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mardi 4 août 2015

Redline - Takeshi Koike (2009)

Dans un futur lointain, "gentil" JP et d'autres coureurs automobiles s'affrontent pour gagner la course clandestine qui se déroule une fois tous les 5 ans quelque part dans l'univers : Redline. Dans cette course, tout est permis et les véhicules sont tous modifiés pour anéantir les adversaires et dépasser les limites de la vitesse.

Redline est le premier film longuement attendu (près de sept ans de production) de Takeshi Koike, véritable prodige de l’animation japonaise. Le talent de Koike s’était jusque-là signalé sur des formats courts qui avaient marqués les esprits, que ce soit le segment animé du Kill Bill Volume 1 (2003) de Quentin Tarantino, le mémorable segment Record du Monde de l’anthologie Animatrix (2003, courts métrages animés inspirés de l’univers de Matrix). On pouvait y deviner son attirance pour la SF, l’expérimentation visuelle mais aussi l’attrait pour une certaine esthétique pop présente également dans les séries d’animation auxquelles il a participé (Afro Samurai, Samurai Shamploo). Tout cela fusionne à merveille dans ce déjanté Redline qui semble être une réponse outrancière au mémorable Speed Racer (2008) des Watchowski.

JP « le gentil » est un coureur automobile engagé dans une course interplanétaire aboutissant à la Redline, épreuve ultime se déroulant tous les cinq ans. Une course où tous les coups sont permis, les véhicules surdimensionnés et à l’armement lourd étant à l’image des participants haut en couleur. Engagé dans la dernière course qualificative pour la Redline, JP bien que sachant son sort scellé (il doit faire illusion et perdre dans une magouille mêlant son mécanicien à la mafia) semble l’oublier dans la spectaculaire ouverture. Mise en scène virtuose, collisions spectaculaires et inventivité dans le design comme l’arsenal des véhicules nous entraînent dans un maelstrom de vitesse mémorable.

Au look et attitudes agressifs de ses adversaires JP répond par une dégaine rétro et une mélancolie qui ne semble s’estomper que dans l’ivresse de la course. Notre héros semble donc y croire et est galvanisé comme jamais jusqu’à ce que comme prévu sa voiture le trahissent au pied de la ligne d’arrivée, touchant la victoire du doigt. Celle-ci sera dévolue à la belle Sonoshee McLaren. Eblouit par sa prestation, le public repêche pourtant JP qui va pouvoir participer à la Redline. Celle-ci se déroulera sur la planète militarisée et totalitaire de Roboworld dont les belliqueux habitants vont tout faire pour saboter.

Le héros par son côté sentimental est très réussi et attachant, notamment par sa volonté de courir avec une voiture sans armes et préférant gagner « à l’ancienne » par ses seuls talents de pilote. Il rejoint ainsi Sonoshee, mettant tout son cœur à cette course qui est un rêve d’enfance. Koike entoure leur relation d’un romantisme sobre s’exprimant dans cette passion commune et réussit à émouvoir sous la débauche de couleurs bariolées et de stylisation extrême. Tous les coureurs sont caractérisés dans cette idée d’un lien fusionnel à leur véhicule, sentimental pour notre couple mais aussi mécanique pour l’impressionnant Machine Head Testujin voir magique les sœurs Bobos et Boboi. On retrouve cette idée dans le régime militaire de Roboworld à l’arsenal guerrier biomécanique. Passé la première course, on savoure ainsi la découverte de cet univers foisonnant de détails (Koike multipliant les lieux, créatures et atmosphères improbables et inventifs) prenant le temps de tisser les liens naissant ou le passif entre les personnages.

Il fallait bien cela pour se sentir totalement impliqué par la grande course finale. Takeshi Koike y déploie toute sa maestria à travers d’impressionnants rebondissements où la course se mêle à la bataille rangée menée par Roboworld. Le sentiment de danger et l’adrénaline s’expriment par des véhicules, pilotes et parcours qui se ploient et se déforment littéralement par la seule force de l’ivresse et la douleur de la vitesse. Les sept ans de production se justifient par le perfectionnisme de Koike qui dessine lui-même tout les intervalles, et Redline a ainsi l'honneur d'être le dernier film de japanime animé à l'ancienne, sans le moindre effets numérique. Pour s'en convaincre il suffit de faire défiler le film image par image et l'on constatera que chaque dessin, même figé, ne comporte aucune perdition dans la finition du décor ou des personnages. Une véritable prouesse où Koike reprend les effets qu’il utilisait pour exprimer le dépassement de soi du coureur du court Record du monde mais le tout dans un tourbillon de son et lumière qui rend l’expérience psychédélique.

Il n’atteint cependant pas tout à fait la grandeur du stupéfiant final de Speed Racer, le côté sensoriel (incroyablement intense il faut le reconnaître) supplantant l’accomplissement émotionnel du film des Watchowski (mais qui surclasse dans l'ivresse chaotique le récent et surestimé Mad Max Fury Road). On reste cependant accroché à son siège dans un mémorable finish au forceps amenant une superbe conclusion romantique. Une sacrée expérience. 

Sorti en dvd zone 2 français chez Kaze 

 

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