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lundi 2 septembre 2019

Moonraker - Lewis Gilbert (1979)


Les gouvernements américain et britannique font face à un vol de navette spatiale. L'agent 007 et Holly Goodhead, charmante espionne américaine, tentent de déjouer les noirs desseins du mégalomaniaque Hugo Drax, fasciné par la conquête spatiale. Une course contre la montre s’engage pour éviter rien de moins que l’extinction de l’espèce humaine...

Le générique de fin de L’Espion qui m’aimait (1977) annonçait le retour de James Bond dans Rien que pour vos yeux. Le succès immense de L’Espion qui m’aimait (qui relance la Bondmania et installe définitivement Roger Moore dans le rôle) et l’engouement du public pour la science-fiction avec les triomphe de Star Wars (1977) et Rencontre du troisième type (1977) en décideront autrement. Cubby Broccoli voit donc grand pour l’opus suivant et va remanier considérablement la trame du roman original de Ian Fleming, la fusée destinée à détruire Londres devenant un génocide planétaire mâtinée de relecture de l’Arche de Noé. Pour des raisons fiscales l’essentiel du tournage est délocalisé en France dont la majorité des studios sont monopolisés, e qui n’empêchera pas un budget pharaonique supérieur à celui de l’ensemble des six premiers Bond réunis.

Cet investissement comporte néanmoins une faille, puisque pour être remboursé il va nécessiter un opus bien plus orienté grand public, dans le mauvais sens du terme. Tout démarre plutôt bien avec un pré-générique d’anthologie où Bond défie les airs sans parachute à travers une cascade mémorable (même si le gag final de la scène annonce les dérives à venir). La première heure est prenante par ses confrontations larvées (la première entrevue glaciale entre Bond et Hugo Drax (Michael Lonsdale), le mystère distillée par l’enquête de Bond et l’inventivité des environnements tel ce château français implanté en Californie. Alors que L’Espion qui m’aimait avait su trouver un certain équilibre en action premier degré et une certaine dérision collant à la personnalité de Roger Moore, Moonraker va progressivement dérailler. Le retour de l’homme de main Jaws (Richard Kiel) se fait en dépit du bon sens, la popularité du personnage en faisant un grand dadais maladroit plutôt qu’un impitoyable tueur – ce côté cartoon étant accentué par la rencontre de son grand amour. 

Cette schizophrénie se traduit par des élans de noirceur et de suspense typique des Bond classique – Bond qui passe un mauvais quart d’heure dans une centrifugeuse, où la tragique exécution de Corinne Clery sur une superbe composition de John Barry – et le grotesque de certaines situations, le soupçon de mauvais goût qui vient casser toute la mise en place. La gondole truffée de gadgets de Bond et les réactions de la population (redite ratée du même effet avec la Lotus amphibie de L’Espion qui m’aimait) prêtent à rire, et tout le film est ainsi avec une amorce dramatique et/ou formelle intéressante dont la chute parodique brise tous les efforts. Ainsi la composition de plan, la direction artistique et la photo splendide éblouissent lors d’un combat dans la tour d’une horloge, mais la mort ridicule de l’antagoniste annihile l’impact de la séquence.

Ce problème de ton est d’autant plus regrettable que les équipes techniques ont fournis des efforts exceptionnel sur cet opus. Lewis Gilbert même parasité par l’orientation légère retrouve l’ampleur et l’élégant sens du cadre propre à magnifier les décors naturels traversés (notamment les séquences au Brésil) et capturer le gigantisme des créations folle de Ken Adam au design. La salle de contrôle nichée au sein d’un temple Inca égale ainsi en démesure le volcan/base secrète de On ne vit que deux fois (1967) par son mélange improbable de rococo ancestral et de technologie. Le plus grand défi restait cependant les séquences spatiales, avec l’argument vendeur des affiches Where all the other Bonds ends this one begins ! Et effectivement après l’ensemble poussif qui a précédé, la dernière partie relève largement la tête. 

Le décollage des fusées de Drax, leur arrivée et la découverte de la station spatiale de ce dernier offre un vrai effet de sidération et de monumental porté par le score grandiose de John Barry (qui semble s’être trompé de film pour lâcher pareille composition). Les maquettes de Derek Meddings et les effets optiques de Robin Brown et John Richardson offrent un résultat impressionnant en ces heures pré effets numériques et vaudront une nomination aux Oscars pour le film. Les écarts kitsch ne sont certes jamais loin (les combats spatiaux au laser) mais l’approche épique fait tout de même fonctionner l’ensemble. 

Roger Moore traverse le film de manière assez anonyme sans le flegme distancié de l’opus précédent, Michael Lonsdale est plutôt convaincant par sa présence torturée et Lois Chiles (gratifiée d’un nom dans la tradition des jeux de mots salaces des héroïnes bondiennes avec ce savoureux Holly Goodhead) ne parvient pas à faire oublier Barbara Bach en égal féminin de Bond. Le film sera un triomphe au box-office, le plus gros de la saga jusqu’à la sortie de Goldeneye (1995), mais reste désormais décrié pour ses orientations douteuses.

Sorti en bluray et dvd zone 2 chez Sony 

 

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