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mercredi 17 juillet 2013

The Big Lebowski - Ethan et Joel Coen (1998)

Jeff Lebowski, prénommé le Dude, est un paresseux qui passe son temps à boire des coups avec son copain Walter et à jouer au bowling. Un jour deux malfrats le passent à tabac. Il semblerait qu'un certain Jackie Treehorn veuille récupérer une somme d'argent que lui doit la femme de Jeff. Seulement Lebowski n'est pas marié. C'est une méprise, le Lebowski recherché est un millionnaire de Pasadena. Le Dude part alors en quête d'un dédommagement auprès de son richissime homonyme...

Les frères Coen se seront plus tout au long de leur filmographie à célébrer l'américain moyen, le péquenaud et autres hillbilly qu'ils s'amusent à placer dans des situations où leurs bêtises et/ou caractère décalés fait toujours tourner le plan à la catastrophe. Jamais de condescendance cependant (condescendance justement moquée à travers le héros de Barton Fink) de la part du duo issue de cette classe moyenne et qui intègre finalement ce qu'il connaît le mieux à des intrigues criminelles alambiquées oscillant entre sérieux (Sang pour sang meilleur film noir de ces 30 dernières années) et humour très noir (Fargo meilleur film noir de ces 20 dernières années). Avec The Big Lebowski, les Coen signent ainsi une sorte d'ode à ce type de personnage avec le glandeur magnifique que constitue Jeff Lebowski alias The Dude (Jeff Bridges).

La scène d'ouverture est un grand moment avec la voix off caverneuse de Sam Elliott présentant le Dude et l'ornant d'une aura mythique, tout comme son terrain de jeu avec la cité des anges dont nous découvrons l'étendue à travers ses lumières nocturnes. Cette belle introduction affirme toute sa nature décalée lorsque l'on découvre ledit Dude : quelques kilos en trop, barbe et chevelure de hippie sur le retour, robe de chambre crasseuse et bermuda informe. Une pure allure de fumeur de joints sans emploi prenant la vie à la cool mais dont la tranquillité va être troublée lorsque deux malfrats le confondant avec un autre vont le malmener et comble de tout, souiller son tapis qui "se mariait si bien à la pièce".

Le Dude va donc s'improviser détective et entre vrai/faux enlèvement, demande de rançon et péripéties loufoque diverses va tenter de résoudre l'énigme policière en cours. Les Coen construisent une intrigue de film noir labyrinthique dont l'inspiration avouée est celle de Raymond Chandler et son Grand Sommeil. Tout comme chez Chandler (et l'adaptation qu'en tira Howard Hawks) l'intérêt repose moins sur la logique rapidement incompréhensible de la trame complexe que sur les rencontres et situations traversées par le Dude, Philip Marlowe du pauvre.

Le film est ainsi un catalogue délirant des figures les plus pittoresques de la communauté de LA, de la plus snob (Julianne Moore en artiste au phrasé précieux et adepte de la peinture au vagin), la plus superficielle (milliardaire producteur de porno aux villas surdimensionnée, filles faciles) à la plus bizarre (l'étrange gang des nihiliste mené par Peter Stormare et Flea le bassiste des Red Hot Chili Peppers icône californienne s'il en est). Et tout cela sans compter la cour folklorique qui entoure le Dude avec Walter (John Goodman) vétéran du Vietnam à la gâchette facile ou encore leur rival de bowling, l'inoubliable Jésus Quintana (inoubliable John Turturro).

L'ensemble du film se plie ainsi au rythme nonchalant d'un Dude qui suit l'enquête plus qu'il ne la mène balloté au gré des évènements. Jeff Bridges est absolument prodigieux de décontraction et de cool attitude (et ce phrasé si marqué avec ces Maaaaaaaaan ! ponctuant chaque phrase VO obligatoire bien sûr) et fait montre d'une réjouissante absence d'égo par le look peu flatteur qu'il ose adopter. Mais c'est en fait chaque personnage qui aura son moment ou sa phrase culte à débiter tout au long du film. John Goodman se taille bien sûr la part du lion entre envolées impromptues sur le Vietnam et crise de colère délirante (This is what happens when you fuck a stranger in the ass !) mais Steve Buscemi est en souffre-douleur plus en retrait est très attachant également et que dire de John Turturro et ses survêtement criards, ses poses "viriles" et ses dialogues imagées ?

Sous le délire ambiant l'émotion n'est pas absente (voir la fin très émouvante du personnage de Buscemi) notamment dans l'attachement que l'on ressent entre les héros aux personnalités antinomiques mais finalement complémentaire et les Coen entre exotisme de pacotille et kitsch assumé (les interludes musicaux hilarant) conserve leur patte si identifiable.

L'inspiration est autant dû à leur imagination fertile qu'aux personnalités réelle ayant inspirées celle du film, Jeff Dow ami producteur des Coen étant le vrai Dude et Peter Exline autres connaissance des Coen vétéran du Vietnam et adepte du softball (remplacé par le bowling plus convivial dans le film) servant en partie de base à celui de Walter. Venant après le triomphe public et critique de Fargo (1996), The Big Lebowski aura un accueil mitigé à sa sortie mais gagnera au fil des ans son statut de film culte. Au point de susciter un festival annuel où les fans jouent au bowling et rejouent les répliques du film, mais aussi d'une boutique à New York dédiée au Dude où sont vendues les objets les plus divers à son effigie !

Sorti en dvd zone 2 français chez Universal

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