En Grande-Bretagne, au XXe siècle, un couple de personnes âgées se retrouve confronté à une guerre nucléaire et à ses suites.
En
ce début des années 80, le regain de tension de la Guerre Froide ravive
les angoisses d'un conflit nucléaire au sein de la population. En
Angleterre, la bande dessinée When the wind blows
capture par puissance et émotion ces inquiétudes lors de sa parution en
1982. L'ouvrage va susciter un vif débat public et connaître des
adaptations sous forme de pièce de théâtre ou encore de fiction
radiophonique. En cette même année 1982, Raymond Briggs va immensément
gagner en popularité lorsque sa bande dessinée The Snowman
va être adaptée en court-métrage d'animation par Dianne Jackson et
diffusé à la télévision britannique. C'est un immense succès et
désormais diffusé chaque noël en Angleterre et dont la chanson est
apprise dans les cours préparatoire. Ce phénomène va donc ouvrir la voie
pour transposer sous la même forme When the wind blows, œuvre plus difficile de Briggs.
A la mise en scène on retrouve Jimmy T. Murakami, certes coupable du nanar Les Mercenaires de l'espace (1980) mais surtout spécialiste de l'animation et qui fut notamment assistant réalisateur sur The Snowman.
L'esthétique du film est particulièrement fidèle à Raymond Briggs avec
ce trait rondouillard des personnages, ce croisement entre réalisme et
dépouillement des environnements, l'usage de couleurs pastels. Nous
plongeons ici dans un monde où cette guerre nucléaire est à la fois
imminente dans le contexte, et si éloignée du quotidien du quotidien
rural d'Hilda et Jim, couple de personnes âgées. On met en parallèle la
menace qui se rapproche (insert d'actualité live, vision de préparatifs
de lancer de missile, de sous-marin nucléaire l'affut) et de la
réception toute naïve de l'information par le couple. Les évènements
tragiques arrivent sporadiquement par la radio, Jim lit distraitement
les instruction de survie en cas d'attaque dans un manuel acheté en
passant à la librairie.
On nous dresse ainsi un cadre bucolique où nos
personnage badinent candidement de la situation tout en vacant à leurs
tâches quotidiennes. On s'amuse des précautions maladroitement suivies
par Jim pour protéger son foyer, sous les reproches d'Hilda dont la
salle de séjour est mise sens dessus dessous - décrocher toute les
portes pour façonner un abri de fortune à l'intérieur. Cela sert surtout
à tisser l'amour tendre nourrit par les personnages au fil des années
et dresser finalement un portrait de l'Angleterre d'avant face un
conflit bien d'aujourd'hui. Les personnages souffrent ainsi de ne pas
voir un leader charismatique à la Churchill ou Montgomery venir les
haranguer et inciter à prendre courage. Ces figures se rattachent à la
Deuxième Guerre Mondiale où sous les souffrances et privations du Blitz,
la population était solidaire - sentiment qui passe dans les flashbacks
du couple. Ici le minimalisme de l'environnement souligne la profonde
solitude et isolement d'Hilda et Jim face à leurs dirigeants, leur pays,
leur congénère. C'est pourtant la naïveté et la croyance d'antan qui
dominent chez eux, convaincu d'abord qu'ils seront prévenus en cas de
catastrophe puis quand celle-ci arrivera qu'ils seront secourus à coup
sûr.
Visuellement Murakami mélange les techniques entre animation
traditionnelle, stop-motion pour certains accessoires et éléments de
décors, et parfois incrustation de nos personnages animés dans des
cadres "en dur". Cela crée un effet troublant où la candeur "dessinée"
des personnages se confronte de plus en plus à la crudité palpable des
environnements qui gagnent en désolation. Les effets poétiques
crayonnées dans une texture presque de fusain jouent autant sur la
rêverie (Hildat soufflant sur un bourgeon qui enclenche un court moment
musical) que le pur cauchemar avec la glaçante séquence d'attaque
nucléaire.
Dès lors le malaise s'installe progressivement, l'allant
amusé des personnages s'estompant dans une faillite morale (l'extérieur
apocalyptique vu de sa fenêtre) et physique avec les effets croissants
des radiations. La gorge se serre peu à peu quand le délabrement des
lieux se conjugue à celui physiologique (amaigrissement, perte de
cheveux) du couple, qui ne pouvant plus croire en l'humain, en recours
avec une touchante maladresse à Dieu au final, en vain - la prestation
de John Mills et Peggy Ashcroft au doublage est exceptionnelle. Une
œuvre poignante, nécessaire et intemporelle.
Sorti en bluray anglais chez BFI et doté de sous-titres anglais
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