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dimanche 14 novembre 2010

Notre Agent à La Havane - Our Man in Havana, Carol Reed (1959)


Jim Wormald est un modeste marchand d'aspirateurs. Pour subvenir aux besoins de sa fille, il accepte de devenir un espion à La Havane.

Un remarquable film d'espionnage qui tutoie la verve ironique du classique de Mankiewicz L'Affaire Cicéron. La comparaison avec ce dernier n'est pas fortuite puisque Our Man in Havana se présente tout simplement comme le pendant inversé du film de Mankiewicz. On se souvient que dans L'Affaire Cicéron, James Mason campait un modeste majordome de l'ambassade anglaise en Turquie qui allait s'avérer redoutable agent double en quête de réussite sociale délivrant des informations secrètes à l'ennemi allemand. L'ironie étant que (comme dans la réelle histoire dont le film s'inspirait) que les allemands par pure suspicion n'utilisèrent jamais les informations pourtant véridiques qui leur furent données.

Le film de Caroll Reed (qui adaptait là Graham Greene pour la troisième fois après Le Troisième Homme et Première Désillusion) reprend donc ce principe mais en l'inversant totalement dans ses personnages et thématiques. Alec Guiness campe donc ici un modeste marchand d'aspirateur installé à la Havane recruté bien malgré lui pour servir d'espion de liaison à la Havane. Guiness est parfait en monsieur tout le monde maladroit et va rapidement piétiner dans la mission de recrutement d'agent et récolte d'information qui lui est assigné. Contrairement au vénal Diello de Cicéron, Guiness n'accepte son rôle que pour subvenir à l'avenir de sa fille (jouée par une ravissante Jo Morrow) et finit par inventer les complots les plus farfelus pour s'assurer les confortables revenus d'agent secrets.

L'ironie est des plus mordante sur la paranoïa extrême régnant durant la Guerre Froide puisque toute les histoires de Guiness sont prises avec la plus grande importance dans les hautes sphères (il faut voir cette hilarante séquence où l'Intelligence Services décortique les schéma d'armes secrètes dessiné par Guiness et qui ne sont autre que des aspirateurs géant !) donnant à notre héros un prestige inattendu.

Cette tonalité amusée s'estompe pourtant progressivement lorsque cette crédulité gagne le camp adverse qui cherche désormais à recruter où tuer Guiness. La réalisation de Reed oscille entre la distance de la comédie et la pure tension paranoïaque à coup de cadrage alambiqué (qui rappelle son Troisième Homme) et une description étouffante de La Havane où fut tourné le film peu avant la révolution. La photo nocturne de Oswald Morris retranscrit bien aussi l'aspect inquiétant des rues malfamées et des bouges sordides de la ville.Avec le recul cette atmosphère de poudrière se ressent et contribue à la menace latente, d'autant que Ernie Kovacs est parfait de charme menaçant en Capitaine de police adepte de la torture.

Les dialogues sont brillants de bout en bout (la tirade de Ernie Kovacs sur la torture destiné au pauvre excellente) porté par une ribambelle de second rôle remarquables notamment du côté britannique avec un excellent Noel Coward en agent recruteur ou Ralph Richardson chef des services secrets. L'émotion est aussi au rendez vous avec une jolie et discrète histoire d'amour entre Alec Guiness et la belle Maureen O'Hara. La conclusion est dans la lignée des deux facettes du film, à un face à face d'un suspense glaçant (où notre vendeur d'aspirateur devient un vrai héros) succède un final brillant où (comme dans L'Affaire Cicéron à nouveau) l'ensemble de l'affaire sera étouffée pour ne pas ternir l'aura des dirigeants s'étant montrés trop crédule.

Disponible uniquement en zone 2 anglais doté d'une vf et de sous titres anglais ou alors en zone 1 doté de sous titres anglais

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