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jeudi 23 février 2023

Quantum of Solace - Marc Foster (2008)


 Même s'il lutte pour ne pas faire de sa dernière mission une affaire personnelle, James Bond est décidé à traquer ceux qui ont forcé Vesper à le trahir. En interrogeant Mr White, 007 et M apprennent que l'organisation à laquelle il appartient est bien plus complexe et dangereuse que tout ce qu'ils avaient imaginé... Bond croise alors la route de la belle et pugnace Camille, qui cherche à se venger elle aussi. Elle le conduit sur la piste de Dominic Greene, un homme d'affaires impitoyable et un des piliers de la mystérieuse organisation.

Casino Royale (2006) s’était avéré une parfaite introduction du James Bond incarné par Daniel Craig, en plus de s’imposer comme un des meilleurs épisodes de la saga – rencontrant une faveur critique comme un volet de James Bond n’en avait pas obtenu depuis très longtemps. Il fallait donc battre le fer tant qu’il était chaud et la préparation du volet suivant est lancée alors que Casino Royale est encore en post-production. Malheureuse le projet se voit grippé par une grève des scénaristes à Hollywood sans que les producteurs daignent décaler significativement la date de sortie.

Le tournage débute donc sans script réellement finalisé, obligeant le réalisateur Marc Foster et Daniel Craig à réécrire certaines scènes et dialogues au jour le jour. Le résultat s’en ressent douloureusement avec un récit sans liant et assez poussif même si sur petit écran le film s’avère moins catastrophique qu’à l’époque de sa découverte en salle. Il s’agit vraiment d’une suite directe puisque le film démarre pied au plancher une heure après la fin de Casino Royale par une course poursuite échevelée alors que Bond vient de s’emparer de Mr White (Jesper Christensen), antagoniste sous-terrain du film précédent. Les problèmes tout d’abord formels surgissent alors déjà. L’influence visuelle et thématique des film Jason Bourne était significative dans Casino Royale, mais bien digérée par la mise en scène de Martin Campbell, réalisateur rompu au cinéma d’action. Ce n’est certainement pas le cas de Marc Foster qui tente un montage très cut à la Paul Greengrass mais sans la virtuosité ni l’effet hypnotique de ce dernier (il suffit de comparer la poursuite automobile de La Mort dans la peau (2004) et celle du Bond pour sentir le fossé), rendant la séquence brouillonne et tout juste compréhensible. Le problème demeure tout au long du film sans être aussi prononcé que lors de cette ouverture, et gâche quelques bonnes idées scénographique comme cette poursuite à pied puis combat suspendu à une corde.

Le thème est très intéressant avec ce questionnement environnemental et la collusion entre dictatures, puissances occidentales et organisations criminelles pour s’approprier les ressources des pays pauvres. Cela donne quelques moments de cynisme réjouissant où Bond semble la seule figure de droiture au-delà d’intérêts économiques qui prévalent. Notre héros s’avère également hanté par la trahison et la mort de Vesper, avançant comme un bulldozer déshumanisé décimant méchants à tour de bras pour évacuer sa peine. Ces auspices prometteurs sont pourtant gâchés par une progression très artificielle du récit qui ne crée aucune tension autour de ses enjeux géopolitiques (quelques inserts sur la population bolivienne subissant la sécheresse et rien de plus) ou intimes. Daniel Craig traîne ainsi sa mine renfrognée tout au long du film sans nuances, tandis que les dialogues sentencieux viennent régulièrement surligner ses sentiments à travers M (Judi Dench) faisant office de maman venant réprimander Bond tous les quart d’heure. 

Le méchant Dominic Greene (Mathieu Amalric), très intéressant sur le papier par sa pure nature d’homme d’affaire est gâché par une présence trop diffuse dans l’histoire malgré la présence inquiétante de l’acteur. Il n’est jamais intimidant, ni physiquement, ni psychologiquement, et le climax tente laborieusement de nous faire croire que Bond (que l’on a vu décimer sans mal les barbouzes depuis 1h30) est en difficulté pour en venir à bout. L’originalité est absente dans les scènes d’actions, soit par la répétitivité des idées trop exploitées dans la saga (une énième poursuite en hors-bord), par une finition technique indigne d’un James Bond (le découpage d’une poursuite en avion). Quant aux élément qui auraient pu sortir du lot, il ne sont pas exploités. Dominic Greene monopolise l’eau de Bolivie à travers des pipelines et des barrages sous-terrain qui auraient donnés de belles scènes de destructions (en plus d’offrir par l’image une résonnance humanitaire à moindre frais en montrant les Boliviens retrouver l’eau), il n’en sera rien. A la place une fusillade quelconque au sein d’un hôtel lambda situé dans le désert. C’est assez mince.

Daniel Craig ne démérite pas et reste charismatique (même si son arrogance du volet précédent nous manque) et Olga Kurylenko compose une James Bond girl plutôt intéressante malgré le peu de matière qui lui est donnée. Ce côté « pas fini » se ressent dans les transitions abruptes et la durée plutôt ramassée pour un Bond (1h46). La déception est donc grande après les promesses de Casino Royale, tant pour les fans que les fraîchement convertis (la tentative de continuité plus explicitement sérielle et feuilletonnante étant franchement ratée ici) à ce nouveau Bond. En plus d'être raté, le film (et la période Craig de manière générale) ne procure même pas les petits plaisirs futiles qui faisaient passer la pilule d'autres volets poussifs : la chanson de Jack White et Alicia Keys est une des pires de la saga, pas de bons mots avec Moneypenny ou Q, exotisme aux abonnés absents. Fort heureusement, l’épisode suivant sera préparé avec un plus grand soin pour fêter dignement les 50 ans de la saga. 

Sorti en bluray et dvd zone 2 français chez Sony

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