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samedi 6 octobre 2012

W.E. - Madonna (2011)


Londres, décembre 1936.
Pour pouvoir épouser l’américaine Wallis Simpson, déjà deux fois divorcée, le Roi Edouard VIII est contraint d’abdiquer, quelques mois seulement après le début de son règne.
New-York, février 1998.
Malheureuse dans son mariage, Wally Winthrop passe ses journées à l’exposition qui précède la vente aux enchères, chez Sotheby’s, des objets ayant appartenu au Duc et à la Duchesse de Windsor. Wally découvre alors peu à peu ce qu’a été la vie de Wallis. 


A défaut d’avoir sorti des disques réussis ces dernières années Madonna est en train de s'illustrer enfin dans le cinéma, non pas devant la caméra où elle n’a jamais vraiment convaincue mais en tant que réalisatrice. Obscénité et Vertu (2008) était déjà un premier essai intéressant et prometteur où Madonna transposait dans un Londres contemporain le destin de jeunes paumés aux grandes aspirations de carrière en écho à son propre parcours dans le New York du début 80’s. L’ambition est plus grande encore avec cet original et captivant W.E. où sous les grands enjeux  l’artiste délivre une nouvelle fois un film très personnel et singulier.

Le film se présente comme un vrai/faux biopic fantasmé à travers une double narration mêlant les déboires contemporain de Wally (Abbie Cornish) jeune femme malheureuse dans son mariage et délaissée par son mari et ceux bien connus de Wallis Simpson, la femme qui amena le Prince Edward à renoncer au trône par amour. Une exposition  new yorkaise des objets ayant appartenu à Wallis Simpson et Edward amène donc un transfert chez Wally, fantasmant et idéalisant à sa manière "l'histoire d'amour du XXe siècle" alors que son propre couple bat de l'aile.
La narration opère ainsi des va et viens un peu hachés par rapport à des objets de l'exposition qui ranime des moments de l'existence du couple Wallis/Edward en flashback avant de s'associer à des situations plus concrète de la vie de l'héroïne moderne. Madonna fait même preuve de plus d'audace encore en créant un dialogue entre les deux Wally et Wallis qui s'interpellent et se réconforte mutuellement à travers le temps et les rêves questionnant ainsi l'idéalisation que se fait Wally de cette histoire d'amour.

Wallis Simpson sermonne son double d'un cinglant "live your life !" dans un moment difficile montrant  combien cette belle romance fut également un fardeau. Pour résoudre ses problèmes, Abbie Cornish doit donc parvenir à saisir l'envers du mythe et la douleur que fut également l'histoire d'amour pour Wallis Simpson entre traque des paparazzi, exil d'Angleterre, mépris de la famille royale et jugement moral du peuple à qui elle a arraché son roi.

Madonna semble avoir mis beaucoup d'elle même dans ces moments-là qu'elle a connu à son échelle, ainsi que par les relations de couple orageuse entre Abbie Cornish et son époux violent. Madonna (auteur du scénario) se reconnaît autant dans la figure passionnée et sacrificielle de Wallis Simpson (qui mieux qu'elle pour décrire les affres de la célébrité) que celle fascinée par le mythe de Wally (et on devine l'orageux mariage avec Sean Penn dans la description tumultueuse du couple moderne).

La forme est parfaitement adaptée à cette narration audacieuse, le montage étant toujours inventif dans la confusion constante qu'il crée entre les époques et visuellement Madonna oscille entre grand classicisme romanesque emphatique et un côté arty percutant, les moments les plus bricolés étant d'ailleurs les scènes d'époques (l’usage du format 16 mm ou de la caméra super 8 pour les instantanés intimistes dans un esprit films domestiques)  auxquelles s'ajoutent aussi des images d'archives. 

Cela donne un ensemble classieux et foutraque à la fois avec des moments osés comme lorsque durant une fête Wallis Simpson se trémousse sur Pretty vacant des Sex Pistols mais avec suffisamment de maîtrise (nous sommes devant l’idée que s’en fait Wally et non devant la vraie histoire) que la pilule passe. Le casting parfait avec une Abbie Cornish très attachante et formant un beau couple avec Oscar Isaac (les deux s'étaient déjà croisés sur Sucker Punch), Andrea Riseborough est magnifique en Wallis Simpson (bien plus jeune l’actrice exprime avec force sa maturité et sa réignation) et James d'Arcy alterne idéalement la prestance princière et la fragilité de l'homme. La bande originale de Abel Korzeniowski est quant à elle somptueuse de lyrisme emporté et participe grandement à l’attrait constant des images. Une belle réussite qui rend impatient des prochaines tentatives de l’artiste à la mise en scène.


Sorti en dvd zone 2 français chez Studio Canal

3 commentaires:

  1. C'est le premier billet positif que je vois au sujet de ce blog et, comme je fais totalement confiance à tes goûts cinématographiques, je vais peut-être revenir sur ma décision de ne pas voir ce film...

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  2. C'est vrai que le film s'était fait détruire par la critique française mais à l'inverse la presse anglo-saxonne avait été très élogieuse je crois qu'il y a eu un à priori du fait que ça soit Madonna à la caméra. D'ailleurs un des reproches revenant souvent c'était la reconstitution clinquante un peu publicitaire mais vu que tout ce qui se passe dans le passé une vision fantasmée par l'héroïne passionnée par cette histoire c'était plutôt justifié. Tu peux tenter vraiment ça vaut bien mieux que ce qui en a été dit !

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  3. J'ai bien aimé le film aussi, mais laissons tout de même à choisir Madonna !!

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