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mercredi 18 janvier 2017

L'Agent - Il Vigile, Luigi Zampa (1960)

Otello Celetti est un père de famille italien un peu oisif, qui inspire volontiers la raillerie. Presque malgré lui, il est admis comme agent municipal de police, et s'empresse alors de parader dans son nouvel uniforme, causant au passage un certain désordre. Après s'être fait rappeler à l'ordre, il décide de changer de méthode, et devient extrêmement zélé, au point de dresser une contravention au maire de la ville...

L’Agent est une comédie italienne méconnue et au carrefour du genre à travers sa star Alberto Sordi. L’acteur y retrouve son emploi d’italien médiocre et veule popularisé dans les années 50 (Un héros de notre temps de Mario Monicelli (1950)) qu’il expose à un propos plus virulent et politisé qui aura cours dans ses grands rôles à venir comme Le Commissaire e Luigi Comencini (1962) et Une vie difficile de Dino Risi (1961). L’Agent prépare en tout point ces deux films dans son scénario et la caractérisation de Sordi qui est déjà un policier tiraillé dans sa vertu face à l’injustice (Le Commissaire) et une girouette jamais dans le bon timing des penchants politiques dominants (Une vie difficile). Otello Celetti est ainsi un père de famille oisif vivant aux crochets de son épouse et de son beau-frère, refusant de travailler et source de moquerie pour son voisinage. La scène d’ouverture donne le ton avec notre héros défilant dans les rues en veste de chambre, apostrophant et perturbant les vrais travailleurs (y compris son jeune fils de 11 ans mécanicien), pas du tout honteux de son statut de parasite avec tout le panache ridicule dont est capable Alberto Sordi.

Suite un concours de circonstances Ottello obtient le job rêvé pour lui, agent municipal motorisé. C’est l’occasion d’un grand numéro comique d’Alberto Sordi dans la première partie du film qui fanfaronne et joue de ce nouveau pouvoir auprès de ceux qui l’ont moqué tout en témoignant de son irrésistible incompétence. Les efforts maladroits pour coller sa première contredanse jouent à la fois du talent gestuel de Sordi (où arborer une posture autoritaire, siffler pour stopper une voiture ou simplement vérifier les papiers d’un automobiliste devient un chemin de croix) mais aussi de sa nature de matamore pathétique tant dans une chaotique démonstration d’autorité où elle crée un embouteillage que pour la séduction balourde d’une conductrice en panne (la star Sylva Koscina dans son propre rôle). Cette première partie appartient à Sordi et son scénariste Rodolfo Sonego concevant comme toujours un écrin idéal à son talent.

Luigi Zampa reprend la main par la suite, lui qui dès ses débuts néoréalistes sut introduire des éléments comiques et déjà traiter de sujet sociaux axé sur la médiocrité ordinaire, la corruption et la compromission. La rencontre avec Alberto Sordi était inévitable sur ces questions et les deux hommes collaboreront deux avant L’Agent, sur L’Art de se débrouiller (1955) et Ladro lui, ladra lei (1958). Le mauvais timing précédemment évoqué de Sordi joue sur le drame en cours lorsque émoustillé il laissera la belle Sylva Koscina échapper à l’amende malgré l’absence de papiers. Celle-ci ayant témoigné sa reconnaissance en citant son nom dans une grande émission de variété, le maire (Vittorio De Sica) le rappelle à l’ordre pour lui rappeler que la loi s’applique à tous, et surtout en période d’élection. Dans son zèle kamikaze, Otello va ainsi traquer le maire coupable d’excès de vitesse et mettre malgré lui à jour la liaison adultère de ce dernier mais aussi ses malversations immobilières.

Sordi est plus en retrait pour laisser place au regard mordant de Luigi Zampa, dénonçant autant la municipalité corrompue que les opposants élevant Otello en instrument de leurs ambitions dans leurs diatribes et un procès improbable. Sordi est une fois de plus grandiose, flatté dans son orgueil d’être et s’élevant en chantre de la vertu et probité. Mais bien évidemment les tirades trop théâtrales, les postures trop exagérée, montre bien que l’autosatisfaction domine sur la vague conscience politique chez lui. Tout cela s’avérera bien vacillant mais comme souvent Sordi amène une forme d’humanité touchante à sa veulerie, le revirement final étant tout autant dû à la lâcheté qu’à une vraie préoccupation de sa famille. La leçon a été bien comprise avec un final hilarant où, une fois de plus notre héros en fait une fois de plus des tonnes en désormais subalternes supérieurement dévoué. 

Sorti en dvd zone 2 français chez Tamasa 

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