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mardi 28 septembre 2010

Hier, Aujourd'hui et Demain - Ieri, Oggi E Domani, Vittorio De Sica (1964)


Parmi les sommets de la collaboration De Sica/ Mastroianni/ Sophia Loren (avec Mariage à l'italienne dont on reparle bientôt), Hier, Aujourd'hui et Demain est un film à sketches tournant autour de la sexualité et de l'évolution des rapports hommes/femmes dans l'Italie des 60's, à travers son titre (chacune des histoires se déroulant à une période clé : l’hier pour le premier sketch, en 1954, avec son ambiance encore teintée de néo-réalisme, l'aujourd'hui pour le deuxième, avec le boom économique et le personnage de bourgeoise incarné par Sophia Loren et le demain pour le dernier et sa sexualité débridée signe de l'évolution des moeurs) et aussi l'antagonisme régional et social régnant en Italie entre le sud pauvre et le nord prospère, la localisation de chacun des sketches étant bien marquée (chaque transition s'attarde longuement sur respectivement Naples, Milan et Rome) et ayant une vraie importance dans le récit, souvent illustré par l'interprétation outrée (pour le sud dans les premier et troisième sketches) ou plus froide et mesurée pour le deuxième sketch.

Un peu à la manière d'un Boccace 70 (autre film à sketch légendaire de l'époque), seulement 3 longs sketches ici, donc assez développé et ne donnant pas dans la courte vignette méchante, tous interprété avec brio par le mythique couple Marcello Mastroiani/Sophia Loren.

L'ouverture se fait avec le plus mémorable des trois Adelina (chaque sketch portant le nom de l'héroïne jouée par Sophia Loren)où on voit la mère de famille Sophia Loren menacée de prison car ne pouvant payer une amende pour contrebande de cigarettes. Seule source de revenu du foyer, elle trouve cependant une faille : étant enceinte, elle ne peut ni être saisie, ni emprisonnée. Scénario génial qui, d'un pitch qui pourrait tirer vers le drame, déroule un grand numéro comique quand Sophia Loren s'empresse d'être mise enceinte à intervalle régulier (la période d'allaitement allonge aussi le délai) par Mastroianni pour éviter sa peine et qui nargue régulièrement les policiers qui reviennent à la charge par un nouveau certificat de grossesse. Très drôle surtout quand Mastroianni finit par être éreinté par ce rythme, régulièrement sollicité par Sophia Loren et entouré d'une marmaille de plus en plus nombreuse.

De Sica, avec intelligence, ne pousse pas plus loin le concept (alors que dans le fait divers dont s'inspire le sketch la femme aurait pondu quatorze enfants !) passé sept enfants pour jouer sur la solidarité et l'esprit d'entraide du quartier afin de sortir les héros de ce mauvais pas en réglant l'amende. Là où un Risi aurait amené l'histoire dans un terrain plus sordide, De Sica y coupe court également lors d'une scène où Loren ne peut se résoudre à coucher avec un autre lorsque son mari ne peut plus la mettre enceinte et elle préfère aller en prison plutôt que de le tromper. Cette tendresse et absence de cynisme fait du bien, typique de De Sica qui ne s'inscrit pas dans la veine méchante de la comédie italienne.

Anna le second montre la femme blasée d'un riche industriel s'offrir une balade en voiture avec son amant campé par Mastroianni. Récit assez cinglant sur cette bourgeoise milanaise qui semble aspirer à une existence plus authentique avec son amant mais dont le petit périple en voiture va révéler le fossé qui les sépare.

Aux antipodes de la "mama" du premier sketch, Sophia Loren dégage une allure froide et sophistiquée, tout en Dior où ses actes contredise totalement ses paroles, entre la voix off d'ouverture, sa conduite kamikaze et surtout la conclusion où elle traite Mastroianni en domestique lorsqu'ils ont un accident de voiture. De Sica n'a clairement pas la même tendresse pour les bourgeois du nord que pour les prolétaires du sud à travers ce portrait et une nouvelle fois se sort astucieusement de son concept de départ comme dans le premier sketch. Ici on s'attendait à ce que tout se déroule entièrement en voiture et on en échappe de manière surprenante.

Quant au dernier Mara, il nous montre une prostituée tenter de remettre dans le droit chemin son jeune voisin aspirant prêtre prêt à tout lâché car tombé amoureux d'elle. Le plus léger des trois mais très amusant tout de même. Un côté vaudeville et théâtre filmé très appuyé avec son cadre unique de l'appartement de Sophia Loren mais que De Sica sait rendre mouvementé, notamment par le personnage du client joué par Mastroianni frustré durant toute l'histoire de sa coucherie et entretenant d'étrange rapport mari/femme avec Loren.

L'aspect dramatique n'est pas très prononcé mais c'est enlevé, drôle et bien joué et ça donne l'occasion de revoir Tina Pica qui jouais la gouvernante de De Sica dans les "Pain, amour...". Cerise sur le gâteau, en conclusion un strip tease affolant de Sophia Loren resté mémorable et auquel Robert Altman rendra hommage bien plus tard dans Prêt à porter en reprenant la séquence avec Loren et Mastroianni plus âgé, le second degré succédant à l'érotisme. Un réussite couronnée par l'Oscar du meilleur film étranger et qui aura une suite avec le seul Mastroianni un peu plus tard, Aujourd'hui, demain et après demain (1965).

Et je ne résiste pas à la tentation de vous délivrer quelques captures du strip tease de Sophia Loren !

Pour certains ce sera plus motivant à voir le film que mon très long texte sans doute...

Sorti en dvd zone 2 français chez Carlotta dans un coffret comprenant l'excellente suite.

Extrait du premier sketch

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