Un shérif arrête le frère de l'homme le
plus puissant de la région. Il n'a pour alliés qu'un adjoint ivrogne,
un vieillard boiteux, un gamin, une joueuse de poker et un hôtelier
mexicain, et contre lui une armée de tueurs.
Grand classique de Hawks,
Rio Bravo
est reste ce monument du western tout en était une forme
d'aboutissement parfait du style de son réalisateur. C'est pourtant un
Hawks dans le doute qui aborde le film, sa prolifique carrière ayant
connu sa plus longue interruption avec l'échec de son onéreux péplum
La Terre des Pharaons
quatre ans plus tôt et après lequel il s'exilera en Europe. De retour à
Hollywood, Hawks décide donc de revenir au western genre auquel il a
déjà offert son lot de chef d'œuvre avec
La Captive aux yeux clairs et
La Rivière Rouge.
Le financement du film sera obtenu grâce à l'accord immédiat de John
Wayne alors que la Warner est moyennement motivée à le produire.
En
effet le western s'il est loin d'être en déclin a surtout envahi les
écrans du média en pleine expansion qu'est la télévision avec des série
comme
Cheyenne,
Maverick ou
Au nom de la loi.
Un constat s'impose alors à Hawks et guidera les directives données à
ses scénaristes Jules Furthman et Leigh Brackett. Dans toutes ses
séries, l'essentiel est de retrouver ses héros d'une semaine à l'autre,
plus que les scénarios, c'est le lien et l'attachement entre les
personnages et le téléspectateur qui fait perdurer le programme.
Dans cet ordre d'idée, l'intrigue de
Rio Bravo
est une suite d'archétypes dans son canevas et ses personnages : le
shérif livré à lui-même et seul contre tous, le méchant riche
propriétaire à aux hommes de mains nombreux et vénaux, l'ivrogne en
quête de rédemption, le jeune coq virtuose de la gâchette... Ce importe
ici c'est la célébration si chère à Hawks de cette époque où "les hommes
étaient des hommes", une ode à la camaraderie masculine, à cette union
et ce courage qui permet de répondre présent dans l'adversité. Sorti des
personnages principaux, tout l'arrière-plan de
Rio Bravo est
une quasi abstraction, le théâtre d'une tragédie qui se moque bien de
dépeindre avec réalisme le quotidien de cette ville. L'action n'arrive
qu'au moment opportun, le méchant est presque invisible et ses sbires
des silhouettes (John Carpenter saura s'en souvenir pour son remake
officieux
Assaut), le croque-mort chinois n'apparait qu'après que la poudre ait parlé et que les cadavres jonchent les rues de la ville.
L'important,
c'est la progression dramatique des personnages, leur amitié et leur
union à laquelle va se mêler la romance piquante entre John Wayne et
Angie Dickinson. Hawks avait de nombreuse fois usé de ce procédé (
Seul les anges ont des ailes par
exemple ne fonctionne pas différemment) mais jamais la trame principale
n'avait paru aussi annexe. Ici une fois les héros venus à bout de leur
démons, de leurs angoisse, de leur timidité et ayant trouvé leur place,
une fois soudé en un tout courageux, expérimenté et audacieux, ils sont
invincibles comme le montre le brillant climax final. Le chemin sera
long pour en arriver jusque-là et va mettre en valeur son extraordinaire
casting. Dean Martin offre là sa plus belle prestation dramatique, loin
de la coolitude et décontraction qu'on lui connaît.
Fragile, à fleur de
peau et tourmenté en alcoolique repenti il est vraiment le pivot du
film, la résolution reposant sur sa possible rédemption. John Wayne fait
du John Wayne et est parfait en shérif droit comme la justice et
bourru, roc sur lequel tous se reposent mais humanisé par sa maladresse
dans sa jolie romance avec Angie Dickinson. Wayne n'a d'ailleurs jamais
été aussi tendre, bousculé par une Angie Dickinson typique des héroïnes
de Hawks (qui aura réutilisé nombre de dialogues et situations par
lesquels il aura façonné la Lauren Bacall du
Port de l'angoisse et
Le Grand Sommeil)
avec une sexualité plus agressive (quelles jambes n'est-ce pas ?).
Walter Brennan retrouve un emploi qu'il connaît bien avec le boiteux et
bougon Stumpy, toujours aussi attachant et drôle tandis que Ricky Nelson
fait un fringant jeune premier, sobre et séduisant.
Fort de tous
ces atouts, Hawks au sommet de son art nous offre un florilège de son
registre avec une pureté inégalée. Screwball comedy enlevée (les
échanges entre Wayne et Dickinson du plus moqueur au plus tendre sont un
régal), maîtrise narrative stupéfiante (l'ouverture sans dialogue où
les rapports sont posés avec limpidité, John Wayne qui descend chercher
Angie Dickinson et la porte jusqu'à sa chambre) et action parcimonieuse
mais d'une redoutable efficacité.
Et que dire de cet instant de
plénitude absolue, cette complicité à l'image lorsque notre groupe enfin
complet chante et joue à l'unisson (et l'occasion pour Ricky Nelson
star rock'n'roll adolescente de démontrer ses talents) ? Avec
Rio Bravo
Howard Hawks nous fait tout simplement partager un grand moment avec
des amis qui ne nous quitteront pas de sitôt même après le mot fin...
Sorti en dvd zone 2 français chez Warner
Extrait "My riffle, my poney and me" la classe tout simplement !
Bonjour Justin, je suis entièrement d'accord avec votre critique, analyse juste, chef d’œuvre intégral!
RépondreSupprimerJe me demande dans quel format (4/3 ou 16/9 ou autre écran large) le film a-t-il été tourné.
J'ai vu et aimé ce film à l'origine en noir et blanc, puis en couleur 4/3 sur nos premiers écrans télé, puis vu et revu en VHS, et j'ai l'impression que le format du DVD Blu-ray actuellement disponible recadre le film et grignotte les images.
Sauriez-vous me répondre? Ou un autre internaute cinéphile?
Merci d'avance.
Hello Isabelle,
RépondreSupprimerA l'origine le film a été tourné 1:37 et a depuis été réédité en 1:85, format utilisé sur le dvd et probablement le blu-ray ce qui explique le rognage d'image...
Merci Justin, il me semblait bien que certains plans souffraient d'un cadrage inapproprié. Il est regrettable que certains éditeurs de DVD ne prennent pas en compte le format original. Personnellement je suis assez sensible à la composition de l'image et le changement de format peut lui nuire...
SupprimerPuis-je vous demander quelle est votre source pour cette information? (Connaître le format d'origine est une question qui m'intéresse souvent, mais où trouver l'info?).
Le changement de format est indiqué sur la page wikipedia du film
RépondreSupprimerhttp://fr.wikipedia.org/wiki/Rio_Bravo_%28film%29
Pour les changements de format on est passé dans une situation inversée de l'époque de la vhs. Avant on rognait l'image pour qu'elle rentre dans l'écran de télévision pour les diffusion tv et maintenant c'est l'inverse pour que ça s'adapte au 16/9e. Dans les deux cas ce n'est pas très intelligent de la part des éditeurs...
Il est vrai que les films en Cinémascpoe ne passaient pas dans nos petits écrans...
RépondreSupprimerJe vais de ce pas sur wikipedia!
A bientôt...