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mercredi 17 juin 2020

Station Six-Sahara - Seth Holt (1963)

Une séduisante blonde (Carroll Baker) fait irruption dans une station de forage au milieu du désert et sème le trouble parmi les hommes qui y travaillent dans le plus complet isolement.

Station Six-Sahara est la seconde adaptation d'une pièce de Jean Martet, venant après le SOS Sahara de Jacques de Baroncelli (1938). On doit le scénario à Brian Clemens et Bryan Forbes dont on distingue bien le sens du malaise, de l'ironie et de l'atmosphère dans les moments les plus réussis du film. A la mise en scène on trouve Seth Holt, longtemps homme à tous faire au sein de la Ealing et qui avait fait de brillant début de réalisateur avec Nowhere to go (1958), excellent polar qui fut aussi le dernier film produit par la firme. Tous les éléments sont donc réunis pour un spectacle original et intrigant et cela fonctionne pendant un temps. On va suivre les rapports unissant cinq hommes isolés dans une station de forage en plein désert.

Le nouveau venu Martin (Hansjörg Felmy) découvre ainsi la relation dominant/dominé qui rythme le quotidien de la station, et surtout le mental défaillant que la longue isolation a provoqué chez les différents personnages. Le très agité Fletcher (Ian Bannen) s'exalte ainsi par procuration, que ce soit en lorgnant sa collection de photo érotique ou alors en rachetant et lisant le courrier de son collègue Macey (Denholm Elliott). Ce dernier se complait dans la soumission et la fourberie, rapportant les faits et gestes des autres au chef de la station Kramer (Peter van Eyck). A l'inverse l'isolement a éveillé chez lui un complexe de supériorité (sur lequel jouent les nationalités différentes en présence) et une volonté d'écraser l’autre dépassant ses prérogatives professionnelles.

Seth Holt capture ainsi à merveille cette virilité toxique et ces névroses larvées à travers le jeu maniéré du casting où seul Martin semble en retenue, pas encore contaminé par la folie du désert. Ces tensions explosent lors des parties de poker que Kramer impose à ses compagnons, les pertes et endettements durant celles-ci participant à son ascendant sur eux. La différence sera que cette fois Martin ne s'en laissera pas compter et que l'attribution du gain final manquera de virer au pugilat. C'est là qu'une voiture accidentée vient interrompre le conflit, notamment grâce à sa charmante passagère inconsciente, la blonde Catherine (Carroll Baker).

La nymphe de Baby Doll (1956) impose désormais sa sensualité dans des attitudes provocantes plus conscientes du regard des autres, plus adultes. Tout en entretenant le même rapport toxique avec son ex époux qui conduisait la voiture, elle joue du désir qu'elle éveille chez les mâles isolés de la station. Posséder la jeune femme déplace donc la rivalité ambiante des personnages sur un autre terrain. Alors que la tension bien amorcée devrait être à son comble, c'est pourtant là que le film s'enlise peu à peu. Alors bien sur la plastique avantageuse de Carroll Baker, ses regards brûlants et ses poses suggestives posent une tonalité certaine, Seth Holt peine pourtant à créer une vraie tension érotique.

Le film est certes plus osé sur la question que pas mal de productions anglaises trop timorées de l'époque, mais faute d'une mise en scène sensorielle pour exprimer ce désir le film est paradoxalement moins sensuel que d'autres films qui en montrent moins. On ne sent jamais la subjectivité dévorante du regard masculin, les amorces d'érotisme sont filmées de trop loin et/ou mal cadrées (Catherine déambulant en short en plein soleil, Kramer la lorgnant de loin sous sa douche) ou alors plus frontales mais sans la montée nécessaire à façonner un vrai trouble. C'est finalement les inserts sur la station laissant le spectateur deviner les ébats invisibles qui fonctionnent le mieux. De plus la narration s'égare en laissant Martin, le personnage le plus intéressant, de côté pendant toute la dernière partie même si un semblant d'explication là-dessus tente de faire renouer avec les rapports de force du début. Une petite déception donc alors que tout était là pour un spectacle moite et anxiogène, dommage.

 Sorti en bluray anglais chez Network et doté de sous-titres anglais

Extrait

 

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