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vendredi 1 octobre 2010
Aujourd'hui, demain et après demain - Oggi domani dopodomani, Marco Ferreri, Rafael Razcona et Eduardo de Filippo (1965)
Trois épisodes paradoxaux décrivant la crise du couple dans l'Italie des années 60.
Après le gros carton commercial et l'Oscar du meilleur film étranger du film à sketch Hier, aujourd'hui et demain, une suite s'imposait et c'est chose faite 2 ans plus tard avec ce Aujourd'hui, demain et après demain. L'unité de ton et de thèmes du premier film se dilue un peu avec l'absence de Vittorio De Sica, ici remplacé par trois réalisateurs différents, dont le célèbre Marco Ferreri. Exit aussi Sophia Loren et avec elle tout l'aspect régional du premier spécifique à De Sica pour des trames plus universelles. Marcello Mastroianni, par contre, est de nouveau de la partie, secondé par trois actrices différentes à chaque histoire, toujours centrée sur les problèmes de couple. Malgré le gros patchwork, le film est largement à la hauteur du premier, grâce à des scénarios totalement jubilatoires d'inventivité et de méchanceté.
Réalisateur le plus chevronné des trois, Ferreri ne réalise sûrement pas le meilleur sketch du long métrage avec La Rupture même si cela est loin d'être inintéressant. L'histoire narre le week-end des fiancés campés par Catherine Spaak et Marcello Mastroianni. Ce dernier incarne un odieux industriel obsessionnel qui ne voit en sa fiancée qu'une distraction, un repos du guerrier auquel il se désintéresse totalement une fois son plaisir assouvi. Pour souligner son indifférence, le scénario lui attribue une fixette absurde avec ce questionnement sur la résistance maximum d'un ballon en plastique lorsqu'on le gonfle. Assez charmant au début grâce à la présence lumineuse de Catherine Spaak, on voit le couple se désagréger lentement à cause de l'attitude lamentable de Mastroianni.
Loin d'être une simple dénonciation du machisme, on sent tout de même la patte de Ferreri sous la fêlure inexpliquée du héros avec une chute dramatique qui annonce les futurs héros autodestructeurs de son traumatisant La Grande Bouffe. Au niveau de la forme, on oscille entre l'onirisme à la Fellini (toute les recherches scientifiques de Mastroianni sur les ballons) et un aspect nouvelle vague, les échanges entre Mastroianni et Spaak évoquant le A bout de souffle de Godard, sentiment renforcé par l'usage du noir et blanc contrairement aux deux autres sketches en couleurs. Ce sketch était en fait à l'origine un long métrage complet charcuté par son producteur Carlo Ponti mécontent pour l'inclure ici d'où les défauts. Le film complet intitulé L'uomo dei palloni (Break-up, érotisme et ballon rouge en français) a été récemment restauré et réhabilité
Le second, L'heure de pointe mis en scène par de Rafael Razcona est déjà bien plus réjouissant. La première scène dans un aéroport pourrait faire penser que L'heure de pointe du titre fait référence aux transports mais non... Mastroianni, professeur invité chez un ami pour quelques jour constate les relations orageuses de celui-ci avec sa femme (jouée par Virna Lisi) qui le voit régulièrement sortir une arme (parfois) chargée à blanc et lui tirer dessus pour avoir la paix. Toute effrayée, la dame se montre douce et obéissante pendant quelques heures jusqu'au prochain conflit et ça repart.
La première manifestation des mœurs étranges du couple est carrément surprenante, puis ensuite c'est l'escalade dans l'absurde où l'on découvre que tout l'immeuble, puis tous les maris de la ville appliquent cette méthode pour se faire respecter avec festival de coups de feu toutes les cinq minutes. L'heure de pointe étant le départ des maris au travail le matin, créneau favorable aux disputes conjugales et où les coups de feux pleuvent de toutes parts. Le summum étant atteint lorsque le héros passe devant une cérémonie de mariage où un pistolet est offert au marié juste après avoir prononcé ses vœux, énorme. Belle métaphore de l'évolution des moeurs de l'époque et de la perte de la toute puissance du mâle, obligé de recourir à des moyens extrêmes pour conserver son autorité.
Ce mauvais esprit atteint des sommets avec l’extraordinaire La femme blonde d'Eduardo De Fillipo en conclusion, meilleur sketch du film. Marié à une charmante créature blonde, mais dépensière et piètre ménagère, Mastroianni découvre un étonnant moyen de s'en débarrasser. Les cheikhs arabes, friands de belles blondes offrent de véritables fortunes pour en alimenter leur harem. C'est parti pour une folle équipée commerciale dans le désert où Madame sera vendue au plus offrant.
Meilleur sketch du film, une idée de départ bien barrée, exploitée jusqu'au bout en poussant le bouchon de plus en plus loin dans le grand n'importe quoi. Sans doute le défilé de blondes le plus ahurissant vu sur grand écran, avec un Mastroianni odieux bien comme il faut, négociant dur la valeur de sa femme. Pamela Tiffin dans le rôle de la femme campe une véritable bombe sexuelle insatiable et faussement écervelée comme le montre la chute mémorable où elle inverse la manœuvre en vendant son mari à un cheikh homo possédant un harem de beaux éphèbes.
Bien osé dans certaines situations qu’on imagine mal reprises telles quelles aujourd’hui (Mastroianni et Tiffin qui vont faire l'amour derrière une dune pendant que les fidèles font la prière), ce sketch est la preuve éclatante de la capacité des Italiens à tirer le meilleurs des situations les plus folles et d’y allouer les moyens (superbe séquences dans le désert, palais arabe somptueux), à méditer en ces temps de productions frileuses et consensuelles.
Sorti en dvd zone 2 chez Carlotta mais uniquement disponible en coffret avec le premier volet Hier, aujourd'hui et demain. Pas une contrainte loin de là les deux films étant excellents.
Bande annonce survoltée !
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