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jeudi 3 mars 2016

Le Tigre de Jade - Pai yu lao hu, Chu Yuan (1977)


Afin de venger la mort de son père, décapité par un traître, Zhao Wu-Ji décide d'infiltrer le clan ennemi, commanditaire de cet assassinat et maître dans l'art de manier les poisons. Au cours de son périple, il côtoiera la mort et se liera avec de curieux personnages.

Le Tigre de Jade constitue une des plus grandes réussites de Chu Yuan et son adaptation favorite de l’auteur Gu Long. Le réalisateur était devenu incontournable au sein de la Shaw Brothers en se faisant l’illustrateur idéal des romans Wu Xia (chevalerie et arts) à succès de Gu Long. Le romancier se détachait de la moyenne de ce genre littéraire en faisant de ses récits des thrillers tortueux où les combats importaient moins que les mystères à résoudre. L’autre point passionnant était sa description du Jiang Hu (le monde des arts martiaux), univers complexe et fantaisiste peuplé de bretteurs hors-pairs et prêt à tout pour être le plus puissant. Par son sens de la narration et son brio de conteur, Chu Yuan aura su traduire mieux que personne l’art du rebondissement et la force mélodramatique de Gu Long. La quête de pouvoir et de domination du monde des arts martiaux devient le théâtre de toutes les trahisons dans le virtuose La Guerre des Clans (1976 et variation martiale du Parrain), un jeu de piste  dans le trépidant Le Complot des Clans (1977) et enfin un duel basculant dans l’abstraction avec le fascinant Le Sabre Infernal (1976). C’est pourtant bien avec Le Tigre de Jade que Chu Yuan va capturer  au plus près la complexité de Gu Long.

L’histoire nous plonge dans un traditionnel récit de rivalité entre clans et de vengeance. Le jour de son mariage, le jeune Zhao Wu-Ji (Ti Lung) assiste à l’assassinat de son père, décapité par un émissaire du clan Tang. Dès lors il va remonter la piste des assassins tout en évitant les nombreux pièges placés sur sa route par les Tang. Le jeu de faux-semblants n’a pas seulement des vertus ludiques au fil des rencontres plus ou moins amicales de notre héros mais sert aussi à rendre plus floue la différence entre les deux clans ennemis. Si la vilénie des Tang est posée dès le meurtre initial, Zhao Wu-Ji va découvrir que les siens ont manœuvré de manière toute aussi sournoise pour vaincre, sa quête de vengeance naïve s’avérant bien vaine face à ces purs enjeux de pouvoir. Chu Yuan avait exploré ces aspects dans les films précédents mais en privilégiant toujours une dimension ludique quand Le Tigre de Jade dessine une vraie tragédie. 

Tous les liens passés ou noués en cours de film par Zhao Wu-Ji vont voler en éclat pour des ambitions qui le dépasse, dans une spirale dramatique implacable. Ti Lung par ses traits à la fois dur et juvénile exprime la simplicité de caractère de son personnage pris par des enjeux qui le dépasse et Chu Yuan par sa mise en scène met en avant une facette théâtrale, les fameux décors studios de la Shaw Brothers sont encore plus factice qu’ordinaire comme pour figurer une intrigue où tous ne sont que les pions d’une comédie de la haine qui se rejoue perpétuellement.

Une œuvre passionnante dont Chu Yuan aura accentué l’approche tragique par rapport au roman de Gu Long qui se finissait sur un point d’interrogation où le héros hésitait entre suivre les préceptes du monde des arts martiaux et sa conscience qui le rongeait. 

Sorti en dvd zone 2 français chez Wld Side 

 

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