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mercredi 12 septembre 2012

La Nurse - The Guardian, William Friedkin (1990)


Phil et Kate, un jeune couple de cadres dynamiques en attente d'un heureux événement, s'installent dans une luxueuse maison à la lisière d'une grande forêt proche de Los Angeles. A la naissance du bébé, Phil et Kate se mettent à la recherche d'une nurse. Le choix du couple se porte sur Camilla, une jeune femme apparemment bien sous tous rapports. En réalité, la nurse est une héritière des druides dévouée au culte du Mal et son but est d'offrir en sacrifice le bébé du couple à un arbre maléfique...

La Nurse (The Guardian en VO avec un double sens plus judicieux) arrive dans un moment critique de la carrière de William Friedkin. Le réalisateur vient d’enchaîner depuis quinze ans les films marquants : le thriller gay SM Cruising, Police Fédérale Los Angeles sommet du polar eighties ou encore son formidable remake de Clouzot Le Convoi de la peur. Problème, toutes ces œuvres ont été des échecs retentissants au box-office (en dépit de bonnes critiques) et les tentatives sur des sujets plus légers (l’excellent film de casse The Brink’s Job et la comédie Le Coup du siècle) n’ont pas rencontré plus de faveurs. C’est donc tout naturellement que Friedkin décide de revenir au genre fantastique, dans lequel il a donné son plus célèbre film à ce jour, L’Exorciste. L’association de son nom à un récit traitant de surnaturel, voilà qui devait attirer le chaland en mal de sensation. Il n’en fut rien, commercialement comme qualitativement.

Friedkin tente de se renouveler dans La Nurse et par conséquent renie tous les principes établis dans L’Exorciste. Formé au documentaire, il avait instauré dans ce dernier un style « réaliste » et direct, inscrivant le fantastique dans le quotidien, ce qui renforçait l’effroi des situations horrifiques, les exactions de Regan ayant traumatisé des générations de spectateurs. Là, Friedkin cinéaste de l’épure et de la narration efficace se perd dans une veine esthétisante qu’il ne maîtrise pas. Lorgnant vers le Paul Schrader de La Féline (pour l’ambiance érotique et cette imagerie léchée) ou le Neil Jordan de La Compagnie des loups (la tonalité de conte, les scènes oniriques en forêt), Friedkin se rate dans les grandes largeurs. Ces cinéastes sont férus d'un style chargé et esthétisant frisant le mauvais gout sans jamais y tomber mais Friedkin par prise de risque et opportunisme dans son choix n'atteint jamais l'équilibre miraculeux entre grâce et kitsch que savent obtenir ces derniers.

La cause est entendue dès la scène d’ouverture voulue mystérieuse, mais la musique datée, la photo bleutée d’une rare laideur (signée par le pourtant doué John H. Alonzo à l’œuvre sur le Scarface de De Palma) et les effets spéciaux ratés (les manifestations de l’arbre maléfique sont vraiment risibles) font perdre tout espoir pour la suite. Des fautes de goût indignes du réalisateur parsèment l’ensemble ainsi que des fautes techniques étonnantes (les faux raccords sont légion).

Le montage particulièrement abrupt (même si on arrive à sérieusement s’ennuyer pendant la petite 1h28 que dure le film) laisse clairement à penser que le film a échappé à Friedkin, la faute à des producteurs peu satisfaits de la direction qu’il souhaitait emprunter. En l’état, les gros défauts signalés (ajoutés à une interprétation transparente dont l’ex-James Bond Girl Carey Lowell) ne laissent cependant pas croire au chef-d’œuvre maudit.

Sorti en dvd zone 2 français chez Opening

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