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lundi 11 mai 2015

Histoire d'un amour - Back Street, John M. Stahl (1932)

Alors que la jeune et ravissante Ray Schmidt aurait dû se fiancer avec Walter Saxel, un contretemps et un malentendu les séparent. 5 ans après le hasard les réunie. Lui est désormais marié et père, elle célibataire et hésitant à épouser son ancien voisin. Elle devient donc sa maîtresse mais a dû mal à vivre dans l'ombre de sa vraie famille.

Un magnifique mélodrame où John Stahl signe un des plus beaux films sur "l'autre femme". Ce sera ici le récit d'un amour inconditionnel et sacrificiel d'une vie pour Ray (Irene Dunne) pour l'homme marié qu'est Walter (John Boles). Ray est une jeune fille de Cincinnati aimant s'amuser mais jamais sans se livrer réellement. Que ce soit les avances balourdes de représentant de commerce croisés lors de bal ou la demande en mariage sincère de Kurt (George Meeker), son voisin amoureux d'elle, Ray n'y donne pas suite car elle attend d'aimer sincèrement.

Elle l'affirmera concrètement dans un dialogue, elle ne peut se lier inconsidérément, car quand elle aime, c'est tout ou rien et elle sera prête tout y sacrifier. Elle en fera l'amère expérience en rencontrant Walter, fils de bonne famille déjà fiancé. Leur amour est dès le départ placé sous le signe de la dissimulation même si leur jeunesse y donne facette de jeu et que les rencontres n'en sont que plus fougueuses. Pourtant le mariage approche et un rebondissement malheureux empêchera le rendez-vous qui aurait pu tout changer lorsque Walter tentera de présenter Ray sa mère.

Se retrouvant quelques années plus tard aussi amoureux que jamais New York, Walter et Ray reprendront leur liaison clandestine. Désormais adultes, mariés (Walter) ou en âge de l'être (Ray), le couple voit le cycle de l'amour secret reprendre mais dans des proportions plus douloureuses et dramatiques. Pour Ray ce seront un quotidien dépendant et toujours en attente de la disponibilité de l'autre, une vie où elle ne peut rien espérer et construire pour elle-même. Même si cela reste sous-jacent, on devine aussi pour Walter une vie familiale à laquelle il ne peut jamais vraiment profiter ses pensées étant toujours en partie consacrée à "l'autre". La force du film (adaptant un roman de Fannie Hurst, également auteur des livres dont furent tirées les deux versions de Mirage de la vie) est l'absence de jugement moral et la profonde empathie ressentie pour la passion des personnages.

A ne pas quitter son épouse sans se résoudre non plus à laisser Ray vivre sa vie, Walter pourrait passer pour un être égoïste. Pourtant on le verra simplement comme contraint par les conventions mais sincèrement amoureux. De même Ray pourrait passer pour une femme faible et sans résolution propre. Mais elle est bien consciente de l'impasse de sa situation sans accepter d'en sortir. Irene Dunne exprime magnifiquement cela dans la scène où elle tente de raisonner sa voisine qui vit un dilemme similaire, mais il suffira du retour de Walter dans la minute pour contredire ces mêmes conseils qu'elle vient de donner.

C'est ainsi l'amour exclusif et secret d'une vie qui va se dérouler, Walter vivant une existence idéale de façade tandis que dans son ombre le suivra toujours celle représentant son existence secrète mais bien plus réelle. Stahl joue magnifiquement de cette double lecture dans la dernière partie, capturant l'émotion avec une force rare dans les gros plans sur les visages habités d'Irene Dunne et John Boles ou dans ce beau travelling arrière laissant Ray seule au monde après l'entrevue avortée. Ainsi liés de corps et d'esprits, les amants ne pourront se survivre bien longtemps après tant de sacrifices dans le superbe final.

Sorti en dvd zone 2 français chez Universal

Extrait

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