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mercredi 26 décembre 2018

Misère et Noblesse - Miseria e nobiltà, Mario Mattoli (1954)

À Naples, dans les années 1880, Felice Sciosciammocca, un écrivain public sans le sou, partage l'appartement où il vit en famille, avec la famille de son ami Pasquale, un photographe de rue. Les deux familles désargentées y cohabitent tant bien que mal, bien souvent contraintes de se passer de repas. Un jeune aristocrate, Eugenio, amoureux d'une danseuse, Gemma, leur propose un marché : Felice et Pasquale, en échange d'un somptueux repas, se feront passer pour ses nobles parents afin de convaincre le père de la demoiselle, un ancien cuisinier quelque peu infatué de noblesse, de la laisser l'épouser.

Misère et Noblesse est une merveille de vaudeville toute à la gloire de la personnalité comique de Toto alors au sommet de sa gloire. Le film constitue le point central d'une trilogie où Toto incarne le même personnage dans une série d'adaptation de pièces du dramaturge napolitain Eduardo Scarpetta (Un Turco napoletano (1953), Misère et noblesse et Il medico dei pazzi (1954), tous réalisés par Mario Mattoli). Misère et Noblesse est la troisième adaptation de cette pièce écrite en 1888, après celle muette de 1914 (dans laquelle joue d'ailleurs Eduardo Scarpetta) et une parlante de 1940 (où joue cette fois Vincenzo, fils d'Eduardo Scarpetta). Le film s'inscrit pleinement dans le cadre du néoréalisme rose où les sujets sociaux s'imprégnaient de comédie plutôt que du drame, avec ici une patine de film historique théâtral et visuellement chatoyant (et à la mode.

Cet aspect factice et théâtral est assumé dès la scène d'ouverture où le spectateur est associé à ceux d'une pièce, les crédits du film apparaissant quand ceux-ci lisent le livret et l'histoire démarrant alors qu’ils voient le rideau se lever depuis leur loge. Le tournage en studio, la propreté dénuée de réalisme et les couleurs pastel du procédé Ferraniacolor (moins onéreux que le Technicolor) mettent donc en valeur les acteurs plutôt que l'environnement pour souligner la pauvreté des héros. Les familles de Felice (Toto) et Pasquale (Enzo Turco) se partagent ainsi un appartement exigu, accumulant les loyers de retard et peinant à nourrir leur famille.

Le jeu outré et les dialogues vachards soulignent par l'hilarité leur situation désespérée entre dettes et faim qui les tenaillent. La placidité et presque insouciance face à un dénuement trop habituel souligne paradoxalement ce désespoir, dans des situations triviales (Felice et Pasquale se disputant en douce une tartine de confiture chez la jolie voisine d'en-dessous (Franca Faldini future épouse de Toto)) souvent porté par le génie comique de Toto (l'hilarant gag où il fait commander une pizza en pensant à tort être payé par un client). La narration habile caractérise avec limpidité une multitude de personnages, leurs interactions et passif (la femme quittée de Felice, le prétendant vieillissant de Gemma (Sophia Loren) la danseuse...) qui serviront dans la dernière partie purement vaudevillesque.

Le mélange de cabotinage et d'instinct primaire de crève-la-faim de nos héros se faisant passer pour des nobles - et où s'articule le thème central u clivage social insurmontable sans l'artifice et la tromperie - provoquent une hilarité irrésistible que la mise en scène conventionnelle de Mario Mattoli ne fait pas complètement décoller. Les quiproquos multiples se résolvent ainsi de manière un peu précipitée et sans avoir exploités suffisamment étirés leur potentiel comique. Il n'en reste pas moins une superbe comédie où le ressent la patte de l'écriture de Ruggero Maccari, partenaire d'Ettore Scola encore scénariste puis réalisateur sur ses meilleurs films comme Affreux, sales et méchants (1976) dont Misère et Noblesse semble être un prédécesseur léger.

Sorti en dvd zone 2 français chez Tamasa 

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