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lundi 16 mars 2020

Séance - Kôrei, Kiyoshi Kurosawa (2000)


Après l'enlèvement d'une petite fille, la police qui est sans recours, fait appel à Junko pour son don de médium. Elle et son mari Koji forment un couple sans histoire. Ce qu'ils ne savent pas encore, c'est que la petite fille enlevée, à la suite d'un concours de circonstances, est enfermée dans une malle dans leur propre garage.

Séance est une pour Kiyoshi Kurosawa une commande Kansai Telecasting Corporation qui lui propose d’adapter le roman de Mark McShane Seance on a Wet Afternoon. Le livre avait déjà bénéficié d’une excellente adaptation signée Bryan Forbes avec Le Rideau de brume (1964). Kurosawa s’approprie ce matériau originel en y incluant les codes esthétiques de la J-horror, rendant ainsi explicite une dimension fantastique absente du roman et donc du film de Bryan Forbes. Le récit original voyait un couple terne rechercher la lumière par les pires moyens en s’inventant des dons surnaturels qu’ils mettraient en œuvre pour résoudre un enlèvement qu’ils avaient eux-mêmes orchestrés. Kurosawa change la donne en dépeignant le couple ordinaire que forment Junko (Jun Fubuki) et Koji (Kōji Yakusho) à l’inverse constamment rattrapé par les réelles facultés de médium de Junko.

Dès les premières minutes du film, Junko est sollicitée par le chercheur en psychologie Hayasaka (Tsuyoshi Kusanagi) pour montrer ces aptitudes, quand elle n’est pas consultée à son domicile. En contrepoint l’on suit le quotidien tout ce qu’il y a d’ordinaire qu’elle mène avec son époux. Ce « don » apparait pourtant comme une malédiction dans la quête d’une vie normale. Les apparitions spectrales surgissent durant sa tentative d’officier en tant que serveuse, et plus tard ce sera un fatal destin qui la ramènera à ses doutes avec une petite fille enlevée placée sur sa route suite un concours de circonstance. Junko et Koji subissent les évènements (quand dans l’histoire originelle ils cherchaient à les provoquer) et ne savent comment y répondre si ce n’est maladroitement puis tragiquement. Pour revenir au film de Bryan Forbes, le couple toxique commettait l’irréparable car dans sa folie, il était convaincu du bien-fondé de ses actes funestes. Kurosawa place des personnages quelconques mais aux vraies capacités extrasensorielles dans un contexte extraordinaire, mais c’est leur normalité qui va les faire douter et craindre d’être soupçonnés. 

La dichotomie entre ce qu’ils aspirent être et ce qu’ils sont fait le lien entre les différentes versions, les protagonistes subissant et/ou faisant subir l’irréparable pour maintenir leur aspiration d’ordinaire ou de sensationnel. L’un des reproches récurrents de Junko envers Koji s’exprime d’ailleurs par la phrase Tu m’avais promis une belle vie… C’est par ce portrait de couple que naît l’émotion du récit, mais Kurosawa en maître de l’épouvante n’oublie pas d’orchestrer quelques séquences glaçantes. Il développe clairement le dispositif brillera dans le terrifiant Kaïro (2001). 

Le fantôme apparait ainsi comme une manifestation de la culpabilité des personnages, les observant à distance ou surgissant progressivement en arrière-plan dans des compositions les faisant comme émaner de leur psyché (le fait que Koji sans don extralucide finisse par voir aussi des fantômes appuie cette thèse). La dilatation du temps et la mue subite d l’atmosphère soudain étrange et irréelle annonce également Kaïro même si c’est bien le drame humain qui domine ici, où les héros sont autant victimes que coupables de ce qui leurs arrivent notamment dans le dernier acte. 

Sorti en dvd zone 2 français chez Condor

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