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jeudi 6 mars 2014

Candyman - Bernard Rose (1992)

Helen Lyne, une étudiante, décide d'écrire sa thèse sur les mythes et légendes locales. C'est en visitant une partie de la ville inconnue qu'elle découvre la légende de Candyman, un homme effrayant qui apparait lorsqu'on prononce cinq fois son nom en face d'un miroir. Helen, pragmatique, choisit de ne pas croire à l'existence de Candyman. Mais son univers bascule dans l'horreur quand une série de meurtres horribles commence ...

Candyman constitue un petit classique du fantastique des 90's, adapté de la nouvelle de Clive Barker Lieux Interdits (et issus de ses recueils de nouvelles Livres de Sang) par l'auteur lui-même. Le film propose un thème qui sans être inédit s'avère assez surprenant dans son traitement à savoir la place qu'occupent les mythes et légendes urbaines et la façon dont elles s'inscrivent dans notre réalité. Cela se manifeste ici à travers la quête de l'héroïne Helen Lyle(Virginia Madsen) qui mène une thèse sur cette question des mythes locaux. Entre deux histoires farfelues prêtant plus au rire qu'à la peur, Helen voit de manière persistante revenir la légende de Candyman durant son étude. Le principe des apparitions du croquemitaine (prononcer son nom cinq fois devant un miroir et il surgit pour vous tuer) semble plus être une marotte des adolescents de la ville mais Helen va découvrir que le mythe s'enracine de manière bien plus concrète dans la culture locale. Candyman serait un jeune homme noir assassiné au XIXe siècle pour être tombé amoureux d'une femme blanche et se vengeant de cette mort injuste et brutale en tuant ceux qui l'invoquent du crochet lui faisant office de main.

Le début du film est absolument fascinant par la façon dont il introduit progressivement la figure de Candyman. Source d'histoire lycéennes pour se faire peur au départ, le mythe s'inscrit progressivement dans le réel par les liens se faisant avec des faits divers irrésolus, par la façon dont la transmission orale inscrit ses tirades dans le paysage urbain (les tags les reprenant comme des poésies apprise par cœur par la population) et enfin de manière sociale puisque le culte du Candyman demeure le plus fort dans les quartiers pauvres de la ville. C'est dans ces lieux qu'il fut tué et sa présence sourde s'imprègne en toile de fond tout en symbolisant les douleurs contenues de cette population désœuvrée. Virginia Madsen dans son enquête nous sert de guide et rend simple tous ces différents concepts tandis que Bernard Rose parvient magnifiquement à instaurer une vraie atmosphère trouble alors qu'aucune réelle menace ne se manifeste à l'écran.

Le film se perd malheureusement quand il délaisse la pure ambiance pour verser dans l'horreur plus explicite. Il y a certes quelques bonnes idées comme cette ambiguïté entre rêve et réalité où la seconde partie plus décousue multiplie les ruptures de ton (le premier réveil ensanglanté d'Helen fait son petit effet) et nous fait hésiter entre surnaturel et folie possible de son héroïne. Les amorces gratuites et assez ratées de jump-scares dans la première partie nous auront pourtant montrées que si Bernard Rose excellait à poser une atmosphère, il était fort maladroit pour susciter la peur.

Tout cette partie nous faisant perdre pied avec le réel s'avère donc un pâle ersatz du bien plus brillant Les Griffes de la Nuit (1984) de Wes Craven dont on ne retrouve ni l'inventivité lors des surgissements de Candyman dans la psyché de Virginia Madsen, ni le génial charisme de son croquemitaine. Si Tony Todd impose une présence physique certaine et un visage étrange et inquiétant, la pauvreté de ses dialogues conjuguée à son jeu monolithique fait grandement regretter d'avoir donné une incarnation physique à Candyman quand sa seule évocation suffisait à effrayer en début de film. Le script perd même un bon moment son principal atout à savoir l'ancrage social de cette mythologie pour verser dans les scènes horrifiques gores quelconques.

La conclusion rattrape un peu ces défauts où Helen devient la figure de proue de tous les exclus terrorisés par Candyman et ose l'affronter un final incandescent dans une sorte de Bonfire Night revisitée où le bûcher célèbrerait la chute de Candyman au lieu de Guy Fawkes. La scène d'enterrement aurait dû terminer le film en appuyant cette idée mais au lieu d'en finir là on aura un épilogue absolument ridicule singeant à nouveau celui des Griffes de la Nuit sans en égaler le malaise (mais belle idée tout de même cette peinture faisant à son tour d'Helen un mythe populaire).

Cela n'empêchera pas le film de remporter un grand succès et deux suites de voir le jour, Candyman 2 (1995, Bill Condon et un Barker encore impliqué) même si raté possède tout de même pas mal de qualités (revenir aux sources du mythe avec les flashbacks sur le passé de Candyman, le cadre bien exploité de la Nouvelle-Orléans) et le troisième est à oublier. Un remake pourrait être pertinent et la seule absence de taille serait l'incroyable musique de Philip Glass (tour à tour onirique, inquiétante et hypnotique avec cet entêtant thème au piano), grande plus-value de ce Candyman.

Sorti en dvd zone 2 français chez Sony 

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