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lundi 4 février 2019

La Louve de Calabre - La Lupa, Alberto Lattuada (1953)


Dans un village reculé de l'Italie du Sud, La Lupa (« La Louve »), une femme à l'attitude et aux mœurs libres, fascine et attire maris et fils qui ne peuvent lui résister. Pourtant, elle s'éprend tout particulièrement de Nanni qui cultive l'olivier et qui souhaite plutôt épouser la fille de celle-ci, Maricchia. Sur les instances de sa mère, Maricchia se marie avec Nanni. Mais, « la Louve » rôde toujours autour de ce dernier, au grand désespoir de Maricchia, sa fille.

Alberto Lattuada signe avec La Louve de Calabre l’adaptation d’une nouvelle de Giovanni Verga où il trouvera matière au pan le plus charnel de son œuvre. Les terres d’un village reculé du sud de l’Italie (l’austérité du cadre laisse supposer sans la nommer que l’on se trouve en Sicile) révèlent ainsi drame tournant autour d’un désir à la fois coupable et libéré. « La Louve » (Kerima) est une femme mûre dont la soif de liberté se conjugue à l’assouvissement de ses désirs charnels. Cette indépendance repose sur le pouvoir que lui confère ses charmes sur les hommes du village et dont elle use plus qu’à son tour.

La Louve par son allure languide et provocante est ainsi une figure émancipée et moderne en décalage avec les environnements et mœurs moyenâgeuses, provoquant la jalousie et la malveillance des autres femmes. Le problème surviendra par l’habitude d’user de ces charmes comme instrument de pouvoir à des fins viles et narcissiques le plus souvent, notamment quand elle met à rude épreuve les sens de don Pietro (Mario Passante) patron de l’usine du village. La Louve ne se résume plus ainsi qu’à cette présence tentatrice (il est largement supposé que nombres d’hommes du village ont cédés en échange de divers services) et à une toute puissance ne pouvant être contrariée. Le drame se noue ainsi lorsque sa fille Maricchia (May Britt) tombe amoureuse du même homme que sa mère avec le viril Nanni (Ettore Manni). 

La présence virginale, innocente et juvénile de Maricchia s’oppose ainsi à la présence provocante de sa mère dans un triangle amoureux en huis-clos particulièrement tendu. Lattuada sait capturer les jeux de regards et de corps assurés et tentateur de la Louve, happant l’attention d’un Nanni soumis à ses pulsions charnelles. Le réalisateur fustige par le comportement de la Louve non pas pour sa liberté de mœurs mais par sa malveillance morale et égoïste. La satisfaction ne repose pas sur le rapprochement, mais sur la domination et supériorité que sa sensualité lui confère par rapport aux autres. 

Sans égale face aux autres femmes du village, la blessure est narcissique pour la Louve quand on lui préfère une rivale qui s’avère être sa fille. May Britt s’avère un peu trop pleurnicharde pour constituer une antagoniste intéressante et c’est bien la présence sulfureuse de Kerima qui fascine, ses formes se confondant au panorama montagnard dans les compositions de Lattuada. A la fois humaine dans l’affichage sans fard de ses charmes et détestable par l’usage qu’elle en fait, c’est une figure tragique ne pouvant survivre dans ce cadre binaire. Les montées de chaleurs charnelles parsemant le film trouvent ainsi leurs réponses dans un final apocalyptique où leur désir interdit peut se consumer, littéralement. 

 Visible en ce moment dans la rétro Alberto Lattuada à la Cinémathèque française

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