August in the Water - Mizu no naka no hachigatsu, Sogo Ishii (1995)
Après la chute de deux météorites, la
population de la région de Fukuoka est, peu à peu, affectée par une
étrange maladie. Ukiya et Mao sont amoureux d'Izumi, une championne de
plongeon. Suite à une mauvais saut, Izumi tombe dans le coma - comme
certains autre habitants de la région. A son réveil, elle développe des
pouvoirs extra-sensoriels qui lui font comprendre que le monde est
promis à la destruction à moins qu'elle ne s'interpose.
Après des débuts expérimentaux marqués par un style punk, Sogo Ishii
effectue dans les années 90 un virage vers des œuvres plus mystérieuse,
oniriques et apaisées comme Angel Dust (1994), Le Labyrinthe des rêves (1997) ou ce August in the water.
Le film entrecroise le récit d'apprentissage adolescent avec un
postulat mystico-fantastique et teintée de peurs apocalyptiques marquées
par cette fin de XXe siècle. La région de Fukuoka est plongée dans un
été caniculaire où se manifestent d'étranges phénomènes depuis la chute
de deux météorites. Les sources d'eau se tarissent ce qui entraîne une
grande sécheresse, tandis qu'un mal inconnu appelé la "maladie de
pierre" qui transforme les organes en pierre frappe la population. C'est
en cette période trouble que le jeune Mao (Shinsuke Aoki) rencontre une
nouvelle élève, Izumi (Rena Komine) qui est aussi une aspirante
championne de plongeon. Les joies et les peines de ce premier amour
fragiles vont s'entremêler à cette atmosphère de fin du monde qui
symbolise aussi la perte d'innocence.
Une sorte de destinée ou volonté supérieure plane d'emblée sur les
personnages. Lorsque Ukiya (Masaaki Takarai) autre camarade de lycée
amoureux d'Izumi veut mesurer ses chances avec elle, il ira consulter
son amie Miki (Reiko Matsuo) férue d'astrologie voir la compatibilité de
leurs signes. Cet élément trivial révèle pourtant une funeste
perspective qui se révèlera exact pour Izumi qui tombe dans le coma
suite à un incident de plongeon. La jeune fille déjà hypersensible en
réchappe mais perçoit désormais son environnement très différemment.
Sogo Ishii parvient brillamment à conférer à une éclatante esthétique
estivale une atmosphère inquiétante. La menace est d'abord latente et
incertaine quand sa caméra parcoure les rues de Fukuoka, s'attardant sur
le ciment brûlé par le soleil, déformant l'image en longues focales
pour accentuer l'effet de canicule et provocant la crainte sourde et
inexpliquée avec les multiples images de quidams s'effondrant frappés
par la "maladie de pierre" de plus en plus contagieuse.
Le réalisateur
adopte ensuite un point de vue double, celui de Mao et de l'entourage
d'Izumi témoins perplexes de la métamorphose de celle-ci, puis celui
d'Izumi elle-même où à travers son regard on saisit cette perception
nouvelle du monde qui l'entoure. Le jeu détaché et mutique de Rena
Komine est le pivot de la rupture narrative et stylistique du film après
une première partie teintée d'étrange mais où l'on en restait au récit
adolescent candide. Symptômes de désordre mental suite au coma ou éveil à
un nouvel état qui pourrait expliquer (et stopper) les phénomènes
étranges alentours ? Le film laisse planer un fascinant mystère et si
l'on penchera plutôt pour l'option fantastique, Sogo Ishii ne fait
intervenir aucun élément formel explicitement surnaturel dans sa mise en
scène. Tout est une question d'ambiance, faite de vues planantes sur
les paysages, d'inserts sur la faune et la flore, auxquels la photo de
Norimichi Kasamatsu donne un effet à la fois réaliste et halluciné. La
bande-son qui mélange actualités alarmistes et musique synthétique
flottante participe pleinement à ce sentiment d'angoisse et de rêverie.
Même quand vient l'heure des similis explications, le film demeure
envoutant grâce à cette approche. Selon le moment de la journée (ou du
récit) où l'on retrouve certains décors naturels, ceux-ci basculent d'un
mysticisme animiste ancré dans le réel à une imagerie qui nous emmènent
presque sur une autre planète. La pierre et les autels sacrés en forêt
peuvent vues comme les vestiges d'un passé ancestral ou, une passerelle
pour un ailleurs représentant le futur de l'humanité. Le dauphin, parmi
les mammifères les plus intelligents et fascinants de par son moyens de
communication, en devient donc un interlocuteur privilégié pour Izumi
incomprise des humains.
La couleur du film varie progressivement du bleu
de l'eau rattachée à la terre et l'humanité vers des teintes plus
contrastées exprimant la dualité et le détachement progressif d'Izumi.
On est happé de bout en bout et le récit onirique fonctionne tout autant
que la romance (très chaste), jusqu'à une sublime scène d'adieu o
l'aimée s'évanouit comme dans un songe avant de plus tardives et
touchantes retrouvailles. Une œuvre envoutante qui fait finalement
figure de pré Donnie Darko (2001) au Japon, peut-être que Richard Kelly a vu ce film, en tout cas les ponts thématiques (l'angoisse millénariste de fin du monde, la mélancolie adolescente) et visuels sont là.
Sorti en dvd zone 2 anglais et doté de sous-titres anglais et il semble que le film traîne en entier et sous-titré anglais sur youtube lien ci-dessous ne traînez pas !
Bonjour, ou malheureusement l'édition semble épuisée et pas de chance youtube a désactivé la vidéo que j'avais partagé où l'on pouvais voir le film en entier. Envoyez moi un mail et j'aurai peut-être une solution pour vous aider :-)
Bonjour, merci pour la chronique, auriez-vous quelques infos sur la disponibilité de cette zone 2 en DVD? L'édition semble difficilement trouvable...
RépondreSupprimerBonjour, ou malheureusement l'édition semble épuisée et pas de chance youtube a désactivé la vidéo que j'avais partagé où l'on pouvais voir le film en entier. Envoyez moi un mail et j'aurai peut-être une solution pour vous aider :-)
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