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jeudi 30 août 2012
What Price Hollywood? - George Cukor (1932)
L'irrésistible ascension de Mary Evans, serveuse de restaurant "découverte" par un réalisateur hollywoodien, et son déchirement entre sa carrière et sa vie conjugale.
Après plusieurs insuccès sur ce même thème des coulisses hollywoodiennes et les affres de la célébrité, What Price Hollywood? grâce au flair de David O' Selznick lance ce qui sera la matrice des deux grands classiques Une étoile est née version William Wellman (1937) et George Cukor (1954) ainsi que le plus oubliable remake de 1976 avec Barbra Streisand. Plus généralement par son succès le film lance cette vision noire et critique d'Hollywood qui alimentera des films aussi différents que Sunset Boulevard de Billy Wilder, le diptyque Les Ensorcelés/Quinze jours ailleurs de Minnelli ou plus récemment The Artist à la construction similaire. Le script s'inspire bien sûr de réels drames et scandales survenus dans le gotha hollywoodien pour alimenter son script notamment le mariage tumultueux entre l'actrice Colleen Moore et le producteur alcoolique John McCormick, ainsi que du mal être et suicide du réalisateur Tom Forman.
On est quand même assez loin de la qualité des œuvres que ce précurseur engendrera ici même si le film recèle quelques qualités. On suit donc ici l'ascension de Mary Evans (Constance Bennett), jolie serveuse à la langue bien pendue auquel le réalisateur Max Carey (Lowell Sherman) va donner sa chance. Leurs chemins s'inversent, Mary devenant une star tandis que Max cède à ses démons et s'enfonce dans l'alcoolisme. Le film souffre d'un problème de ton, d'implication émotionnelle et même de construction. On ne ressent jamais la dose d'effort et d'abnégation de Mary pour accéder à son rêve tant la narration expédie les évènements et tout semble finalement lui sourire.
La manière dont Max façonne Mary en tant qu'actrice nouer ce lien entre eux se noie dans la narration trop elliptique, tout comme les coulisses des studios entraperçues à peine. De même l'alcoolisme de Max prête plus à la gaudriole qu'autre chose avant la dernière partie plus dramatique. Constance Bennett offre une belle composition, ambitieuse et insouciante au départ avant d'être peu à peu brisée par les travers du star system et c'est elle qui véhicule tout l'émotion du film.
Lowell Sherman amuse vaguement en alcoolique mais hormis sa scène finale ne tient jamais la comparaison des prestations de Fredric March et James Mason dans A Star is Born et Neil Hamilton est tout aussi terne en époux, rendant les conflits conjugaux peu intéressant et répétitifs malgré les piste intéressante (la différence de classe entre la haute société et les nouveaux riches d'Hollywood). Reste quelques moments amusants comme le premier dîner entre Constance Bennett et Neil Hamilton, l'ouverture où Mary se rêve vedette mais dans l'ensemble c'est vraiment sans éclat et répétitif (l'usage systématique d'encart pour signifier le harcèlement médiatique et la calomnie).
Cinq ans plus tard alors qu'il a déjà fondé sa compagnie David O' Selznick produira donc A Star is Born sur un sujet similaire (la RKO envisageant de porter plainte pour plagiat avant de renoncer) pour un tout autre résultat. Il le proposera même à son ami Cukor qui déclinera à cause des similitudes avec What price Hollywood? pour finalement s'atteler presque vingt ans plus tard à son tout aussi mémorable remake.
Sorti en dvd zone 2 français aux Editions Montparnasse dans la collection RKO
mercredi 29 août 2012
L'Aventure de minuit - It's Love I'm After, Archie Mayo (1937)
Un acteur vaniteux, Basil Underwood (Leslie Howard), est l'éternel fiancé de sa partenaire Joyce Harden (Bette Davis) à qui il promet toujours le mariage. Une spectatrice emballée, Marcia (Olivia de Havilland), vient faire une déclaration d'amour à l'artiste. Basil est sollicité par Henry Grant (Patric Knowles) fiancé de la jeune femme et fils d'un vieil ami afin de se rendre détestable auprès d'elle et stopper cette passion. Souhaitant se laver de ses fautes passé avant son mariage, Basil accepte et s'invite dans la famille pour le weekend...
Une merveille de screwball comedy digne des grands classiques du genre et assez inexplicablement méconnue, sans doute à cause de son casting qui aura peu eu l'occasion de déployer ses talents comique avec ce trio Leslie Howard (qui confirmera l'année suivante dans l'irrésistible Pygmalion d'Anthony Asquith), Bette Davis et Olivia de Havilland. L'histoire nous plonge dans le quotidien orageux du couple d'acteur shakespearien formé par Basil Underwood (Leslie Howard) et Joyce Harden (Bette Davis). Ces deux-là ne fonctionnent que dans le conflit permanent, l'égo surdimensionné de Basil n'ayant d'égal que le tempérament volcanique et la jalousie (justifiée) de Joyce.
La mémorable scène d'ouverture les voyant interpréter sur scène le dernier acte de Roméo et Juliette donne le ton avec notre couple échangeant phrases assassines en douce et se déstabilisant mutuellement afin d'être l'attraction principale. Pourtant dans le public, une spectatrice vit le moment intensément tant elle est folle d'amour pour Basil, c'est la jeune Marcia (Olivia de Havilland) qui ira même lui déclarer sa flamme en coulisse. Tout cela au grand désarroi de son fiancé Henry qui va solliciter Basil afin qu'il dégoute Marcia de ses charmes. Ne reculant jamais devant la performance et souhaitant s'absoudre de ses infidélités passée avant une énième demande en mariage à Joyce, Basil accepte le défi et s'invite pour le weekend dans la richissime famille de Marcia.
Le potentiel de ce pitch prometteur sera génialement exploité grâce à l'abattage des acteurs du scénario à rebondissement de Casey Robinson et du rythme effréné qu'instaure Archie Mayo. Leslie Howard jusque-là cantonné aux rôles de dandy romantique et d'intellectuel délivre là une prestation comique de haut vol. Il incarne là l'acteur narcissique dans toute sa splendeur, soliloquant du Shakespeare à toute occasion et en recherche constante de l'attention générale. On peut d'ailleurs y voir un second degré réjouissant sur lui-même puisqu'il jouait l'année précédente dans une adaptation de Roméo et Juliette signée George Cukor au côté de Norma Shearer.
Le voir ainsi tirer vers l'exagération ridicule les poses de héros romantique torturé est donc d'autant plus savoureux. Il retrouve ici Bette Davis avec laquelle il tourna L'Emprise (1934) et La Forêt pétrifiée (1936). Réticente au départ et n'ayant accepté que sur l'insistance du producteur Hal B. Wallis, cette dernière rayonne en actrice versatile,féroce puis radieuse, capricieuse puis jalouse et offre un répondant intense à Howard toutes leurs scènes communes étant chargée d'électricité. Enfin Olivia de Havilland en ingénue se pâmant d'amour est parfaite, maniant la niaiserie de son personnage juste ce qu'il faut pour le rendre drôle sans le ridiculiser. Tous trois sont au diapason en poussant loin la caricature mais réussissant à rester attachant (notamment la faiblesse toute masculine d'Howard sous l'arrogance) et maintenir l'intérêt pour les enjeux.
Rien ne se passe ainsi comme prévu, Howard malgré ses bonnes intentions n'étant pas insensible au charme d'une Olivia de Havilland (les deux se retrouveront bien sûr en Ashley et Mélanie dans Autant en emporte le vent) à croquer de charme sous l'œil courroucé du fiancé (Patric Knowles un peu transparent au sein de la folie ambiante). On rit franchement plus d'une fois devant les attitudes odieuses de goujateries d'Howard en roue libre (l'arrivée nocturne bruyante dans la maison, le petit déjeuner épique) et une De Havilland énamourée qui lui pardonne tout à son plus grand désespoir.
Le meilleur moment reste lorsqu'il s'introduit dans la chambre de la jeune femme et qu'il se montre très entreprenant afin de l'effrayer et qu'au contraire elle s'avère encore plus pressante que lui. Mayo s'avère particulièrement inventif pour tirer ses situations loufoques dans leurs derniers retranchement notamment grâce au majordome déjanté de Basil génialement joué par Eric Blore tel cette scène où il imite sans succès tous les chants d'oiseaux possible pour prévenir son maître en fâcheuse posture (pas de chance une voilière se trouve juste à côté) de l'arrivée de Bette Davis.
Porte qui claquent, quiproquos en pagaille et gags s'enchaînent donc joyeusement jusqu'à un final où la morale bien malmenée jusque-là (De Havilland attendant Howard dans sa chambre d'hôtel) sera finalement sauve. Basil jamais aussi charmant que face à une partenaire le malmenant peut retrouver Joyce tandis que Marcia semble enfin avoir ouvert les yeux sur la mentalité des "acteurs". Et cette réplique de nous achever définitivement, Marcia s'avérant guérie de son amour pour Basile et lui un peu moins de son amour pour lui-même.
Marsha : '' I was in love with Clark Gable last year. If I can get over him, I can certainly get over you !''
Basil : ''Who's Clark Gable?
Tordant !
Sorti en dvd zone 1 chez Warner dans la collection Warner Archives et donc sans sous-titres.
mardi 28 août 2012
Box-Office : La biographie du producteur le plus déjanté d’Hollywood - Charles Fleming
Un livre qui a le mérite de se pencher sur une décennie moins adulée que la précédente, à travers cette biographie du producteur Don Simpson, longtemps associé à Brukheimer et à qui l'on doit des cartons 80's comme Le Flic de Beverly Hills et autres Top Gun. Charles Fleming s'appuie sur la personnalité perturbée de Simpson et son mode de vie trash pour effectuer une radiographie du cinéma et des mœurs de l’ Hollywood de l'époque (la mégalomanie galopante des stars, les salaires de plus en plus insensés, les caprices les plus fous).
On découvre ainsi l'invention du « high concept » cher à Simpson. En gros : un pitch ou une idée de base accrocheuse sur laquelle doit se baser le succès et l'originalité d'un film, passant même avant le scénario ou le choix du réalisateur, avec des descriptions assez tordantes des genèses de Top Gun (qui ne doit son existence qu’à son nom qui sonnait bien dans une revue de l’US Army) ou du Flic de Beverly Hills. Le lecteur a souvent l'impression de parcourir une biographie de rock star, tant le quotidien de Simpson était excessif et déjanté, entre la consommation dantesque de cocaïne, la fréquentation assidues de prostituées et les expériences SM les plus folles narrées dans le détail.
Vrai génie créatif dont certaines idées marquèrent (pour le meilleur et pour le pire) le cinéma d’entertainment américain (les bandes-son très travaillées de Flashdance ou Top Gun, l’aspect clippesque), capable de rendre efficaces et universels les scripts les plus idiots (il aurait entièrement réécrit le perso de Ed Harris dans Rock notamment), il était le cerveau du duo tandis que Bruckheimer avait un rôle plus comptable et logistique.
Le portrait de cette grande gueule, nabab hollywoodien en surface qui, au fond, est toujours resté cet adolescent grassouillet, complexé par son physique et ses origines redneck, s’avère donc assez touchant. La constante quête de reconnaissance (il souhaitait entamer une carrière d’acteur et a un petit rôle minimisé au montage dans Jour de Tonnerre) et la lente autodestruction de cet homme qui avait tout offre donc un instantané saisissant de décadence hollywoodienne.
Un peu l'équivalent, pour les années 80, des deux livres de Peter Biskind (Le Nouvel Hollywood, consacré aux 70’s et à la génération Spielberg, Scorsese,Coppola et Sexe mensonge et Hollywood, sur la révolution du cinéma indépendant dans les 90’s), sauf que Charles Fleming évite de son côté le syndrome « c’était mieux avant ». Tout en étant conscient du vide de certaines œuvres dont il parle, il reconnaît aussi leur caractère novateur et le sang neuf qu’elles apportèrent à l’époque, saluant ainsi le talent de Simpson. Après la triste disparition récente de Tony Scott, un rappel intéressant de la période où il a émergé.
Paru aux éditions Sonatine
Et avec pareil sujet, on allait pas finir sans un petit "Take my breath away" ^^
lundi 27 août 2012
Le Caporal épinglé - Jean Renoir (1962)
La drôle de guerre a pris fin ; les soldats français sont prisonniers des Allemands. Parmi eux, Caporal, Papa et Ballochet, qui ne pensent qu'à une chose, s'évader.
Le Caporal épinglé est un film particulier dans l’œuvre de Jean Renoir puisqu’il constitue sa dernière réalisation pour le cinéma (Il finira sur des productions télévisées comme Le Testament du docteur Cordelier et Le Petit Théâtre de Jean Renoir). Le Caporal épinglé lui permet de renouer avec un genre (le film de guerre) dont les composantes (l’intrigue se déroulant dans un camp de prisonnier en temps de guerre) évoquent un de ses films les plus plébiscités, La Grande Illusion (1937). C’est d’ailleurs là l’espoir secret des producteurs lorsqu’ils lui confient l’adaptation du roman éponyme de Jacques Perret, qu’il refasse La Grande Illusion. Bousculant cette attente, Renoir s’avère au contraire provocateur dès son introduction où s’expose d’entrée un des motifs qui hante implicitement le film : la défaite française et la collaboration avec l’Allemagne.
Le Caporal épinglé s’ouvre en effet sur des images d’archives d’actualités présentant l’effondrement de l’armée française et la victoire allemande concrétisée par la venue d’Hitler pour la signature de l’armistice dans le wagon de Rethondes. Le film sera ainsi ponctué de stock-shots d’époque dont un lourd de sens montrant en montage alterné l’armée allemande défilant sur les Champs Elysées puis des images de la marche de prisonniers français rejoignant leur camp. Les thèmes abordés dans le film découlant intrinsèquement de ce contexte historique, Renoir fait le lien dès cette ouverture cinglante. La Grande Illusion était un film de vainqueur alors que Le Caporal épinglé sera celui du vaincu.
Avant de le constater dans le portrait fait de ces prisonniers de guerre, Renoir va exprimer cette idée visuellement, notamment par sa description des camps. Ces derniers sont une extension de l’état d’esprit et de la psychologie des prisonniers français. Dans la tradition du film de prisonnier inscrite dans l’imaginaire collectif surtout via les films américains (Stalag 17 de Billy Wilder (1953), La Grande évasion de John Sturges (1963)) Le Caporal épinglé reprend certes l’esthétique attendue d’un camp de prisonnier mais sans s’attacher à sa topographie dans les deux que nous traverserons durant le récit. Décrire précisément ces lieux (ce qui est le cas dans La Grande Illusion) a surtout son importance quand l’un des enjeux et rebondissement futur concernera une tentative d’évasion. Il y aura y en aura bien quelques-unes ici mais découlant plus du hasard que d’une réelle organisation.
On aura une vision étonnamment « vivable » de ces geôles lorsque Caporal (Jean-Pierre Cassel) sera transféré dans un semblant de village fermier loin de l’aspect étouffant et oppressant que l’on a dans ce type de film, les prisonniers bénéficiant même d’une relative liberté de circulation (ce qui fut effectivement une réalité historique). Le mépris et le peu de crainte de l’ennemi allemand transparait ainsi de manière sous-jacente : il n’y a pas grand-chose à craindre de ces français vaincu si facilement, on se contentera de les isoler et de se les rendre utile comme main d’œuvre.
Les captures d’évadés sont du coup plus risible qu’angoissante et humilient constamment les français : Caporal et Guillaume essayant de déplacer le lit du soldat allemand pour ouvrir la porte, Caporal et Papa (Claude Brasseur) se cachant dans un camion qui les ramènent directement au camp, la tentative de vol de papier dans un train se finissant nez à nez avec un soldat allemand… Loin de celle sophistiquée et au cordeau des classiques du film carcéral, la mise en scène de Renoir semble d’ailleurs aussi spontanée que les maladroites tentatives d’évasion de Caporal (la seule réussie jusqu’au bout étant totalement le fruit du hasard).
C’est ensuite par sa description des relations entre prisonniers français que Renoir va poursuivre sa démonstration. Les tensions naîtront des relations un peu trop privilégiées de Ballochet (Claude Rich) avec les allemands à travers ses petits trafics. Même s’il fait grassement profiter ses camarades des bénéfices de son commerce avec l’ennemi, cette situation est pour lui une forme de réussite sociale au point qu’il ne souhaite même pas quitter le stalag signifié par cette tirade cynique et antipatriotique.
La liberté ne se trouve pas toujours de l’autre côté des barbelés. A Paris je suis un esclave. Je me suis bâti un donjon au-dessus des insectes qui continuent leur lutte grotesque.
Ballochet pourrait être rapproché chez Renoir du héros du Crime de Monsieur Lange (1936). Tous deux se découvrent un talent (écrire des histoires de cowboy pour Lange, trafiquer pour obtenir nourriture boisson et produit de luxe dans le camp pour Ballochet) par lequel ils permettent à leur entourage de vivre dans des conditions acceptables (les ouvriers d’imprimerie conservent leurs emplois après la fuite du patron dans Le Crime de Monsieur Lange, les prisonniers mangent mieux dans Le Caporal). La différence se situe lorsqu’on voit à quoi engage ce don et où il mène son détenteur. Monsieur Lange remplace pratiquement le patron enfui, augmente travail et salaire des ouvriers par le succès de ses récits et apporte le bonheur à la communauté en la faisant évoluer et aller de l’avant.
Ballochet lui ne fait qu’installer ses camarades dans un confort factice l’autosatisfaction et l’individualisme. Les périodes différentes des deux films expliquent bien sûr ce fossé. Anticipant la société française du Front Populaire, Monsieur Lange prône la solidarité face à l’adversité quand le contexte de la défaite du Caporal épinglé montre des personnages en pertes de repères comme cette France brisée. Heureusement le tableau n’est pas totalement noir grâce au talent de Renoir pour dépeindre malgré tout de manière chaleureuse cette communauté masculine hétéroclite, le réalisateur laissant leur chance à de jeunes talents truculent comme Jean Carmet inoubliable Guillaume le fermier, Mario David alias Caruso le chanteur ou encore Guy Bedos en bègue.
C’est d’ailleurs de cette amitié que naît un certain motif d’espoir, en les hommes plus qu’en la victoire puisque la notion de patriotisme est totalement absente ici au contraire de La Grande Illusion. Renoir traduit cela par le sentiment d’abandon et de trahison des soldats par leurs dirigeants suite à la défaite, les dialogues attestant de cette perte d’illusions.
Les grands se foutent de nous, ils discutent le coup au champagne et nous laissent mourir moisis dans la merde.
C’est cette sensation qui mène les prisonniers français à l’individualisme où chaque acte à une motivation personnelle et annihile toute velléités de patriotisme.
Les honneurs et la gloire vont plus volontiers aux vivants qu’aux morts. (…) Faut que je me tire, la vie de barbelé me déprime.
Caporal (excellent Jean-Pierre Cassel) est symptomatique de cela, on ne ressent dans aucune de ses multiples évasions une motivation nationaliste (il n’est d’ailleurs pas indiqué à la fin s’il compte rejoindre la Résistance à son arrivée à Paris) tout comme les autres protagonistes croisés (l’ouvrier agricole dans une des dernières scènes du film préférant demeurer en Allemagne cultiver ses terres). Le seul semblant de revirement viendra notamment de Ballochet qui se rachètera tragiquement de ses errances. Si l’amour du drapeau ne peut plus vraiment lier ces hommes, l’amitié elle le pourra grâce à la relation forte que noue Renoir entre Caporal et Papa (Claude Brasseur). La différence sociale semble d’abord être une entrave à ce lien naissant, Brasseur se sentant inférieur notamment au moment de s’évader avec Caporal dont il craint une attitude autre à l’extérieur.
On va se retrouver dans notre petit coin, les riches avec les riches, les clodos avec les clodos (…). Ici ce n’est pas la même chose, un copain c’est un copain, la soupe c’est peut-être de la flotte mais au moins on la bouffe ensemble.
La conclusion où les deux amis se quittent mais décident de rester en contact à la joie (et la surprise) de Papa semble pourtant aller au-delà de ses clivages. L’amitié se fait ainsi plus forte que ces différences qui n’ont plus lieu d’être. Le message de Renoir apparaît ainsi plus optimiste que ce que le ton de l’ensemble du film laisse à penser. Le lien entre les classes n’apparaît plus impossible comme dans Le Carrosse d’or (1955) (entre Camilla et le roi), Le Crime de Monsieur Lange (les ouvriers et le patron véreux), Boudu sauvé des eaux (1933) (le clochard Boudu et la famille de bourgeois) voire même La Grande Illusion où Marechal et Boëldieu entretenait toujours une certaine distance (On est ensemble depuis des mois et on continue à se vouvoyer). Mieux elle constitue le dernier rempart et le seul futur possible d’une nation brisée.
Ma terre à moi, c'est là où est mon copain.
Avec son sujet encore douloureux pour la France d’alors, Le Caporal épinglé sera un échec en salle scellant la filmographie du « Patron ». Désormais on en retiendra surtout un grand film, un de plus, le dernier.
Sorti en dvd zone 2 français chez Studio Canal
Extraitdimanche 26 août 2012
La Petite Hutte - The Little Hut, Mark Robson (1957)
Sir Philip et son épouse Ashlow font une croisière avec un vieil ami, Henry Brittingham-Brett quand, suite à un malencontreux accident, ils font naufrage sur une île tropicale déserte. Henry pense en profiter pour renouer une vieille liaison avec Ashlow, tandis que celle-ci, lasse de l'indifférence de son mari, décide de jouer le jeu, afin de le pousser à réagir.
Plaisant film que ce The Little Hut qui s'appréciera surtout si l'on est fervent amateur de son casting qui s'en donne ici à cœur joie. Le film adapte la pièce vaudeville éponyme d'André Roussin (elle-même inspirée de la comédie Civilitzats tanmateix de l'écrivain catalan Carles Soldevila) qui rencontra un grand succès lorsqu'elle fut jouée en France en 1947 et 1956 et également aux Etats-Unis dans la traduction anglaise qu'en tira Nancy Mitford au début des années 50. C'est de cette dernière version que s'inspire Mark Robson qui réunit donc le très attractif trio de stars constitué par Ava Gardner, Stewart Granger et David Niven.
La Petite Hutte nous narre donc le récit d'un fort curieux triangle amoureux. Henry Brittingham-Brett (David Niven) est le meilleur ami du couple formé par Sir Philip (Stewart Granger) et son épouse Susan (Ava Gardner) où tout trois entretiennent une promiscuité dont la singularité semble plus frapper leur entourage qu'eux même. Philip est un diplomate très occupé qui délaisse sa femme, cette dernière ayant liée une grande complicité et tendresse avec Henry, ancien prétendant toujours amoureux d'elle. Ce ménage à trois qui n'en est pas un se retrouve confronté à ses contradictions lorsque parti en croisière, une tempête les fais échouer ensemble sur une île déserte.
Inutile de chercher ici une quelconque plus-value de film d'aventures par rapport à la pièce, Mark Robson assumant totalement la théâtralité du matériau d'origine. La scène de naufrage se contente donc de balancer des trombes d'eau sur une maquette ridicule, les transparences sont criantes sur les scènes en barques sans parler de la jungle de pacotille (tournage à Cinecittà) à peine rehaussée par quelques extérieurs et de nombreux stock-shots.
Cette "scène" exotique restreinte va donc servir de catalyseur pour nos héros qui vont voir leur nature exacerbée dans la promiscuité. Le toujours surmené Philip va poursuivre son hyperactivité en construisant toutes sorte d'inventions farfelues sur l'île, prendre en main la chasse la pêche et la construction des huttes pour finalement tout autant oublier son épouse. A l'inverse le désir et la frustration d'Henry va en devenir insoutenable, la nature aimable et séductrice de Susan s'ajoutant désormais de ses tenues légères et dénudées plus adaptées à ce cadre tropical. Les trois acteurs offrent un grand numéro comique chacun dans leur registre.
Stewart Granger en anglais flegmatique et entreprenant est très amusant et risible dans sa masculinité forcée (sauf en ce qui concerne sa femme) Robson poussant le ridicule jusqu'à lui faire traverser le décor en liane façon Tarzan. David Niven en comparse frustré est tout aussi drôle. Ignorée par l'un et dévorée des yeux par l'autre Ava Gardner délivre une prestation piquante et enjouée, dans la séduction permanente et plus ou moins inconsciente selon les moments avec une joyeuse pointe de second degré.
L'argument marketing tenait grandement dans sa plastique longuement exposée (cette affiche !) et l'on n'est pas déçu, c'est un petit festival de costumes : pagnes saillants, maillot de bain en feuilles de palmier, petites robes d'été élégantes la garde robe d'Ava sur le film ayant été créé par Christian Dior.
Le film pêche uniquement lorsqu'il se détache de la pièce pour cause de censure. Dans celle-ci, Henry et Susan sont réellement amants avant le naufrage ce qui renforcera les passions de ce ménage à trois lorsque Henry souhaitera "partager" Susan. Dans le film Henry invente cette liaison afin d'ébranler son ami et l'amener à lui céder sa femme mais la dynamique originelle est cassée et ce sera plus matière à ridiculiser David Niven qu'on ne croira pas un instant capable d'arracher Ava Gardner à un toujours imposant Stewart Granger. Un dernier rebondissement essaie d'amener cette facette grossièrement mais est tout aussi vite tué dans l'œuf. Une petite sucrerie très plaisante donc à défaut d'être mémorable surtout pour l'abattage du trio vedette.
Film uniquement sorti en dvd espagnol avec vo sans sous-titres sauf espagnol, la copie n'est pas étincelante mais reste tout à fait correcte
Et il semble que le film soit entièrement sur youtube profitez-en tant que c'est encore disponible...
vendredi 24 août 2012
Quels seront les cinq ? - Five came back, John Farrow (1939)
Douze personnes embarquent à bord d'un avion, le "Silver Queen", à destination de l'Amérique du Sud. Mais l'engin est pris dans une tempête et s'écrase dans un endroit situé dans les Andes, où vivent les Jivaros, les "réducteurs de têtes". Bill Brooks et son co-pilote Joe tentent de réparer l'avion. Henry Spengler, vieux professeur, s'aperçoit que le territoire, sur lequel ils ont atterri, est plus que dangereux. Si certains personnages s'adaptent à la situation, d'autres révèlent leur véritable nature...
John Farrow réalise là un remarquable ancêtre de film catastrophe avec ce Five came back. L'interprétation du solide casting et la construction limpide de l'intrigue donne même une fraîcheur appréciable à tout ce qui deviendra des poncifs du genre. Nous avons donc ici un équipage de douze passagers qui suite à une avarie de moteur et d'une violente tempête vont voir leur avion s'écraser dans la région des Andes. Dès lors à travers la difficile survie dans ce territoire hostile et alors que les pilotes tentent de réparer l'avion, les caractères de chacun vont se révéler dans l'adversité.
La première partie introduit brièvement et avec efficacité les différents passagers : un jeune héritier en fuite pour se marier avec sa secrétaire(Wendy Barrie et Patric Knowles), un vieux couple bougon en voyage (C. Aubrey Smith et Elisabeth Risdon), un homme accompagnant le garçonnet d'un ami en difficulté (Allen Jenkins), un policier et l'anarchiste qu'il escorte (John Carradine et Joseph Calleia) et une jeune femme pimpante qu'on suppose de mauvaise vie (Lucille Ball seule star du lot bien avant ses succès télévisés).
Si leurs natures sont brossés à gros traits par le dialogue (les échanges secs et amusant du vieux couple), les situations les introduisant (la tentative d'évasion de l'anarchiste) où leur image (le jeune couple presque niais dans le côté WASP propre sur eux), ce n'est que pour mieux développer la manière dont l'épreuve va les révéler à eux même. Nos retraités retrouvent ainsi leur énergie et leur complicité, la jeune délurée se découvre un instinct maternel afin de protéger le petit garçon tandis que l'héritier va révéler toute sa faiblesse de caractère alors qu'il doit pour la première fois se battre pour quelque chose.
On devine forcément la présence de Dalton Trumbo sur ce dernier point et les élans gauchistes du script, notamment avec le personnage de l'anarchiste ( Joseph Calleia absolument remarquable loin des rôles hispanique à gros traits qu'on lui a fait souvent jouer) qui en obtenant un sursis à l'exécution qui l'attendait s'épanouit dans cette communauté où comme le soulignera un dialogue chacun coexiste sans distinction sociale et apporte sa part à l'édifice. Ce sont finalement les figures d'autorités (le flic incarné par Carradine) et d'aisance sociale avec Patric Knowles qui feront vaciller l'équilibre paisible des rescapés.
Ces points de tension iront bien sûr en s'exacerbant lorsqu'interviendra le rebondissement final : faute de carburant, seul cinq passagers pourront embarquer tandis que pointe la menace d'indiens jivaros rôdant aux alentours. La conclusion est ainsi un superbe moment d'émotion entre la fin humble des sacrifiés acceptant leur destin et la lâcheté des autres suivant leur nature égoïste (la dimension politique se retrouvant dans la notion de mérite de ceux qui partiront). John Farrow aura remarquablement amené cette évolution tout en n'oubliant jamais de délivrer un vrai film d'aventure. Il fait des miracles pour recréer cette jungle foisonnante malgré son budget étriqué, Farrow faisant importer de vrais arbres dans son décor studio et travaillant énormément la bande-son afin de renforcer le réalisme et l'immersion dans ce cadre exotique (remarquable manière d'introduire les jivaros à la fin, digne d'un western et pleine de mystère dans l'esprit de la menace invisible qu'ils constituent tout le film).
De même les effets spéciaux des scènes de vols sont remarquables, on devine certes la maquette (du modèle Capelis XC-12 pour les férus d'aviation) mais le tout est parfaitement intégré et les scènes de heurts aériens, de crash et le décollage final sont vraiment palpitants et parfaitement filmés et découpés. Succès surprise pour la RKO, le film aura droit à plusieurs déclinaisons dans les années suivantes. Un remake mexicain intitulé Los que volvieron sera produit en 1948, Farrow en personne revisitera son film au sein de cette même RKO en 1956 avec Back from eternity (Robert Ryan, Rod Steiger et Anita Ekberg au casting) et plus étonnant l'intrigue sera reprise dans l'épisode The Galileo Seven/Galilée ne répond plus de la première saison de la série originale de Star Trek.
Inédit en dvd pour peu de temps encore puisque bientôt disponible aux Editions Montparnasse dans la collection RKO
Extrait
jeudi 23 août 2012
Journal érotique d’une secrétaire - OL kanno nikki : ah ! watashi no naka de, Masaru Konuma (1977)
Asami, secrétaire, 24 ans, vit avec son père veuf qui voudrait bien la marier. Mais elle est la maîtresse de son chef de service qui lui a promis le mariage. Elle finit toutefois par comprendre que ni son amant ni son père n'ont besoin d'elle. Pour le premier, elle n'est qu'un jouet sexuel, pour le second, elle est devenue une charge depuis qu'il s'est découvert une maitresse.
Journal érotique d’une secrétaire est un surprenant pinku eiga signé Masaru Konuma responsable de quelques fleurons du genre souvent avec son actrice fétiche Naomi Tani, comme le fameux Fleur Secrète déjà évoqué ici. Comme à son habitude, la touche érotique s’avère un formidable moteur pour une violente charge contre la société japonaise.
Ce Journal érotique d’une secrétaire permet d’apprécier le talent de l’actrice Asami Ogawa. Celle-ci, par son physique longiligne, imposa un autre standard féminin que les créatures pulpeuses habituelles des pinku eiga (comme justement Naomi Tani évoquée plus haut) et, du coup emmena les films où elle figurait dans des directions plus surprenantes.
À l’opposé des personnages victimes auxquels on l’associe souvent, Asami Ogawa incarne ici une secrétaire plutôt épanouie, sûre de sa sensualité et de son désir à travers la liaison qu’elle entretient avec son patron. Le drame s’immisce progressivement par différentes facettes, comme notamment une collègue peu farouche, régulièrement chevauchée par tous les mâles de l’entreprise dès que l’occasion se présente. Incapable de résister au désir qu’un homme peut avoir pour elle, elle s’abandonne volontiers à leurs assauts malgré le drame que cela constitue pour elle.
Un échange entre ce personnage et Asami Ogawa soulève la grande thématique du film, lorsqu’elle se lamente de ne pas être mariée et du peu de possibilités professionnelles qui s’offrent à elles. Dans cette société japonaise vouée à la toute-puissance masculine (il faut voir la nature maître/élève des rapports homme/femmes dans l’entreprise), la femme n’existe que pour et par les hommes. Asami Ogawa, entre son vieux père dont elle doit encore s’occuper, et son amant insistant, en est tout le symbole, et constatera le grand vide de son existence lorsqu’elle essaiera d’y échapper.
C’est donc, en fait à un puissant mélodrame que l’on assiste, que la frêle présence et la fragilité de l’actrice ne rendent que plus poignant. Elle s’abandonne de manière stupéfiante dans les séquences érotiques (la première scène avec le patron est merveilleusement filmée par Konuma) qui alternent entre sensualité moite bourrée d’invention visuelle (l’étreinte au milieu des poussins), et cruauté insoutenable. À ce titre la dernière demi-heure offre un crescendo destructeur pour l’héroïne faisant face à la sourde brutalité et l’égoïsme des hommes de sa vie. Un film déroutant où Konuma trouve une nouvelle un étonnant équilibre entre le racolage attendu du genre et un message vindicatif et désespéré.
Sorti en dvd zone 2 français chez Wild Sidemercredi 22 août 2012
Été violent - Estate violenta, Valerio Zurlini (1959)
La ville côtière de Riccione, durant l'été 1943. Sans se préoccuper de la Seconde Guerre mondiale qui a épargné l'endroit jusqu'alors, des jeunes gens mènent une vie insouciante. Carlo, l'un d'eux, se lie d'amitié avec une jeune veuve de guerre, Roberta. Bientôt, leur relation évolue vers une folle passion...
Été violent entame une grande période pour Valerio Zurlini qui va creuser le même sillon thématique dans ses deux films suivant pour une trilogie consacrée à l'étouffement des sentiments. Dans le second volet de ce cycle La Fille à la valise (1961) ce sera le fossé des classes sociales et de l'âge qui entraveront la relation amoureuse entre Claudia Cardinale et le jeune Jacques Perrin tandis que Journal intime délaisse le romanesque des deux premiers films pour décrire un lien fraternel difficile. Dans Été violent, c'est le contexte d'une Italie proche de la débâcle et d'un régime fasciste à bout de souffle qui viendra éteindre les feux d'une magnifique romance.
Cette guerre pourtant, les personnages semblent ne pas la voir et sa réalité ne se révèlera à eux que progressivement alors que leur monde insouciant s'effondre. Le début du film nous montre ainsi le jeune Carlo (Jean-Louis Trintignant) retrouver ses amis pour de paisible vacances dans la ville côtière de Riccione, comme chaque année. Durant cette fête de retrouvailles, Zurlini montre subtilement comme tous les éléments pouvant rappeler le conflit en cours sont masqués, que ce soit l'ami soldat blessé servi et mis à l'écart ou la radio annonçant des nouvelles du front dont on change rapidement la station pour de la musique dansante.
Cet arrière-plan occupe une place de plus en plus grande dans le quotidien va ainsi rapprocher puis séparer notre couple de héros. Alors qu'un avion allemand rase les côtes, Carlo va rassurer la fille de Roberta (Eleonora Rossi Drago) jeune veuve de guerre. Tous deux vont ainsi peu à peu se rapprocher, comblant mutuellement les vides de leur existence.
Pour Carlo, c'est la découverte de sentiments réels et ardents, loin de la superficialité de la vie qu'il mène avec ses amis (à l'image de la jalousie toute adolescente du personnage de Jacqueline Sassard) tel ce moment où après s'être vanté d'avoir échappé à l'appel des drapeaux il croise un ancien compagnon d'arme du mari de la veuve. Roberta tout d'abord étouffée par les codes stricts de son milieu bourgeois puis par un mariage sans amour s'éveille ainsi pour la première fois à la vraie passion.
Zurlini exprime cet épanouissement des personnages en capturant merveilleusement la montée du désir entre eux. Cela se dévoile d'abord par la retenue, entre regards insistant ou à la dérobée de Jean-Louis Trintignant, attitude distante difficilement maintenue par Eleonora Rossi Drago, la langueur de l'été et la sensualité de leurs corps juvénile se chargeant de mettre à mal ce désir contenu grâce à de merveilleuse idée de mise en scène (Roberta qui allume sa lampe dans le noir pour découvrir le regard de Carlo braqué sur elle).
Et lorsque les deux amants s'abandonnent enfin l'un à l'autre, ce sera le temps d'une merveilleuse séquence de danse nocturne où le marivaudage amoureux se joue par le geste et le regard sans qu'un mot ne soit prononcé, même par la rivale éconduite (le dépit de Jacqueline Sassard). Dès lors la liaison sera aussi enflammée qu'éphémère car menacée par un monde qui s'effondre avec la démission de Mussolini et le spectre de la défaite.
Les deux acteurs sont extraordinaires dans l'expression de cette fuite en avant désespérée, en particulier Eleonora Rossi Drago dont la beauté embellie au fil de l'intrigue quand son port élégant disparait pour ne plus laisser voir que l'amoureuse transie et agrippée à son bonheur (l'étreinte à la plage).
Si l'oisiveté de ses jeunes gens en début de film était discutable (Zurlini s'avérant un candidat idéal pour adapter Le Jardin des Finzi-Contini dont Vittorio De Sica tirera un si beau film), l'oppressante atmosphère de règlement de compte laissant éclater la violence est tout aussi révoltante. Fils d'un dignitaire fasciste qui l'a jusque-là maintenu hors de l'armée, Carlo est rattrapé par ses origines. Les amants ne pourront plus tourner le dos à leur environnement malgré leurs efforts, à l'image de la conclusion mélodramatique et spectaculaire où l'emphase se fait plus prononcée pour ce dernier adieu. Chef d’œuvre.
Sorti en dvd zone 2 français chez Opening
Extrait