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vendredi 3 décembre 2021

Le Cavalier électrique - The Electric Horseman, Sydney Pollack (1979)

Cinq fois champion du monde de rodéo, Norman « Sonny » Steele est aujourd'hui à la retraite. Il en est maintenant réduit à travailler pour les sponsors qui le sollicitent. Il devient ainsi l'emblème d'une marque de céréales. Il parade avec un costume bariolé orné d'ampoules lumineuses. Lors d'un show à Las Vegas, il doit monter le pur-sang Rising Star. Sonny s'aperçoit que le cheval a été drogué. Durant la soirée de gala, il s'en va avec le cheval pour le remettre en liberté. Bientôt la police va se mettre à sa recherche. Hallie Martin, une journaliste en quête de sensationnel parvient à retrouver Steele.

Cinquième collaboration entre Sydney Pollack et Robert Redford, Le Cavalier électrique semble un prolongement thématique contemporain de leur célèbre Jeremiah Johnson (1972). Sonny Steele (Robert Redford), c'est un peu comme si Jeremiah Johnson avait été rattrapé et corrompu par la civilisation qu'il fuyait. La scène d'ouverture décline ses hauts faits de champion de rodéo, avant que le déclin physique ne l'incite à devenir la tête de gondole de la marque de céréale d'une multinationale. Cet emploi lucratif mais peu exaltant l'éloigne de ses racines, devenant l'ombre de lui-même et traversant les festivités publicitaires et autres centres commerciaux auréolé de guirlandes électriques devant un public indifférent. Un évènement va pourtant lui ouvrir les yeux sur ce qu'il est devenu lorsqu'il devra chevaucher le pur-sang appartenant à sa compagnie lors de la célébration d'une fusion commerciale à Las Vegas. Tout comme lui, le cheval Rising Star voit ses capacités et la nature profonde de ce qu'il est souillé au service du profit. C'en est trop et Sonny s'enfuit avec l'animal, bientôt traqué par la police et une journaliste (Jane Fonda) opiniâtre, ambitieuse mais également fascinée.

Le film équilibre bien le désenchantement d'une certaine tradition du western crépusculaire et désenchanté façon Seul sont les indomptés de David Miller (1962) avec une idéologie libertaire plus rattachée aux années 70. Cette idéologie se confronte ainsi au capitalisme le plus déshumanisé en ligne de mire avec les années 80. L'imagerie, les codes et les valeurs de l'Ouest sont dévoyés dans la première partie du film où Sonny arpente telle une marionnette les lieux de consommation et de divertissement où il n'est plus, mais joue à être un cow-boy pour amuser les masses. Le pic de ce dévoiement est atteint dans la ville du péché et de la superficialité, Las Vegas. 

Avec la fuite de notre héros, l'horizon s'étend et révèle les grands espaces en estompant de plus en plus les éléments contemporains et faire par moment douter de se trouver dans un western classique. Cela s'exerce dans l'esthétique du film, dans les péripéties où Sonny fait la nique sur sa monture aux véhicules policiers qui le traque, mais aussi dans la mentalité calculatrice de la journaliste Hallie qui s'estompe au contact de Sonny. C'est un vrai road-movie drôle, haletant et sensible où les exploits de Sonny gagnent le cœur d'une population encore attachées aux valeurs authentique de l'Amérique, représentées par les autochtones rencontrés au hasard qui vont aider notre héros de manière désintéressée - l'envers cynique faisant de cette rébellion de Steele une autre récupération commerciale. 

Robert Redford est excellent en rustre sensible et autodestructeur, formant un beau couple avec Jane Fonda qu'il retrouve après La Poursuite impitoyable (1967). Si la romance fonctionne et est plutôt touchante, c'est paradoxalement son introduction qui casse un peu la dynamique de la dernière partie du film un peu plus laborieuse malheureusement. La magnifique scène de retour du pur-sang avec ses congénères transcende cependant ces défauts, exprimant avec une exaltation palpable la ferveur de ce sentiment de liberté.

Sorti en dvd zone 2 français chez Universal

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