En Californie, à Stockton, Billy Tully
est un ancien boxeur devenu alcoolique après le départ de sa femme. Aidé
par son ami Ernie Munger, il tente aujourd'hui de refaire surface et de
revenir sur le ring...
Le thème de l'échec, central dans l'œuvre de John Huston, pu y prendre des voies bien différentes de l'épique et picaresque
L'Homme qui voulut être roi (1975) à la destinée implacable du polar
Quand la ville dort (1950) ou de la noirceur de la quête du
Trésor de la Sierra Madre (1948). La tension, le dépaysement et le souffle des films précités est totalement absente de ce
Fat City
où cette dimension de l'échec prend un tour des plus dépressif et
ordinaire pour nous plonger littéralement la tête dans le caniveau.
Le
film s'ouvre sur les plans des quartiers populaires de cette cité
Californienne grouillante et pauvre de Stockton avant de nous faire
pénétrer la demeure de notre héros loser Billy Tully (Stacy Keach). La
chambre insalubre, la mine hagarde de Stacy Keach et la bouteille de
whisky bien entamée à portée de main sur la table de nuit, on se
croirait dans une chanson de Kris Kristofferson et l'on n'est
finalement pas surpris d'entendre jouer son
Help Me Make It Through the Night, leitmotiv musical du film (belle bande son folkeuse d'ailleurs ).
Huston dépeint ici l'Amérique des perdants, pas celle des perdants magnifique comme saura l'être un
Rocky
(1976) mais celle dont la guigne et l'insignifiance semble déjà
inscrite dans les gènes. L'histoire suit les destins croisés de deux
boxeurs, le vieux champion qui a raté le coche joué par Stacy Keach et
le
rookie talentueux et
ambitieux incarné par Jeff Bridges. Huston ne les fait pas évoluer en
trajectoires inversées, mais plutôt en miroir où Bridges marié trop
jeune gâche son potentiel et s'apprête à mener une carrière quelconque
et une vie médiocre après que sa petite amie e lui ait plus ou moins
passé la bague au doigt sans qu'il y trouve à redire.
Keach représente un
futur cauchemardesque avec un parcours très proche mais alourdit du
poids des ans et des excès, tentant un retour auquel il est le seul à
croire et s'enfonçant dans une relation sordide avec l'alcoolique Oma
(Susan Tyrrell, saisissante et vieillie avant l'âge en pochtronne
beuglante).Si Huston pose un vrai regard de compassion sur eux, il leur
retire toute gloire (les images du seul adversaire battu par Keach bien
mal en point avant le combat, faisant de cette poisse un virus
contagieux) et les fige à leur inextricable sort. Stacy Keach est
poignant d'abnégation veine et d'autodestruction, trouvant là un de ses
meilleurs rôles (et retrouvera cet emploi d'épave alcoolique en plus
excessif encore dans le polar anglais
The Squeeze) tandis que Bridges offre un pendant plus sobre et inconsciemment résignée de cet aura de perdant.
Adapté par Leonard Gardner lui-même de son roman éponyme,
Fat City
brille par le réalisme teinté de poésie qu'instaure Huston. La
magnifique photographie de Conrad L. Hall se fait aussi ensoleillée et
chaleureuse sur certains extérieurs (l'ouverture, les boulots fermier de
Keach) que crue et neutre dans les intérieur où le grouillement des
bars miteux, l'agitation des salles de boxe agitées et la crasse des
chambres de motel nous sautent au visage et accentue ce sentiment
d'emprisonnement dans cette spirale de
lose,
la vraie. Le dialogue final entre Bridges et Keach appuie cette idée et
plus encore le dernier regard de Keach, le regard de celui qui n'a plus
rien à perdre ni à espérer de la vie. Glauque et beau, un grand Huston.
Sorti en dvd zone 2 français chez Columbia
Je crois bien que le Sixto Rodriguez du film n'est pas le Sixto Rodriguez auquel vous pensez.
RépondreSupprimerEffectivement je me suis un peu emballé j'ai cru que c'était notre folkeux sachant que je connaissait pas son apparence à l'époque mais ce n'est pas lui ^^. Le nom m'a induit en erreur alors que ça doit être assez commun dans la communauté hispanique. Je corrige ça !
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