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mercredi 10 avril 2013

Fat City - John Huston (1972)


En Californie, à Stockton, Billy Tully est un ancien boxeur devenu alcoolique après le départ de sa femme. Aidé par son ami Ernie Munger, il tente aujourd'hui de refaire surface et de revenir sur le ring...

Le thème de l'échec, central dans l'œuvre de John Huston, pu y prendre des voies bien différentes de l'épique et picaresque L'Homme qui voulut être roi (1975) à la destinée implacable du polar Quand la ville dort (1950) ou de la noirceur de la quête du Trésor de la Sierra Madre (1948). La tension, le dépaysement et le souffle des films précités est totalement absente de ce Fat City où cette dimension de l'échec prend un tour des plus dépressif et ordinaire pour nous plonger littéralement la tête dans le caniveau.

Le film s'ouvre sur les plans des quartiers populaires de cette cité Californienne grouillante et pauvre de Stockton avant de nous faire pénétrer la demeure de notre héros loser Billy Tully (Stacy Keach). La chambre insalubre, la mine hagarde de Stacy Keach et la bouteille de whisky bien entamée à portée de main sur la table de nuit, on se croirait dans une chanson de Kris Kristofferson et l'on n'est finalement pas surpris d'entendre jouer son Help Me Make It Through the Night, leitmotiv musical du film (belle bande son folkeuse d'ailleurs ).

Huston dépeint ici l'Amérique des perdants, pas celle des perdants magnifique comme saura l'être un Rocky (1976) mais celle dont la guigne et l'insignifiance semble déjà inscrite dans les gènes. L'histoire suit les destins croisés de deux boxeurs, le vieux champion qui a raté le coche joué par Stacy Keach et le rookie talentueux et ambitieux incarné par Jeff Bridges. Huston ne les fait pas évoluer en trajectoires inversées, mais plutôt en miroir où Bridges marié trop jeune gâche son potentiel et s'apprête à mener une carrière quelconque et une vie médiocre après que sa petite amie e lui ait plus ou moins passé la bague au doigt sans qu'il y trouve à redire.

Keach représente un futur cauchemardesque avec un parcours très proche mais alourdit du poids des ans et des excès, tentant un retour auquel il est le seul à croire et s'enfonçant dans une relation sordide avec l'alcoolique Oma (Susan Tyrrell, saisissante et vieillie avant l'âge en pochtronne beuglante).Si Huston pose un vrai regard de compassion sur eux, il leur retire toute gloire (les images du seul adversaire battu par Keach bien mal en point avant le combat, faisant de cette poisse un virus contagieux) et les fige à leur inextricable sort. Stacy Keach est poignant d'abnégation veine et d'autodestruction, trouvant là un de ses meilleurs rôles (et retrouvera cet emploi d'épave alcoolique en plus excessif encore dans le polar anglais The Squeeze) tandis que Bridges offre un pendant plus sobre et inconsciemment résignée de cet aura de perdant.

Adapté par Leonard Gardner lui-même de son roman éponyme, Fat City brille par le réalisme teinté de poésie qu'instaure Huston. La magnifique photographie de Conrad L. Hall se fait aussi ensoleillée et chaleureuse sur certains extérieurs (l'ouverture, les boulots fermier de Keach) que crue et neutre dans les intérieur où le grouillement des bars miteux, l'agitation des salles de boxe agitées et la crasse des chambres de motel nous sautent au visage et accentue ce sentiment d'emprisonnement dans cette spirale de lose, la vraie. Le dialogue final entre Bridges et Keach appuie cette idée et plus encore le dernier regard de Keach, le regard de celui qui n'a plus rien à perdre ni à espérer de la vie. Glauque et beau, un grand Huston.


Sorti en dvd zone 2 français chez Columbia

2 commentaires:

  1. Je crois bien que le Sixto Rodriguez du film n'est pas le Sixto Rodriguez auquel vous pensez.

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  2. Effectivement je me suis un peu emballé j'ai cru que c'était notre folkeux sachant que je connaissait pas son apparence à l'époque mais ce n'est pas lui ^^. Le nom m'a induit en erreur alors que ça doit être assez commun dans la communauté hispanique. Je corrige ça !

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