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jeudi 23 septembre 2010

Nos Années Sauvages - A Fei zheng chuan, Wong Kar Wai (1990)


Dans les années 1960 à Hong Kong, Yuddy (Leslie Cheung), élevé à la diable par sa mère adoptive, indolent et charmeur, se laisse bercer par la vie, passant de bras en bras, seulement alarmé quand on lui propose le mariage. Narcissique, obsédé par le besoin qu'il éprouve de découvrir ses origines, Yuddy quitte amis, maîtresses et mère pour partir aux Philippines, à la recherche de son passé.

Avec son premier film As Tear Go By le talent de Wong Kar Wai s'était révélé à l'état brut mais ne prenait pas totalement son envol, coincé par le genre très codifié dans lequel s'inscrivait ce galop d'essai, le polar hongkongais. Nos Années Sauvages est donc le film de l'affirmation, où le réalisateur pose tout les codes narratifs, esthétiques et thématique constituant l'essence de son cinéma.

Sans réelle intrigue conductrice le récit (en partie inspiré de souvenirs, rencontre de jeunesse du réalisateur) est prétexte à naviguer entre différents jeunes gens dans le Hong Kong des 60's dont les tourments et interrogations amoureux et/ou existentiels se suivent dans une atmosphère de spleen et de mélancolie envoûtante. En tête on trouve Leslie Cheung, séducteur froid et blasé dont la rudesse avec les femmes dissimule la fêlure d'une identité floue du fait de ses origines inconnues. Il est le pilier du récit et autour de lui s'agitent les autres personnages que se soit ses amis (Jacky Cheung) conquêtes (Maggie Cheung et Carina Lau) où leurs rencontres (Andy Lau). Tous sont dans le doute, incertains et torturés quant à leur avenirs, professionnels comme sentimental.

Wong Kar Wai déploie son art unique pour le moment suspendu détaché du temps avec maestria. La magnifique séquence d'ouverture où Leslie Cheung séduit Maggie Cheung, la ballade nocturne de celle ci avec le policier Andy Lau, le final au Philippines, le réalisateurs distilles les scènes magiques où le tourbillon de sentiments qui agitent les héros font le lien d'une trame libre et détachée des contraintes de la narration classique. Les voix off multipliées entre questionnements existentiels et banalités, la bande son indolente bercées d'Amérique du Sud ou encore la gestuelle poseuses et très étudiée de chacun, tout concours à une tonalité désenchantée et nostalgique.

Le film révèle ou montre des acteurs sous un jours qu'on ne leur connaissait pas. Jusqu'ici réduite au rôle de faire valoir féminin dans les films de Jackie Chan, Maggie Cheung (déjà dans As Tear Go By) déploie une grâce, une présence et une beauté qui va l'élever au sommet du cinéma de Hong Kong les années suivantes. Le passage où elle erre sous la pluie morte de chagrin après le comportement odieux de Yuddy est une de ses plus belle prestation. Jacky Cheung plus connu pour ses performance comiques (même si Un balle dans la tête de John Woo a révélé son potentiel dans un registre dramatique) est splendide dans le rôle discret d'amoureux transi et Leslie Cheung confirme son statut dans ce rôle tout en intériorité et froideur. D'un personnage potentiellement antipathique, il parvient à faire ressentir bouillonnement et le questionnement intérieur.

Un des plus beaux films de son auteur qui remaniera ses atouts dans une veine plus galvanisante dans le magique Chungking Express à venir, même si l'échec commercial du film (sauvé parla reconnaissance critique locale puis internationale) signera le glas de la suite prévue et dont on retrouve des traces semble t il dans In The Mood For Love et 2046 (seul Wong Kar wai que je n'ai toujours pas vu).

Sorti en dvd zone 2 français

6 commentaires:

  1. Je me souviens l'avoir vu à la mort de Leslie Cheung. Les Trois Luxembourg, pour lui rendre hommage, avaient passé quelques uns des films dans lesquels il avait joué, et j'étais allé presque tous les voir, dont ces Années Sauvages.

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  2. Ah regretté Leslie Cheung, toute une époque du cinéma de Hong Kong...

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  3. Wong Kar Wai fait partie de mes réalisateurs de prédilection ; "In the Mood for Love" a été pour moi, au moment de sa sortie, un véritable choc visuel, sonore et esthétique. Je trouve beaucoup de points communs entre ce film et "La Princesse de Clèves".

    J'ai été moins séduite par "2046", dont l'esprit est très différent d'"In the Mood for Love".

    Le personnage joué par Tony Leung m'a profondément déplu, et puis l'histoire torride entre l'écrivain et la prostituée jouée par une jeune actrice très célèbre dont le nom m'échappe momentanément m'a laissée de marbre.

    Mais les séquences de science-fiction sont très réussies, Tony Leung parfait en personnage veule et désabusé, Faye Wong très touchante et Gong Li extrêmement émouvante.

    C'est un grand film, plus ambitieux, mais dont la construction est un peu brouillonne. Pour les thèmes et l'esthétique, on songe aux Fleurs du Mal de Baudelaire.

    C'est beau, mais c'est étouffant.

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  4. Aïe ça refroidi pas mal pour "2046" c'est ces avis mitigés qui me rendent réticent à le voir surtout que le dernier en date "My Blueberry Nights" n'était pas fameux une sorte de "Chungking Express" aseptisé.

    J'espère vraiment qu'il réussira à trouver un second souffle ça serait dommage qu'il s'enfonce dans la médiocrité et la redite. J'aime beaucoup "In the mood for love" aussi mais ma préférence va à "Chungking Express" (je m'étais penché dessus en mai ou juin je crois) l'antidépresseur sur pellicule ^^

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  5. Je note "Chunking Express" dans mes tablettes. ;)

    Pas vu "My Blueberry Nights" à cause des mauvaises critiques qu'il a essuyées.

    Mais "2046" vaut vraiment la peine d'être vu, c'est un grand film, le corollaire indispensable d'"In the mood for love". Je me suis souvent demandée si en le revoyant, je ne l'aimerais pas davantage.

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  6. Oui j'essaierai quand même de regarder ce "2046" malgré l'appréhension. "Chungking Express" c'est magique à ajouter d'urgence sur la (déjà très longue) pile de dvd !

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