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dimanche 11 août 2013

Fedora - Billy Wilder (1978)


Fedora commence par la fin : on apprend la mort de Fedora en même temps que le héros, William Holden, un scénariste-producteur indépendant sur le déclin. Holden se souvient que, quelques semaines plus tôt, il avait tenté d'aller jusqu'à l'île où vivait recluse Fedora pour lui proposer de faire son comeback dans une nouvelle version d'Anna Karenine qu'il souhaitait produire. Mais, alors que Fedora, qu'il est arrivé à joindre difficilement, parce qu'elle vit entourée de gens étranges qui semblent l'isoler du reste du monde, voulait faire ce film, son entourage s'y est opposé et l'a empêchée de tourner.

En 1950 Billy Wilder réalisait avec Boulevard du Crépuscule un des films les plus cinglants sur Hollywood. Wilder alors en pleine gloire et au sommet de son art (succès d’Assurance sur la mort (1944) Oscar du meilleur film et réalisateur pour Le Poison (1945) et les années 50 seront plus triomphales encore) se penchait sur le destin des stars déchues du muet où une Gloria Swanson pratiquement dans son propre rôle y incarnait un fossile encore resté figé au temps de sa gloire. Le jeu théâtral et expressionniste d’une Swanson en représentation permanente en faisait un monstre plus à sa place dans le Hollywood moderne, ce que viendrait lui rappeler un William Holden en jeune loup aux dents longues et que chercherait à lui dissimuler les collaborateurs d’antan en caméo renforçant la vérité du récit (Cecil B. DeMille, Hedda Hopper, Buster Keaton…) ou un  Erich Von Stroheim en majordome revivant leur conflit de Queen Kelly (1929). Avec Fedora, Billy Wilder réalise le film jumeau de Sunset Boulevard en posant un même regard cinglant sur les rescapés d’un Hollywood disparu, bercé des lueurs du temps de leur splendeur.

Quelque chose a pourtant changé depuis le film de 1950, Wilder s’identifie désormais à ces fossiles d’un autre temps. Après un ultime triomphe avec La Garçonnière (1960), le réalisateur aura en effet passé deux décennies compliquées le plaçant progressivement à la marge. Lui qui sut si bien inscrire ses œuvres dans les goûts et attentes du public se trouvait désormais trop en avance sur son temps (l’audacieuse comédie adultère Embrasse-moi idiot (1964) ou la farce politique Un, deux, trois (1961)), en décalage (la romance adulte de Avanti (1972) et quand il pense réaliser son grand œuvre avec La Vie Privée de Sherlock Holmes (1970), le montage originel de 4 heures se voit mutilé par le studio, renforçant son amertume. Wilder verra donc le portes des studios se fermer lorsqu’il cherchera un financement pour Fedora et à l’image de son héros William Holden courant le monde pour trouver les fonds de sa prochaine production, cet avant-dernier film sera une coproduction franco-allemande.

Wilder placera beaucoup de son aigreur dans les dialogues de William Holden, fustigeant les « barbus » régnant désormais à Hollywood, ne jurant que par la jeunesse et réalisant leur film sans script. Holden est donc est producteur venu chercher le salut dans ce passé glorieux en cherchant à convaincre la star recluse Fedora (Marthe Keller) de retrouver le chemin des plateaux dans son nouveau projet, une adaptation moderne de Anna Karenine. Il ira pourtant de surprise en surprise lorsqu’il retrouvera l’icône dont beauté inaltérée est contrebalancée par un esprit tourmentée sévèrement réfréné par un entourage castrateur.

L’inspiration principale de Fedora est bien évidemment  Greta Garbo, star secrète et mystérieuse, aux prétendant(e)s innombrables prêts à se damner pur elle et qui entretint sa légende en se retirant au faîte de sa gloire pour ne plus reparaître publiquement. Wilder dans sa première partie montre le mythe s’effriter, la beauté physique est une illusion du passé artificiellement entretenue, mais l’égo démesuré qui en résulte souffre de ne plus être le centre de l’attention et des regards, créant des êtres monstrueux et inaptes une vie normale. 

Marthe Keller est un masque de cire désarticulé et dissimulé derrière chapeau et lunette ne la rendant que plus insaisissable est formidable (et avec le recul annonce dans son allure d’autres grands incompris reclus tel un Michael Jackson) et offre un contraste saisissant avec la véritable déesse aperçue dans les flashbacks mais déjà là aussi prisonnière de son mythe.

Fedora ne pourra retrouver son lustre que lors de son enterrement où elle pourra une ultime fois se mettre en scène et susciter l’admiration de son public. La deuxième partie du film écornera pourtant une nouvelle fois le souvenir par une révélation donnant une portée plus vaste encore. L’âge d’or Hollywoodien pensait avoir créé des Dieux modernes avec ses stars plus grandes que natures mais il a pour le pire engendré des monstres prêts à sacrifier leurs proches pour perpétuer une grandeur disparue. 

Wilder s’avère moins cinglant et corrosif que dans Sunset Boulevard, la lucidité se disputant au regret de ce qui n’est plus et dont l’émerveillement avait finalement sa part d’ombre. Wilder observait sa Norma Desmond avec la fascination d’un anthropologue, à l’inverse il regarde Fedora avec compassion car il partage son sort de fossile. Le film testament de Wilder dans lequel on préférera voir sa vraie dernière œuvre plutôt que le piteux Buddy Buddy (1981). 


Encore inédit en dvd hormis une onéreuse édition espagnole mais le film ressort en salle le 21 août dans une copie magnifique et devrait certainement être enfin édité par Carlotta dans la foulée.


2 commentaires:

  1. Bonjour.
    I like your choice of films!
    Good screen shots too!
    I wish I understood more though!
    Salut

    Nick

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  2. Thanks Nick ! You can try google traduct for more understanding ;-) I saw your blog I like it too !

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