La belle Paula Craig persuade son amant Stephen
Price de cambrioler la banque pour laquelle il travaille. Paula tue
Stephen et réclame l'aide d'un jeune ingénieur, Mike Lambert. Ce dernier
apprend que Paula cherche à faire endosser le crime à l'un de ses
meilleurs amis...
Traquée est une remarquable série B sous haute influence des classiques Assurance sur la mort de Billy Wilder (1944) et Le Facteur sonne toujours deux fois
de Tay Garnett (1946). Ces deux films étaient adaptés de James M. Cain,
et étaient porté par l'apport de ce dernier dans le polar à savoir
délaisser les histoires de gangsters et de détective pour placer les
gens ordinaires et leurs démons au centre du récit criminel. Sans égaler
ces chefs d'œuvre, Traquée relève de la
même approche. Comme souvent dans ce schéma nous avons un pauvre bougre
(Glenn Ford) qui va tomber dans les griffes d’une femme fatale (Janis
Carter) qui va le manipuler en vue d'une machination où notre héros
devra mourir en se substituant à son amant pour qu'ils s'échappent avec
un magot. Mike (Glenn Ford) est un déçu revenu de tout mais toujours
croyant en sa bonne étoile tandis que Paula (Janis Carter) elle aussi
frustrée par sa condition semble vouloir prendre un chemin plus rapide
et criminel avec son amant banquier (Barry Sullivan).
Le récit est mené avec habilité distillant où laissant deviner le
parcours cassé et les frustrations des protagonistes, tout introduisant
progressivement la nature de la manipulation. Le classicisme du schéma
est transcendé par l'interprétation. Glenn Ford pour son deuxième film
noir après Gilda (1946) offre une
prestation subtile et plus vulnérable que ce que l'on connaîtra de lui,
un initialement fort mais abimé par la vie qui rappelle certaine
prestation de John Garfield (ce qui nous ramène au Facteur sonne toujours deux
fois encore). Et alors le grand atout c'est Janis Carter en femme
fatale. Elle dénote, comme le signalera plusieurs fois Glenn Ford, par
son élégance bourgeoise qui détonne avec le trou paumé où elle évolue,
le modeste métier de serveuse dans laquelle on la découvre.
C'est ce
contraste qui éveille chez Mike une suspicion qui ne s'éteindra jamais
vraiment. Mais paradoxalement cette ambition larvée ne caractérise pas
une mante religieuse impitoyable totale. Cette séduction ambiguë amène
une électrisante tension sexuelle à chaque apparition de sa silhouette
élancée, à chaque œillade et sourire sur son visage anguleux. Du coup le
twist (que nous tairons) est d'autant plus surprenant et enrichit le
personnage qui en plus des atours perfides de la femme fatale est aussi
une femme amoureuse. Le petit spasme quasi orgasmique qu'elle a lors
d'une de ses pires exactions est assez mémorable - comme le dit Patrick Brion en bonus avec des films de plus grand standing elle avait le potentiel d'une Barbara Stanwyck..
Richard Wallace livre une mise en scène efficace mais fonctionnelle,
avec plus d'inventivité il y avait matière à en faire un vrai classique.
Néanmoins la facture d'ensemble est élégante notamment avec la superbe
photo de Burnett Guffey. Jolie découverte !
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