui est une authentique prison dorée pour Julie Christie sous le confort. L'intensité des sentiments se ressent donc au détour de l'ouverture fébrile des courrier, des courses de Léo entre le manoir et la ferme de Bates. Sinon la passion doit se faire mesurée et distante même lorsqu'on est proche physiquement (remarquable séquence musicale) tandis que la seule séquence charnelle sera interrompue de la manière la plus tragique qui soit.
La magnifique photo de Gerry Fisher renforce le côté nostalgique exprimant le regrets de ses moments perdus, renforcé par les retour au présent fragmenté sous forme de voix off puis de cadre moderne où notre messager devenu adulte sera une ultime fois sollicité. Le style feutré de Losey fait merveille tout du long, et le scénario de Pinter (un grand auteur pour en adapter un autre formule gagnante) est remarquablement équilibré. Palme d'or bien méritée en 1971 et The Go Between marquera le retour en grâce de Losey confirmé par ses excellents films suivants.
Film pas disponible individuellement en zone 2 français mais au sein d'un coffret Losey, sinon il faut donc se tourner vers l'édition anglaise pas très chère mais malheureusement dépourvue de sous titres, anglais comme français.
le dvd existe mais fait partie d'un coffret Joseph Losey
RépondreSupprimerAh voilà une possibilité pour les non anglophone et fan de Losey de voir plus facilement le film ! Je vais rectifier l'info sur le dvd d'ailleurs merci.
RépondreSupprimerle dvd existe dans un coffret
RépondreSupprimer"Julie Christie" sans sous titres français.
vous écrivez :
"un des tout meilleurs films de Losey" au debut. En fin d'article
vous parlez des excellents films à venir.
Pour moi ce n'est pas le meilleur film de Losey et encore moins le
meilleur film de Julie Christie.
Je n'aime pas, ici, le couple
Julie Christie/Alan Bates, leur relation est plus crédible dans
"Far from the Madding Crowd".
J'ai vu Alan Bates en salle, il y a très longtemps dans un film de Kenn Russell qui m'a laissé un goût de cendres. Alan Bates y était une sorte de bête humaine : c'est du moins le souvenir qu'il me laisse.
L'alchimie est bonne entre Christie et Bogarde dans "Darling" ; on regrette seulement
qu'elle soit trop frivole pour apprécier la valeur de son amant intellectuel.
Dans un moment de révolte, elle
jette les livres par terre...la profanation des livres en rappelle d'autres. Michèle Morgan dit qu'il faut être intelligente si l'on est belle. Je "négative" un peu trop : sans doute parce que je me suis enthousiasmée un peu vite …
encore moi, l' "anonyme" !
RépondreSupprimerPour être tout à fait sincère j'ai lu
votre chronique avant de revoir le film (vu il y a trop longtemps et oublié pour ce qui est du "messager" qui est un titre aussi
trompeur que "la cantatrice chauve", pièce de Ionesco où il n'y a pas de cantatrice chauve. Mais pour Le Messager c'est probablement ma mémoire qui flanche).
En vous lisant je me suis souvenue de mon ennui (j'ai préféré — parce que je l'ai trouvé dans vos colonnes — "La Lettre d'une Inconnue" de
Max Ophüls, un amour perdu comme celui de la nouvelle Zweig).
Il y a une chose dont je ne démords pas Julie Christie a
une fraîcheur innocente illuminée par de splendides yeux bleus.
Ne vous fâchez pas de ces va et vient : les films s'assimilent très lentement chez moi.
Il est souvent bon de laisser
dormir un film et de le revoir avec
des yeux neufs. On peut aussi bien voir plus de choses, que
réaliser l’excès d’un investissement antérieur
(j'ai trouvé dans la colonne, à droite de la vôtre
un papier de la Sirène ( ?) sur Kim Novak qui m'a fait bien plaisir. La chirurgie esthétique a fait des merveilles chez Adjani, mais allez voir sur Google Marisa Berenson, cette femme sublime dans « Barry Lindon » : elle s’est livrée aux mains du Dr Frankenstein)
Même si on y pense forcément avec la réunion du couple Alan Bates/Julie Christie je pense que c'est une erreur de forcément faire le rapprochement avec "Loin de la foule déchaînée". Le film de Schlesinger repose avant tout sur le parcours initiatique de Julie Christie dans lequel l'histoire d'amour s'inscrit quand Le Messager est un pur récit romanesque feutré où là c'est l'inverse la dimension initiatique est sous-jacente avec le personnage du petit garçon ("Le Messager donc servant d'entremetteur entre les amants pas tant de mystère ni d'incohérence dans le titre français en fait) observant les amours des adultes. Le but n'est pas du tout le même, c'est le côté feutré (peut être ennuyeux pour vous) qui fait la profondeur du film mais c'est une vraie belle romance résignée. A revoir sans doute peut-être vous le réévaluerez surtout si le visionnage remonte à loin.
RépondreSupprimerVous avez très certainement raison. Ce jeune "go-between" je m'en souviens encore très bien, longeant un mur, sans se presser. Nommant une fleur dont le nom m’a échappé (belladone ?) Peut-être retrouverai-je là ce que j'ai aimé dans les deux films espagnols que j'ai cités récemment : les enfants comprennent les sentiments des adultes. Ainsi Anna Torrent, la petite fille extraordinaire des deux films, ne comprend pas le concept de "guerre civile", mais quand
RépondreSupprimerson père dénonce un résistant et qu'elle retrouve son refuge ensanglanté, elle a compris la mort du réfugié auquel elle apportait de la nourriture et son chagrin est si fort qu'elle fugue, les hommes font battue avec des chiens, on la retrouvera allongée devant un mur en ruine, le visage dans l'herbe. Evanouie sans doute
Au plan suivant le médecin rassure la mère : elle est en état de choc, il lui faut du repos.. Alors, si vous avez raison — et vous avez certainement raison — le
jeune messager comprend sans pouvoir conceptualiser et le film doit alors montrer son désarroi. J’ai tort de parler de ce que je ne sais plus.
J'ai dû laisser des fautes, mais il est tard et je viens de
voir un beau film australien de Gillian Armstrong "Death defying Acts".
The go-between
Une aristocrate et le fermier de ses domaines, n'est pas plus « admissible’ aujourd'hui qu'autrefois. Peut-être parce qu'il n'y a plus d'aristocrates ni de fermiers "à l'ancienne"
Mais des entrepreneurs avec de la volaille en batteries. La société évolue, mais sur d'autres fronts également, les homosexuels se marient (à la Mairie, bien entendu).
Oscar Wilde allait en prison pour crime d’homosexualité, il y a un siècle. Mais dans un pays africain d’aujourd’hui, l’Ouganda peut-être (quelle mosaïque ce continent noir) les homosexuels sont condamnés à mort (on peut imaginer que la délation ira bon train).
Sur oqee cinéma
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