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vendredi 6 juin 2014

The Myth of the American Sleepover - David Robert Mitchell (2010)


C'est la dernière nuit de l'été pour Maggie, Rob, Claudia et Scott. Les quatre adolescents espèrent y trouver le grand frisson : celui des premiers baisers, premiers désirs et premières amours. Leurs chemins se croisent comme les rues de la banlieue ordinaire de Détroit où ils habitent. Entre fêtes, flirts et serments d'amitié, naissent des instants pleins de promesses et d'expérience qui marqueront la jeunesse de ces presque adultes à jamais.

C’est la fin de l’été, les journées se font plus courtes, le temps se rafraîchit et la rentrée des classes est imminente. Alors que le quotidien de l’année scolaire s’apprête à reprendre ses droits, c’est le moment pour un groupe d’adolescent d’une petite ville du Michigan de s’offrir un dernier frisson durant un « sleepover » soit une soirée pyjama. Alors que les teens movie aiment souvent capturer une période ou évènement charnière de l’adolescence (son commencement avec l’arrivée au lycée ou sa conclusion lors de la remise des diplômes), David Robert Mitchell dans ce beau premier film préfère rester dans un troublant entre-deux. Sorti de l’enfance mais pas encore entré dans l’âge adultes, ces garçons et filles sont en quête d’émois et expériences nouveaux mais sans doute pas encore tout à fait prêts à les vivre jusqu’au bout. La scène d’ouverture illustre parfaitement cela lorsque Maggie (Claire Sloma) alanguie à la piscine trouve qu’il a manqué quelque chose à son été tout en observant un garçon séduisant de son âge travaillant sur place. 

Elle le regarde avec envie tout en évitant de croiser son regard, la curiosité, le désir et la retenue timide se confondant dans son attitude. David Robert Mitchell suit donc un ensemble de personnages dans ce moment révélateur et anodin à la fois que constitue le sleepover. C’est un instant intime où peuvent se faire les confidences, les bêtises et découvertes sans que cela prête à conséquence. La soirée pyjama place en effet les personnages un pied dans l’enfance par son principe et l’autre dans l’âge adulte puisque les jeux d’autrefois sont délaissés au profit de la consommation d’alcool et des discussions sur les filles garçons. 

Le réalisateur brasse un grand nombre de clichés dans les situations (séances de spiritisme pour rire, lancer d’œuf sur les passants, jalousies et premiers flirts) mais en amenant un regard neuf. Le film adopte ainsi un ton paisible, bienveillant et contemplatif destiné à laisser le temps aux personnages de se chercher, s’égarer et se relever sans que cela prête à conséquence. Pas de dramatisation exacerbée, de péripétie marquante mais une suite de vignette attachante où dans une unité de temps et de lieux on accompagnera les déambulations des héros.

On aura ainsi Maggie tournant autour du fameux garçon de la piscine en se rendant dans une fête Rob (Marlon Morton) à la libido en ébullition et tombé amoureux fille croisée au supermarché va tout faire pour la retrouver durant cette nuit. Scott (Brett Jacobsen) fraîchement quitté par sa petite amie se morfond et après les avoir revue en photo décide de renouer avec les jolies jumelles Abbey (Nikita et Jade Ramsey) en cherchant à deviner laquelle fut amoureuse de lui. Claudia (Amanda Bauer) nouvelle venue en ville décide quant à elle de faire connaissance durant ce sleepover mais sera confrontée aux petits secrets qui l’excluent encore de ce nouveau cercle de camarade. 

Premiers regards et effleurements timide, premières déceptions et conflits s’entremêlent ainsi dans une tonalité feutrée où l’émotion naitra de la sincérité et candeur des héros ainsi que la mise en scène de Mitchell instaurant un spleen apaisant. C’est une bulle et un moment unique pour ces adolescents, plus dans le ressenti que les situations et qui doit passer par l’image avec un scope magnifique, la photo de James Laxton qui atténue l’éclat de l’atmosphère estivale (tout en évitant la facilité de la rendre crépusculaire, ce n’est pas un début ni une fin mais un moment bien particulier et unique que saisit là le récit) tandis que Mitchell alterne intime et ampleur à travers sa caméra. 

Les situations sont communes à nombre d’autres teen movie et par extension d’expériences adolescentes, mais Mitchell pose un regard qui rend les personnages attachants et bien particulier. On s’inscrit là dans une sorte de canon et de mythe adolescent (d'où d'ailleurs une temporalité incertaine, pas de portable ou facebook ici) magnifié par une imagerie soignée où les destins individuels peuvent exister sous le rite initiatique. Le film semble être une sorte de synthèse parfaite du genre : l’atmosphère en apesanteur d’un Donnie Darko (2001), la « morale » d’un Halloween (1978) (aucune coucherie à signaler au final) ou encore l’unité de temps chère aux meilleurs John Hughes (Breakfast Club (1984), La Folle Journée de Ferris Bueller (1986)… 

Les jeunes acteurs pour la plupart sans expériences sont authentiques et touchants (mention tout de même à Claire Sloma jouant Maggie confondante de charme et de naturel) et Mitchell sait créer des moments où leur sensibilité peut s’exprimer avec la même sobriété traversant l’ensemble du film (on pense à ce passage en montage alterné où Rob et Jen narre leur flirt éphémère à leurs amis sur un ton bien différent situant les nuances entre filles et garçons). Au final aucune des quêtes de cette nuit ne sera complètement résolue, reposant sur une attente, une déception ou des rapprochements inattendus signe de cet âge ou tout est possible et changeant. Il n’y a nul besoin que tout soit réglé semble nous dire Mitchell dans son épilogue matinal apaisé, nos adolescents ont encore le temps de se chercher. Un petit bijou qui aurait grandement mérité une sortie salle en France. 

Sorti en dvd zone 2 français chez Metropolitan

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