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samedi 18 novembre 2023

Il était une fois en Chine 5 : Dr Wong et les Pirates - Wong Fei Hung chi neung: Lung shing chim ang, Tsui Hark (1994)

Wong Fei-hung aux prises avec Cheung, un redoutable pirate qui terrorise les habitants d'une région côtière depuis plus de 100 ans...

Dr Wong et les Pirates marque le retour à la barre de Tsui Hark sur la saga Il était une fois en Chine. Il avait délégué sa place de réalisateur sur le précédent volet, La Danse du dragon (1993). Ce film s’avérait un épisode de transition, un entre-deux introduisant Chiu Man Cheuk comme nouvel interprète de Wong Fei-hung. Cet opus hésitait entre l’approfondissement des thèmes politiques de la saga (cette fois n’intégrant pas seulement un contexte historique, mais un réel évènement avec la révolte des boxers), et le questionnement entre un renouvellement ou une redite complexe intégrant la personnalité différente du nouveau casting. 

Les préoccupations de Tsui Hark sont tout autres quand il se lance dans ce cinquième film. La saga Il était une fois en Chine est devenue une franchise lucrative qui s’apprête à être déclinée en parallèle sous forme de série télévisée (de 20 épisodes diffusés durant la saison 1995-1996) où l’on va retrouver Chiu Man Cheuk en Wong Fei Hung, ainsi que la même troupe d’acteur (Max Mok, Hung Yan-yan, Kent Cheng) jouant ses disciples. Il ne s’agit donc plus de composer une fresque ambitieuse à l’image des trois premiers films, mais de pencher vers une veine plus feuilletonnesque et serial où le spectateur peut retrouver le temps d’une aventure unitaire des protagonistes qu’il connait déjà bien.

On peut regretter ce virage, mais il a le mérite d’éviter au film le statut bâtard (mais fascinant) de La Danse du Lion. Le début de l’histoire instaure malgré tout une continuité avec un Wong Fei Hung et ses compagnons essayant de rentrer à Canton après les tumultes de la fin de La Danse du Lion. L’agitation générale a créée des zones de non-droit dans le pays et Fei Hung va traverser une région terrorisée par de redoutables pirates face auxquels il va naturellement s’interposer. Les occidentaux sont absents du film et avec eux tous les questionnements et ambiguïtés sur les rapports avec la Chine, remplacé par un triangle amoureux confrontant presque les incarnations de Wong Fei Hung. C’est le retour de Tante Yee (Rosamund Kwan) pour toujours dans l’esprit du public bien-aimée du Fei Hung de Jet Li, opposée à sa sœur Tante May (Jean Wang) love interest introduit en « remplacement » dans le volet précédent. 

Le personnage de Tante May est fortement mis en retrait tandis que l’alchimie si magique entre Rosamund Kwan et Jet Li ne prend jamais vraiment ici avec Chiu Man Cheuk, trop jeune et explicitement séduisant pour égaler la maladresse touchante de Jet Li malgré de sympathiques moments de marivaudages. Il y a vraiment un sentiment de « confort » et d’habitude que l’on cherche à réinstaurer, notamment dans les apartés comiques (globalement hilarant, Max Mok en tête) des disciples, certes récurrents dans la saga mais prenant ici plus de place faute d’avoir un Wong Fei Hung plus profond et habité.

Il y a malgré tout des éléments thématiques intéressant en filigrane, telle la question de devoir, de représentation de la loi devant résister à la terreur et corruption à travers ce groupe de policier se maintenant dans le village vaille que vaille. C’est entre autres leur courage et détresse qui incite Wong Fei Hung à intervenir, tandis que le chaos stimule au contraire l’instinct de spéculation des plus cupides avec ce marchand de riz défendant farouchement sa marchandise tout en laissant la population affamée. Dommage que tout cela ne soit pas davantage creusé pour privilégier le pur divertissement. De ce côté-là nous sommes servit avec des antagonistes peu approfondis mais charismatiques car fonctionnant sur une pure logique de bd. Ying (Elaine Lui), redoutable sous-fifre des pirates est auréolé d’un look mémorable et compense ses faibles aptitudes martiales par un vice de tous les instants avec sa multitude de pièges et bottes secrètes. 

L’affrontement dans la cave au trésor des pirates est l’occasion d’un numéro d’équilibriste et voltige virtuose entre caisses, vases et reliques où Wong Fei Hung défie un pirate centenaire. Chiu Man Cheuk y déploie toute sa maestria, tout comme dans le grand assaut final multipliant les situations et environnements périlleux, en particulier l’espace d’un arsenal explosif qui permet un spectaculaire déferlement de pyrotechnie. Une cassure majeure a d’ailleurs lieu dans cet épisode qui voit Wong Fei Hung et ses compagnons utiliser sans complexe les armes à feu, ce que se refusait totalement l’incarnation de Jet Li et qui était en parfaite adéquation thématique avec le propos sur l’obsolescence des arts martiaux face à la technologie des « diables d’étrangers ». Il n’y a pas autant d’état d’âmes ici et si l’on regrette cette contradiction, visuellement cela confère au film des airs de westerns survolté, par exemple lors de l’infiltration de l’antre des pirates.

Si la veine épique des précédents films manque, le virage serial est néanmoins diablement efficace et spectaculaire, faisant de ce Dr Wong et les Pirates une merveille de divertissement. On n’en dira pas autant de l’infâme sixième film à venir, Dr Wong en Amérique (1995) qui marquera pourtant le retour de Jet Li.

Sorti en dvd zone 2 français chez Metropolitan HK Vidéo

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