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mercredi 26 octobre 2011

Les Tontons Flingueurs - Georges Lautner (1963)


Fernand Naudin (Lino Ventura), un ex-truand reconverti dans le négoce de machines agricoles, à Montauban. Sa petite vie tranquille va basculer lorsque son ami d'enfance, Louis dit le Mexicain, un gangster notoire, de retour à Paris, l'appelle à son chevet...

Celui-ci, mourant, confie à Fernand, avant de s'éteindre, la gestion de ses « affaires » ainsi que l'éducation de sa petite Patricia (Sabine Sinjen), au mécontentement de ses troupes et sous la neutralité bienveillante de maître Folace (Francis Blanche) son notaire, qui ne s'émeut pas trop de la querelle de succession à venir.

Fernand Naudin doit affronter les frères Volfoni – Raoul (Bernard Blier) et Paul (Jean Lefebvre) – qui ont des visées sur les affaires du Mexicain : un tripot clandestin, une distillerie tout aussi clandestine, une maison close, etc. D'autres "vilains" vont se révéler être très intéressés par la succession dont Théo et son ami Tomate.


Grand classique tardif de la comédie policière à coup de rediffusions télé massive, Les Tontons Flingueurs ne fit guère sensation auprès du public et de la critique lors de sa sortie, au point que Lautner entama dans la foulée son film suivant, Des Pissenlits par la racine, presque pour s’excuser. Adapté du roman de Albert Simonin (auteur de Touchez pas aux grisbi et Le cave se rebiffe, portés à l’écran par Sautet et Gilles Grangier et qui formaient sur papier une trilogie avec Les Tontons) l’intrigue classique du genre est progressivement dynamitée par Lautner, qui applique ici pour la première fois la formule de plusieurs de ses films à venir.

Situations décalées (le vieux gentleman qui vient voir Ventura durant la fusillade finale), personnages plus loufoques les uns que les autres (mention spéciale à Claude Rich en fiancé précieux et surtout Robert Dalban en majordome pseudo anglais et ancien cambrioleur) pour un grand numéro comique.

Ça démarre donc sobrement, avec ce récit de rivalité et de succession chez les gangsters, pour peu à peu joyeusement se dérider, au point d'en oublier l'argument policier en plein milieu de film avec une séquence de beuverie mémorable où les bandes de Ventura et Blier se rabibochent. Contrairement aux apparences, le script (bien éloigné du livre, bien qu’adapté par Simonin lui-même) fut suivi rigoureusement et cette scène cultissime tournée le plus sérieusement du monde.

La réalisation de Lautner est pleine d'invention, parvenant à bien mettre en valeur les acteurs lorsqu'ils lancent les dialogues géniaux de Michel Audiard (avec des gros plans savamment distillés cachant la pauvreté ou l'absence de décor) et traduisant par l'image le côté décalé de l'ensemble avec pas mal de plans et de cadrages expressionnistes alambiqués, évoquant le cinéma d'Orson Welles. Casting grandiose, avec un Lino Ventura bien moins monolithique qu’ailleurs et qui se lâche comme rarement (la danse dans la maison pour éviter les balles), Bernard Blier en grande gueule trouillarde et son frère incarné par Jean Lefebvre.

On retrouvera d’autres futurs habitués dans des seconds rôles comme Horst Franck et Venantino Venantini. Échec relatif à sa sortie, le film s’inscrira petit à petit dans l’inconscient collectif grâce à ses fameuses répliques notamment. Il ouvrira surtout la voie aux deux autres films réunissant la même équipe (Les Barbouzes et Ne Nous fâchons pas formant une géniale trilogie), le souvenir du tournage euphorique n’ayant pas été entamé par l’insuccès.

Sortie en dvd chez Gaumont

Bande-annonce génialement décalée



Et une pincée de poésie signée Michel Audiard tout de même:

Patricia, mon petit... Je voudrais pas te paraître vieux jeu ni encore moins grossier. L'homme de la Pampa parfois rude reste toujours courtois mais la vérité m'oblige à te le dire : ton Antoine commence à me les briser menu !

Vous avez beau dire, y'a pas seulement que de la pomme, y'a aut'chose. Ça serait pas dès fois de la betterave, hein ?

Les cons, ça ose tout. C'est même à ça qu'on les reconnaît.

3 commentaires:

  1. On peut le revoir chaque année sans lassitude, et se réciter les répliques...
    Une mention spéciale à Bernard Blier!

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  2. Clair que Blier est géniallisssime j'adore aussi cette réplique

    "Mais il connait pas Raoul ce mec, il va avoir un réveil pénible. J'ai voulu être diplomate à cause de vous tous, éviter que le sang coule, mais maintenant c'est fini. Je vais le travailler en férocité, le faire marcher à coup de lattes ! A ma pogne je veux le voir ! Et je vous promet qu'il demandera pardon ! Et au garde à vous ! "

    Il 'y avait que lui pour le dire aussi bien ^^

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  3. On en redemande!
    Par association d'idées, je me souviens du film de MOCKY "Les Compagnons de la Marguerite" (1966) : moins énooorme, dialogues certainement moins percutants et mémorables que chez Audiard, mais une bonne idée de scénario, et l'on y retrouve Claude Rich et Francis Blanche dans le même genre de personnages. Très drôle...

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