Tom Curtis (Richard Attenborough) est ouvrier dans une usine du nord
de l’Angleterre père de deux enfants, avec un troisième en route.
Quand une grève éclate, il décide de ne pas suivre le mouvement et de
continuer à travailler. Les pressions se font de plus en plus fortes, et
sa famille est mise en danger, mais au lieu de céder, Tom persévère.
Une fois la grève terminée, il doit faire face à l’isolement et au
silence imposé par ses collègues. Les média attirent alors l’attention
sur la situation de Tom. Mais cela ne fait qu’empirer les choses.
The Angry Silence
est la première production Beaver film, la société fondée par Richard
Attenborough et Bryan Forbes d'où sortiront nombres de grandes réussites
anglaises des années 60 réalisée par tous deux : Le vent garde son secret (1961), La Chambre indiscrète (1962), Le Rideau de brume (1964), Oh! What a Lovely War (1969)... The Angry Silence s'avère une sorte de pendant sérieux et dramatique de I’m all right Jack
(1959) des frères Boulting, virulente satire qui dénonçait les petit
arrangements et la corruption du monde de l'entreprise et des
syndicats. C'est également le propos du film de Guy Green qui transcende
toute idéologie pour un constat virulent.
Le suivisme et un
certain obscurantisme militant se révèle ainsi dans une usine du nord de
l'Angleterre. Un agent extérieur (Robert Burke) aux motifs nébuleux
s'immisce ainsi auprès du délégué syndical (Bernard Lee) pour semer la
discorde au sein de l'entreprise. Guy Green présente au départ l'usine
comme un espace convivial et de camaraderie, du moins tant que l'on en
reste du point de vue des ouvriers. Les angoisses économique semblent
pouvoir se résoudre par le travail (Tom Curtis (Richard Attenborough) et
l'annonce de la troisième grossesse de sa femme), les amours plus ou
moins sérieuses se nouent avec les jolies ouvrières qu'on tente
maladroitement de séduire pour Joe Wallace (Michael Craig également
coscénariste du film) et côté loisir un tour au pub après une journée de
labeur ou football le weekend semblent constituer une évasion
satisfaisante pour ces gens simples.
Les quelques désaccords entre le
délégué syndical et la direction (le manque de protection sur les
machines sont bien là, mais leur résolution semblent plus reposer sur un
jeu de pouvoir que sur un vrai souci du bien collectif. Ainsi une grève
est décidée sans que l'on ait ressenti une réelle oppression patronale
et surtout sans un début de négociation qui aurait éventuellement
avortée. Richard Attenborough souhaitait dénoncer le rôle discutable que
pouvait exercer des agents extérieur d'extrême gauche pour exacerber
les conflits sociaux, ce que semble être le personnage manipulateur de
Robert Burke qui fait grimper la tension sans que la branche syndicale
officielle ait pu intervenir.
La tradition amène donc le
lancement d'une grève machinalement votée par les ouvriers sans qu'ils
n'en comprennent réellement le motif. Tous sauf Tom Curtis, autant
motivé par sa situation familiale précaire qu'une conscience
individuelle dont sont dénués ses collègues. Dès lors la cause n'a plus
d'importance, seule compte la soumission de celui qui a osé sortir du
rang. La violence se fait furtive, qu'elle soit concrète avec une réelle
intimidation physique, psychologique et sociale avec l'ignorance et la
mise au ban de Curtis et au final vraiment malveillante quand les actes
nocifs sortent du cadre d l'usine et touche la famille du héros. La mise
en scène de Guy Green brille à traduire cet isolement du personnage.
Son individualité face à la meute est de plus en plus marquée, notamment
lorsque sa silhouette traverse stoïquement les rangs de grévistes pour
se rendre à l'usine déserte. Lorsque le travail reprendra, les
compositions le mettent en avant plan dans les couloirs parcourus de
machines. Lors d'une scène marquante le réfectoire lieu de cette
camaraderie initiale prend des allures de cirque grotesque et hypocrite
par un jeu sur les plongées, les gros plans monstrueux sur les visages
ouvriers décérébrés.
Cette vision sera celle qui provoquera un hurlement
de rage de Curtis envers ses anciens amis lui apparaissant sous leur
vrai jour. Le propos sera encore plus virulent lorsque la situation
prendra de l'ampleur pour attirer les médias, les ouvriers interrogés
étant incapables de donner de motifs concrets à l'ostracisation de leur
collègue si ce n'est d'avoir exprimé une opinion individuelle. Richard
Attenborough livre une très grande prestation, sensible et puissante
pour incarner cet homme simple dépassé par ses choix. La droiture et
l'intensité de la conviction passe par ce jeu de plus en plus fiévreux
et habité, le reste du casting n'étant pas en reste notamment Michael
Craig en mouton culpabilisant, Bernard Lee en syndicaliste détestable et
Geoffrey Keen en superviseur résistant à la pression - Pier Angeli très touchante également et on croise un Oliver Reed débutant. Le film fut
accusé d'être antigrève mais finalement les patrons sont tout autant
fustigés, s'accommodant de cette loi du silence et livrant en pâture
Curtis pour ne pas perturber leurs affaires en cours. Richard
Attenborough membre du parti travailliste n'a donc pas un propos
réellement politique mais dénonce la meute instrumentalisée pour
célébrer l'individu dont l'ultime rempart reposera plus sur son foyer
que l'idéologie.
Néanmoins le propos du film fut parfois mal
perçu, manquant d'être interdit au Pays de Galles par le syndicat des
mineurs mais Attenborough se rendra sur place pour leur projeter le film
afin d'en faire comprendre le vrai sens. Un vrai grand film dont propos
audacieux (le final est particulièrement sombre et rageur) lui vaudra
une nomination à l'Oscar du meilleur scénario.
Sorti en bluray et dvd zone 2 anglais chez StudioCanal, dot de sous-titres anglais
Extrait
merci pour cette chronique qui prouve que le cinéma anglais reste toujours à découvrir... Dommage qu'il soit si peu distribué en France,malgré les efforts de certains éditeurs...
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