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mercredi 2 mai 2012

La Tour au-delà des nuages - Kumo no mukō, yakusoku no basho, Makoto Shinkai (2004)


Après la Seconde Guerre Mondiale, le Japon se retrouve divisé et occupé par deux forces rivales. Alors que l'Hokkaido est annexé par l'Union, les autres îles sont gouvernées par des forces américaines. Trois amis de la zone américaine, fascinés par une énigmatique tour érigée par l'Union, se sont fait la promesse de construire un avion et de lever le voile sur le mystère entourant la tour. Ce projet échoue lorsque l'un d'eux disparaît....

Révélé par son magnifique court-métrage Voices Of A Distant Star qu'il réalisa entièrement seul, Makoto Shinkai s'affirmait comme un des talents majeurs de la japanimation avec La Tour au-delà des nuages. Un scénario ambitieux sert ici ce qui semble être le leitmotiv récurrent de ce grand romantique qu'est Shinkai, l'amour absolu et indéfectible capable de surmonter la distance du temps, de l'espace où ici carrément des rêves.

L'action se situe ici dans un monde alternatif où après la Seconde Guerre mondiale le Japon fut coupée en deux entre une partie désormais gouvernée par les Etats-Unis et une autre dénommée l'Union dont l'autorité reste dévolue au japonais. Alors que la souveraineté américaine s'étendait sur Honshu et les îles du sud, l'Union annexe l'Hokkaido qui retrouve son appellation d'Ezo. La tension entre les deux Etats est palpable, notamment par le défi aux voisins que constitue cette Tour monumentale qui semble s'élever jusqu’aux cieux. Symbole de cette animosité dans un pays déchiré, la Tour sera également un objet de fascination pour un trio adolescent.

Les deux garçons Takuya et Hiroki emmagasinent les pièces afin de construire un avion qui leur permettra d'approcher la mystérieuse tour et ils ont promis à leurs amie Sayuri de l'emmener dans leur périple. La narration en flashback nous révèle que ce beau rêve ne fut jamais atteint, figeant ces moments d'innocence juvénile et de premiers émois amoureux dans de sublimes séquences solaire et nostalgique.

Quelques années plus tard, alors qu'une nouvelle guerre entre les nations voisines s'apprête à éclater, l'accomplissement de ce rêve inachevé va devenir pourtant la seule chose qui compte malgré tous les obstacles. Les chemins des amis se sont séparés après la mystérieuse disparition de Sayuri et tandis que Takuya se réfugie dans son travail de chercheur, Hiroki traîne son spleen à Tokyo hanté par le souvenir de son premier amour volatilisé. Makoto Shinkai avait délivré quelques indices dans la première partie avec les rêves éveillés et les visions de Sayuri qui trouvent tout leur sens par la suite.

Au milieu du ton belliqueux et du tout technologique que dessine la guerre imminente, Shinkai place son enjeu dans les retrouvailles d'Hiroki et Sayuri par une tonalité poétique et métaphysique où se croise récit de mondes parallèles, conte de la belle au bois dormant et onirisme lorgnant sur Peter Ibbetson. Le lien avec l'amour perdu se fait ainsi à travers le rêve où Shinkai nous fait perdre pied entre souvenirs, pures envolées picturales (les visions hallucinées de Sayuri) et surtout une profonde réflexion sur la solitude, urbaine, amoureuse, spirituelle...

La richesse des thèmes est réellement bluffante, ce monde alternatif offrant un miroir déformant du Japon d'hier et d'aujourd'hui tandis que l'amitié perdue puis retrouvée entre Hiroki et Takuya parlera à tous ceux n'ayant jamais oubliés les liens intenses se nouant à l'adolescence. Le final est sublime dans son emphase tout en délicatesse. Alors que l'apocalypse guerrière se déchaîne au loin on reste suspendus à ses paupières de Sayuri prêtes à s'ouvrir et paradoxalement si le chaos fait désormais rage chez les hommes, pour nos héros la vie peut commencer.

Sorti en dvd zone 2 français chez Pathé


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