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lundi 13 janvier 2014

The Spectacular Now - James Ponsoldt (2013)


Sutter est un adolescent brillant, drôle, charmant... et très porté sur la boisson. Son quotidien est chamboulé par sa rencontre avec la timide Aimee, une jeune femme totalement différente de lui.

Le teen movie et la touche « indé » se marient magnifiquement dans cette œuvre sensible et juste. Le film adapte le roman éponyme de Tim Tharpe nominé par la National Book Award comme meilleure livre de jeunesse en 2008. Le réalisateur James Ponsoldt se sera principalement approprié ce matériau originel en déplaçant l’intrigue en Géorgie alors que le roman se déroule en Oklahoma, imprégnant ainsi de ses propres souvenirs adolescents la trame du livre et notamment en attribuant au héros nombre de traits de caractère du jeune homme qu’il était alors.

C’est la voix-off narquoise de Sutter Keely (Miles Teller) qui nous accompagne en ouverture, l’adolescent nous faisant découvrir sa vie insouciante. Drôle, plein d’esprit et populaire, Sutter savoure chaque moment d’un quotidien oisif qu’il traverse avec un détachement amusé. Sans doute un peu trop puisque sa petite ami Cassidy (Brie Larson) lasse de cette désinvolture finit par rompre. Voulant fêter cette rupture dont il se fiche comme du reste, il va se réveiller le lendemain sur un gazon inconnu après une nuit de beuverie. C’est là qu’il va rencontrer Aimee  Finicky (Shailene Woodley) jeune fille de son lycée qui est en tout point son opposé. Discrète et studieuse, elle évolue dans une sphère bien éloignée du fêtard Sutter mais les deux vont pourtant sympathiser, notre héros se voyant en pygmalion qui va socialiser la timide Aimee.

On croit voir venir l’intrigue romantique adolescente convenue et ces rebondissements éculés mais on contraire le film n’aura de cesse de contredire nos attentes. Avant que la trame ne vogue vers des sentiers inattendus, la caractérisation des personnages pas tout à fait dans les clichés qu’il semble véhiculer nous aura mis la puce à l’oreille. Sutter sous son assurance semble constamment dissimuler une fêlure plus secrète qui ne se devinera dans un premier temps que par ce gobelet alcoolisé qu’il sirote en permanence, l’ébriété quasi permanente lui évitant de s’impliquer à son environnement de la plus futile (sa mère lui reprochant de ne pas avoir étendu sa chemise) ou la plus concrète des manière. 

C’est ainsi qu’il aborde sa relation avec Aimee mais la fraîcheur et la sincérité de celle-ci vont ébranler ce détachement apparent. Les solitudes des deux personnages se répondent et se complètent, dans une tonalité sentimentale charmante pour Aimee découvrant ses premiers émois amoureux et plus dramatiques pour Sutter placé face à ses contradictions.

The Spectacular Now est une œuvre représentative de la réalité des familles monoparentale, des enfants ayant appris à grandir dans des couples divorcés. Hormis le rôle de mère dépassée de Jennifer Jason Leigh, les parents sont donc ici en retraits et défaillants (la mère d’Aimee lui faisant effectuer sa tournée de journaux quotidienne),  aux jeunes livrés à eux-mêmes de réagir à cette situation selon leurs personnalités. On découvrira qu’Aimee a vécu également un drame personnel avec un père absent, mais sa force de caractère et la connaissance des raisons de cette disparition lui ont fait accepter les faits et c’est sereinement et avec assurance qu’elle envisage son avenir. 

A l’inverse le départ du père de Sutter est entouré de secret, il ne l’a pas revu depuis son enfance et sa mère refuse qu’il communique avec lui. Notre héros révèle ainsi par ce manque son angoisse et sa peur de l’avenir, expliquant son attitude immature face aux études ou ses relations. Le pygmalion n’est alors pas forcément celui que l’on croit, Aimee poussant Sutter dans ses retranchements. 

James Ponsoldt esquive avec brio les clichés, chacun des éléments précités se dévoilant dans une tonalité feutrée, sans élans dramatiques ni rebondissements forcés. Plus la relation devient sincère, plus les fêlures de chacun se devinent, le triangle amoureux annoncé tournant court avec l’ex Cassidy attachée à Sutter mais fuyant son influence néfaste. Une gravité surprenante traverse ainsi le film avec ces adolescents coincés entre l’enfance et l’âge adulte dans ce moment de transition (comme le Say anything de Cameron Crowe auquel on pense beaucoup, l’histoire se déroule en fin d’année entre bal de promo, remise des diplômes et futur choix d’université) où se dessine soi un avenir de tous les possibles soi des portes déjà fermées. 

La romance adolescente est une des plus belles vues dans un teen movie, Miles Teller et Shailene Woodley  exprimant avec une alchimie rare ce mélange de maladresse, de gaucherie et d’abandon qui s’expriment dans ces premiers émois. Miles Teller fonctionne dans les changements d’attitudes brusques, fendant l’armure indifférente de Sutter pour le meilleur et pour le pire, amoureux sincère ou autodestructeur. Shailene Woodley exprime elle une grâce inouïe, son regard tendre et aimant se faisant constamment apaisant. 

James Ponsoldt les saisit avec une vraie délicatesse comme cette scène de première fois tout en douceur et magnifiquement amenée. L’empathie est bien là et rend l’émotion d’autant plus forte lorsque les nuages s’amoncèlent lors des désillusions de la dernière partie. Mais là encore, plutôt que de jouer des clichés éculés, le réalisateur préfère conclure sur une fin ouverte, un regard incertain et nous laisser y croire. Un petit bijou.

En salle en ce moment 

2 commentaires:

  1. J'ai eu l'occasion d'apprécier The Spectacular Now en VO, petit bijou, bien que très peu connu en France... Merci pour votre excellente analyse ! Pour ma part, et, eu égard votre analyse, je rajouterai une petite connivence avec l'excellent film de Stephen Chbosky, "Le monde de Charlie". Ces deux excellents films, ne sont pas uniquement de simples "teen movies", en effet, ils permettent également de mieux comprendre la psychologie et la difficulté du passage "adolescent-adulte". Ils dépeignent des enjeux sociétales de toutes qualités (alcoolisme, sentiment, psychologie, philosophie, peur, névrose, stress)... Selon un avis purement personnel, il est temps d'anéantir l'idée reçue selon laquelle les "teen movies" ne sont voués qu'à un public d'adolescents.

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  2. J'avais beaucoup aimé aussi "Le monde de Charlie" beau film sensible et sobre. Après il mettait en scène un héros timide et introverti comme on a déjà vu beaucoup et c'est pourquoi je préfère The Sectacular now qui creuse vraiment un type de personnage qui se résume au côté antipathique et/ou superficiel dans d'autres teen movie l'approche est plus originale. Et Miles Teller (qui m'a épaté plus tard dans Whiplash aussi) est fabuleux pour faire passer tout cela. Bien d'accord avec vous su l'aura du teen movie un genre bien plus riche qu'on ne veut bien le penser. En réussite récente avez vous vu "The Myth of the american sleepover" ? Grand film aussi !

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