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vendredi 4 janvier 2013

Salaud - Villain, Michael Tuchner (1971)

Vic Dakin, un truand londonien extrêmement violent, met sur pied un hold-up avec d'anciens compagnons. Le tempérament agité, frisant la psychopathie, de Vic, qui ne parvient à s'entendre qu'avec sa mère et son jeune amant, l'oppose aux autres malfrats et risque de menacer le succès de l'entreprise.

Au début des années 70, un grand désir de polar se fait jour dans une production anglaise un peu à la traîne sur les évolutions récente du genre (Inspecteur Harry, French Connection...). Trois films majeurs sont donc produits coup sur coup en deux ans avec les mémorables La Loi du milieu de Michael Hodges (1971), Villain de Michael Tuchner et The Offence de Sidney Lumet (1972).

Cette nouvelle vague est pourtant tuée dans l'œuf par l'échec commercial de ces films (qui deviendront pourtant culte avec le temps surtout le Hodges) et il faudrait quasiment attendre 10 ans et le succès de The Long Good Friday (1980) pour relancer le genre même s'il ne disparaît pas complètement des écrans anglais. Les raisons de ces échecs sont l'extrême noirceur et la violence prononcée de ces trois films à laquelle le public anglais n'était pas prêt et bien qu'inférieur aux films précités, Villain s'avère particulièrement gratiné dans la déviance.

Villain adapte le roman The Burden of Proof de James Barlow et est surtout inspiré de la vie du vrai gangster Ronnie Kray qui avec son frère jumeau Regie domina la pègre londonienne durant les années 50 et 60 (et source d'inspiration également de The Long Good Friday). On retrouve donc de ces caractéristiques dans le truand Vic Dakin incarné par Richard Burton, à savoir un psychopathe en puissance, homosexuel et maladivement attaché à sa mère. L'intrigue est assez conventionnelle avec le gang de Dakin réalisant un violent hold-up mais oppressé par la police et peut-être infiltré par une taupe ne parvenant pas à récupérer son butin. Ce postulat efficace mais assez mince offre donc un écrin idéal à Richard Burton pour une prestation mémorable en gangster hargneux et imprévisible. C'est dans son royaume, les ténèbres d'une chambre qu'on le découvre alors qu'il tend une embuscade chez un croupier trop bavard qu'il va atrocement mutiler et tuer sous nos yeux.

Burton mêle froideur et rage extrême à une sensibilité et fragilité surprenante, la tendresse de sa mère (qui semble tout ignorer de ses activités) semblant tout juste apaiser la bête qui sommeille en lui. L'autre point d'ancrage est son amant Wolfe (Ian McShane) mais aucune douceur à attendre de ce côté-là avec une relation dominant/dominé quasi SM où le malheureux Wolfe est soumis au bon vouloir, la violence et jalousie de Dakin à tout moment. Burton prenait un énorme risque avec cette facette du personnage, écornant son image de macho coureur de jupon (les scènes trop explicites finissant par être coupées au montage comme un baiser avec Ian McShane) et ce sera une des raisons de l'insuccès du film.

L'originalité du film tient donc surtout à ce héros haut en couleur et la mine menaçante, le regard fou de Burton hante longtemps après le visionnage. Sans être captivante l'intrigue est plutôt bien menée et comporte son lot de morceau de bravoure dont un braquage routiers des plus brutal et à l'ancienne (pas d'armes à feu mais des gourdins et batte de base-ball au fracas douloureux), des moments de cruauté mémorable (cette scène d'ouverture qui pose l'ambiance) et un casting de trognes intimidantes faisant son petit effet. Le tout jeune Ian McShane tire bien son épingle du jeu face à Burton, minet plus frêle que les brutes épaisses qui l'entoure mais tout aussi peu recommandable avec un penchant pour le chantage et le proxénétisme. Il reste néanmoins plus humain et engageant que les autres, tout comme l'inspecteur déterminé joué par Nigel Davenport.

C'est donc surtout par son ton et son ambiance que le film innove (avec ses décors fait d'usines désaffectées et de docks inquiétant) grâce notamment à son écriture inhabituelle où le duo d'auteurs comique de télévision Dick Clement et Ian La Frenais (notamment célèbre en Angleterre pour leur série culte The Likely Lads) collabora avec l'acteur américain Al Lettieri connu pour ses rôles de malfrats (Le Parrain, Guet-apens, Mr Majestyk) et aussi ses vrais liens avec le Milieu.

La mise en scène nerveuse de Michael Tuchner et la splendide photo de Christopher Challis apporte également une solide assise visuelle à l'ensemble. Tous ces éléments contribue au ton réaliste et à la fois décalé du film trop novateur à sa sortie mais qui pose les bases de The Long Good Friday qui hissera ces qualités vers un excès et une folie plus grands encore.

Sorti en dvd zone 2 anglais sans sous-titres

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