Un vaste réseau criminel fait passer
illégalement des paysans mexicains aux États-Unis pour les exploiter à
moindre coût, avant de les renvoyer chez eux et de les assassiner à la
frontière. Les services d’immigration mexicains et américains décident
de conjuguer leurs talents pour en venir à bout et chargent deux de
leurs meilleurs enquêteurs d’infiltrer l’organisation.
Border Incident
est le premier film que signe Anthony Mann pour la MGM après avoir fait
ses preuves dans des séries rondement menées notamment au sein de la
RKO. Le sujet et l'âpreté du traitement peuvent surprendre pour une
production MGM mais résultent d'une volonté de s'ouvrir à une veine plus
réaliste. Ce changement vient notamment de l'embauche du producteur
Dore Schary aux fortes préoccupations de gauche et qui emmène dans son
sillage nombre de collaborateurs ayant la même sensibilité.
Il résulte
donc de cela des productions aux questionnements sociaux forts (Feux croisés
de Edward Dmytryk (1947) un des plus gros succès critiques et public de
Dory à la RKO traitait notamment de l'antisémitisme) qui vont
idéalement se mêler à l'approche efficace d'Anthony Mann. Border Incident est une œuvre à la croisée des chemins pour le réalisateur qui retrouve le postulat d'une de ses plus fameuses série B (La Brigade du suicide
(1947) réalisé pour Edward Small Productions) avec ses policiers
infiltrés dans un cadre qui annonce son virage mémorable vers le
western.
La Brigade du suicide, son
tournage à l'économie et ses décors studios cèdent donc aux grands
espaces californiens et cette frontière mexicaine où sont cruellement
agressés des travailleurs clandestins. La photo de John Alton baigne
pourtant d'une même incertitude et danger les pérégrinations de nos
policiers, les extérieurs dissimulant puis révélant une mort brutale (la
saisissante embuscade de travailleurs dans le canyon, un champ dont
l'horizon nocturne guide vers des ténèbres mortelles) tandis que le
casting recèle de trognes intimidantes. Côté mexicain c'est la cupidité
et la violence crasse des petites mains décérébrées tandis que chez les
profiteurs américains (le personnage d'Howard Da Silva) le calcul
sournois et l'avidité masquent une profonde lâcheté. Le scénario
remarquable caractérise le flic américain (George Murphy) et mexicain
(Ricardo Montalban) dans l'action, la gouaille de l'américain dupant
autant les adversaires que le profil bas et l'audace de Ricardo
Montalban.
La menace permanente de cette mission en infiltration se
ressent par l'incroyable violence de l'ensemble. Tortures, mise à mort
expéditives ou savamment mise en scène (une moissonneuse qui fera de
sacré dégâts) parsèment un récit qui renvoient dos à dos les communautés
mexicaines et américaines soumises à une même avidité et corruption. Le
final est un sacré moment où le film noir se mêle brillamment au
western dans un face à face au sein d'un canyon, notamment la
composition et le cadrage qui précède un affronte au fusil. L'année
suivante Anthony Mann allait signer une sacrée triplette western avec Les Furies, La Porte du diable et Winchester 73
(ce dernier lançant son fameux cycle avec James Stewart) et tout le
brio qu'il démontrera dans le genre est déjà là, tout en reposant sur la
stylisation et la férocité de son passif dans le film noir.
Sorti en dvd zone 2 français chez Wild Side
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