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mardi 11 janvier 2011
Morituri - Bernhard Wicki (1965)
Japon, 1942, un allemand apolitique se voit obliger d'infiltrer un bateau transportant une précieuse cargaison de caoutchouc jusqu'en Allemagne. Sa mission est alors d'empêcher le capitaine de saborder le navire si celui ci est visé par la marine anglaise.
Réalisateur allemand à la filmo restreinte mais à qui on doit entre autres le film de guerre Le Pont et les séquences allemande du Jour Le Plus Long, Bernhard Wicki nous offre là un film d'action et d'espionnage de haute volée, palpitant de bout en bout.
Le mot d'ordre est l'efficacité narrative maximale, quinze minutes à peine sont nécessaires pour nous présenter de manière limpide les personnages et les enjeux et on se retrouve immédiatement sur le bateau pour deux heures de suspense haletant. Au vu de ces antécédents, Wicki sait y faire dans l'imagerie spectaculaire et multiplie les plans d'ensemble impressionnants, l'architecture du cargo n'ayant plus de secret pour nous, de la cale à la chambre des officiers.
Il parvient aussi à rendre palpable l'ambiance oppressante avec Brando isolé et constamment sur le qui vive, bien aidé par un montage au cordeau et un beau noir et blanc (le film fut nominé aux Oscars pour la photo de Conrad Hall) dont les jeux d'ombres transforme le cargo en chausse trappe géant truffé de cachette potentielle. Les vingts dernières minutes avec la longue traque finale sont à ce titre des plus réussies, apothéose d'une tension qui ne s'est jamais relâchée jusque là jonglant habilement entre les péripéties maritimes et les manipulations de Brando pour arriver à ses fins.
Assez classique sur le papier, le scénario se démarque grâce à la richesse de ses personnages et d'un ton qui va assez loin dans la noirceur. Même si on devine une volonté de ne pas faire endosser un rôle d'ordure à la star, Yul Brynner est vraiment surprenant dans son rôle de capitaine nazi. Patriote plus par devoir que par conviction il est très humain et touchant notamment lorsqu'il découvre lors d'une scène remarquable que son fils est devenu une affreuse ordure nazie sanguinaire. Brando quand lui en anti héros embarqué de force dans cette galère est excellent, parfait d'ambiguïté durant toutes les scènes où il doit mener un dangereux double jeu où il risque sa vie.
Le traitement réservé au personnage féminin joué par Janet Margolin est sans doute la facette la plus surprenante et éprouvant du film. A travers elle sont abordés des sujets dérangeant pour expliquer son comportement quasi suicidaire avec une évocation sordide des sévices sexuels qu'elle subit en camp de concentration de la part des nazi. Le scénario ose traiter au détour de quelques dialogues de l'antisémitisme au sein même de l'armée US, sujet tabou rarement évoqués si ce n'est par exemple dans le films noir Feux Croisés de Edward Dmytryk en 1947.
Le regard complètement perdu, guetté par la folie,son personnage est clairement le plus intéressant . Moins nuancé dans son jeu, Martin Benrath propose tout de même un méchant mémorable avec avec cet officier nazi impitoyable et fanatique. Bref un film qui sans nier sa nature de grand spectacle s'avère d'une richesse inattendue dans ses détours étonnant. Belle réussite méconnue.
Sorti en dvd zone 2 français chez Fox
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