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mercredi 13 octobre 2010
L'Homme Invisible - The Invisible Man, James Whale (1933)
L’invisibilité, faculté miraculeuse et enviable, a, de tout temps, fait rêver. Mais cette fois, Jack Griffin (Claude Rains) y est parvenu. La formule, il l’a. Ce qu’il n’a pas, c’est le remède ! Importance cruciale sachant qu’une des substances utilisées par le jeune savant entraîne la mégalomanie. Particularité : le savant est fou non avant mais bien après ses expériences. La nuance n’est pas à l’agenda des milliers de policiers et civils à sa poursuite : il blesse, tue, provoque des accidents ahurissants. Mais surtout, il s’échappe toujours !
Grand classique de la Universal alors dans son âge d'or de l'exploitation des grands mythes du fantastique, cet Homme Invisible est surtout l'adaptation la plus fidèle du célèbre roman de HG Wells autant dans sa trame que dans son esprit. Les nombreuses autres versions filmées à venir (surtout des série télévisées) eurent le tort de faire de l'homme invisible un héros positif dépassé par sa condition mais défendant toujours la veuve et l'orphelin.
De plus certaines esquivaient totalement (hormis la série tv des 70's avec David Mccallum qui en jouait habilement) les aspects les plus tendancieux, à savoir notamment que pour être totalement invisible notre personnage doit être tout nu ! Plus sérieusement les inconvénients de cette condition pourtant enviées étaient plutôt tournées vers l'humour et l'aspect menaçant ainsi que les tentations néfastes diverses forcément provoquées n'étaient guère prononcées. John Carpenter lui même en tira un de ses films les moins intéressant au début des années 90 avec Les Aventures d'un Homme Invisible. Il fallu attendre la version récente de Paul Verhoeven pour enfin avoir un homme invisible négatif et dangereux où le réalisateur hollandais déployait avec brio ses penchants pervers et voyeuriste avec une remarquable prestation de Kevin Bacon. Néanmoins sorti de cette audace la trame de thriller lambda en faisait le film le plus creux (sans mauvais jeu de mot avec son titre original Hollow Man) de la filmographie brillante de Verhoeven.
La quintessence du roman se trouve donc dans cette toute première version en dépit d'une intrigue nettement resserrée avec la disparation des longues expérimentations de griffin avant de toucher au but pour se réduire à la simple course poursuite. Pourtant l'humour du livre est là avec la description pittoresque et outrancière des villageois (on pouvait déjà constater dans les Frankenstein la capacité de Whale à dépeindre les autochtones hauts en couleurs) dont le quotidien est bouleversé par l'arrivée de ce drôle de bonhomme couvert de bandage (remarquable scène d'ouverture où le héros glace d'emblée l'ambiance animée d'une taverne par sa présence inquiétante).
Claude Rains pour son premier rôle au cinéma (originellement destiné à Boris Karloff dont l'égo ne supporta pas d'être aussi peu "visible" durant tout le film) offre une composition ébouriffante pour une apparition quasi infime à l'écran. Mégalomane, colérique, violent, toutes les facettes du personnage de Wells s'exprime pleinement par la seule performance vocale de Rains vraiment impressionnant et intimidant tel cet entrevue nocturne avec Kemp bien glaçante.
Le dernier élément qui vaudra au film son succès immense à l'époque est indéniablement les effets spéciaux de John P. Fulton (déjà à l'oeuvre d'autres productions Universal comme Frankenstein ou La Momie et qui perfectionnera sa technique sur les suites de L'Homme Invisible). Objets volant, silhouette creuse, corps sans tête : l'illusion reste encore intacte aujourd'hui et la progression dans le spectaculaire et la manifestation de l'invisibilité d'un cadre intimiste à des moments plus grandiloquents (le déraillage du train) est remarquable.
L'alternance entre les moments humoristique (tout le début ou il terrifie les villageois) à d'autres plus violent est également bien dans la lignée du texte et de l'escalade dans la folie du héros. Belle réussite donc pour cette légende du fantastique littéraire qui outre Claude Rains lança d'autres carrière puisque le grand Preston Sturges fit parti des nombreux scénaristes (il ne fut pas crédité) qui défilèrent à l'écriture.
Sorti en dvd zone 2 français chez Universal
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