L'oracle de Tirésias a annoncé que dans le lointain Occident, une menace planait sur Thèbes. En compagnie de son fils Hyllos et du roi de Thèbes Androclès, Hercule entreprend une expédition afin de déterminer la nature de ce mal et le détourner de sa patrie. Il découvre ainsi l'île Atlantide protégée par le dieu aux multiples métamorphoses, Protée. Là règne la perfide Antinéa, qui transforme les hommes en lépreux... ou en surhommes mutants qu'elle rassemble en une puissante armée destinée à subjuguer l'univers...
Tourné la même année que Hercule contre les vampires (avec un budget plus élevé semble t il) ce Hercule à la conquête de l'Atlantide s'avère le plus fou de la serie et un des plus réussis. Le film est mis en scène par Vittorio Cottafavi qui avait offert jusqu'ici l'épisode le plus flamboyant avec La Vengeance d'Hercule. A l'origine c'est un réalisateur plutôt intellectuel ayant commencé dans le néoréalisme puis qui se vit pour cause de blacklistage critique contraint d'oeuvrer dans dans tous les genres dont plusieurs péplums très réussis comme hormis les Hercule l'excellent Messaline dont on reparlera bientôt ici. On est loin du statut d'honorable artisan des autres réalisateurs de la série et ce parcours lui permet d'inoculer pas mal d'éléments atypique, une certaines distance et des directions audacieuses et inattendues.
Alors que Mario Bava n'avait su que faire de ce gros balourd de Reg Park, Cottafavi le rend plus humain en en faisant un colosse nonchalant et bon vivant à la Obelix (une bagarre se déroule autour de lui au début du film et il continue à manger tranquillement) particulièrement inactif dans la première partie qu'il passe à dormir tranquillement. On retrouve de cette drôlerie et esprit critique lors de la réunion où les rois grecs doivent décider de ce qu'ils doivent faire face à la catastrophe à venir, chacun se défilant sans complexe.
Le film est un kaléidoscope assez incroyable dans les genres et les thèmes qu'ils proposent. Le récit mythologique (Hercule, le mythe de l'atlantide) et littéraire (la reprise du personnage d'Antinea de l'Atlantide de Pierre Benoit), se croisent ainsi avec la science fiction ( la pierre d'Uranus peut être d'origine extraterrestre) avec un soupçon de fantasy à la Lovecraft ou Abraham Merrit (adoration de Dieux oubliés, sacrifices humains, peuples mythique et disparu). Quand aux thèmes, on passe de la réflexion sur la menace nucléaire (le contact avec la pierre d'Uranus arme suprême des atlantes causant mutilations en tout genre) à la parabole sur le nazisme avec l'armée de surhommes de Antinea aux physiques "aryen" et uniforme destiné à conquérir le monde tandis que les malformés sont parqués dans des camps. Un sacré mélange.
Visuellement c'est également très réussi hormis quelques grosse fautes de gouts comme le Dieu à métamorphose Protée, lézard en caoutchouc assez pitoyable. Les décors inventifs et grandiose du royaume de l'Atlantide sont mis en valeur par une réalisation inspirée de Cottafavi où là aussi s'offre un détonant mélange des genres notamment entre le look antique des héros jurant avec l'aspect futuriste des super soldats atlante. Le final avec la destruction de l'Atlantide s'avère très impressionnant (avec stock shot d'éruptions filmées par Haroun Tazieff) et spectaculaire. Contrairement à Hercule contre les vampires les rôle secondaires sont également plus marquant et attachant comme le fils d'Hercule, Ettore Manni en Androclès et surtout une Fay Spain fabuleuse de cruauté en impitoyable en Reine de l'Atlantide.
La saga officielle devait malheureusement en rester là en dépit de la production de nombreux ersatz médiocre (dont un particulièrement mauvais avec le couple Jayne Mansfield/Mickey Hargitay Les Amours d'Hercule) sans même parler des Maciste très mauvais dans l'ensemble. Cottafavi allait connaître quelques déconvenues avec l'échec de son très réputé Les Cent Cavaliers (à quand un dvd ?) tandis que le péplum italien allait lentement décliner (si ce n'est sous son versant érotique) et disparaître avec l'émergence du western spaghetti. Reste une saga inventive et brillante de cinq films très réussis voire même brillant pour les opus de Cottafavi.
Sorti en dvd zone 2 chez Studio Canal et aux Editions Atlas, l'édition est la même chez les deux avec de très intéressant bonus où interviennent Tavernier ou encore Jean Pierre-Dionnet pour signaler la singularité et l'inventivité du film ainsi que la personnalité de Vittorio cottafavi.
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mardi 31 mai 2011
lundi 30 mai 2011
Peking Opera Blues - Do ma daan, Tsui Hark (1986)
1913, en pleine révolution démocratique chinoise. Le Général Tsao fait son retour à Pékin accompagné de sa fille Tsao Wan (Brigitte Lin), fraîchement rentrée de ses études à l’étranger. Celle-ci se mêle à un groupe révolutionnaire pour contrer les plans de son père. Au cours de sa mission, elle recevra l’aide inattendue de Sheung Hung (Cherie Chung) et Pat Neil (Sally Yeh), deux femmes elles aussi aux prises avec une hiérarchie masculine...
Lorsqu’il crée sa société de production FilmWorkshop en 1984, l’ambition de Tsui Hark est de présenter des films populaires et ambitieux, à travers lesquels il pourrait exprimer pleinement toutes les sensibilités qui le caractérisent. Jusqu’ici son côté expérimental (Zu les guerriers de la montagne magique) ou vindicatif (L’Enfer des armes) avait à chaque fois pris le dessus, provoquant l’échec commercial sans appel de chacun de ses films. Avec la FilmWorkshop, Tsui Hark souhaite désormais pratiquer un cinéma accessible tout en maintenant sa personnalité. Le premier film du studio Shanghai Blues, sera un beau témoignage de ces nouvelles dispositions. Cette charmante comédie romantique voyait Tsui Hark mêler son amour pour la screwball comedy américaine et sa nostalgie pour le Hong Kong d’antan. Peking Opera Blues, premier grand film de cette nouvelle ère va définitivement lancer la FilmWokshop.
Tsui Hark avait déjà mis en scène des personnages féminins marquants comme la jeune fille rebelle de L’Enfer des Armes et la reine des glaces de Zu, cette dernière étant déjà jouée par l’actrice Ling Ching Hsia, véritable symbole de l’androgynie chez le réalisateur puisqu’elle sera plus tard l’inoubliable Asia l’Invincible, guerrier hermaphrodite de Swordsman 2.
Les rôles précités s’inscrivaient cependant dans des films typiquement masculins alors que Peking Opera Blues voit Tsui Hark laisser enfin éclater ses penchants féministes. Il ne sera par conséquent pas étonnant de voir les principaux thèmes et genres abordés s’incarner à travers les personnalités et le cheminement des trois héroïnes.
Ling Ching Hsia, déchirée entre ses convictions politiques et son amour pour son père (au détour d'une très belle scène entre les deux lorsqu'elle se démasque) trouve là son plus beau rôle. Femme d’action à l’allure – une nouvelle fois - garçonne et androgyne, elle délivre un mélange de force et de fragilité admirable. Tsui Hark lui réservera pour la seule scène où elle se montre vraiment féminine un des instants les plus charmants et légers du film, lorsque les trois héroïnes détendues se prélassent au coin du feu. A travers son personnage, Tsui Hark aborde certains sujets politiques qui seront au centre des thématiques des premiers volets de la saga Il était une fois en Chine. L’arrivée des occidentaux en Chine, les bienfaits (l’émancipation et l’éducation des jeunes Chinoises parties étudier en Europe) et les dérives (l'arrivée de la corruption, la disparition des valeurs de la Chine ancestrale) qui en découlent sont en effet une des préoccupations principales du réalisateur, moderniste et conservateur à la fois.
Le personnage de Sally Yeh (déjà présente dans le précédent Shanghai Blues et renforçant l’aspect diptyque des deux œuvres) symbolise ouvertement le féminisme du réalisateur. Celle-ci est frustrée dans ses ambitions d’actrice, les femmes étant encore interdites de scène à cette époque. Bien que tourné en dérision et plutôt attachant, son directeur de troupe de père représente pourtant toute cette Chine arriérée que Tsui Hark fustige par ses positions progressistes.
La troisième héroïne Cherie Lung compose quant à elle une sorte de petite sœur à protéger, très attachante, coquine et vénale à la fois. Dans un registre plus comique que les deux autres, ses multiples gaffes et actes intéressés font le lien entre les différents fils narratifs introduisant ses deux partenaires. Ses trois archétypes féminins installés, Tsui Hark va pouvoir laisser éclater un plaisir de raconter parmi les plus jubilatoires de sa filmographie.
Après le très beau Shanghai Blues où il prenait ses marques sur une orientation plus grand public, Tsui Hark montre enfin dans Peking Opera Blues tous les éléments qui feront la domination de la FilmWokshop sur le cinéma de Hong Kong pour les dix ans à venir. La reconstitution historique tout d’abord, qui fera plus tard les délices des meilleurs films du studio, est ici de toute beauté. La fascination et la nostalgie de Tsui Hark pour un certain type de cinéma à l'ancienne s’expriment pleinement ici. Photo diaphane aux teintes bleutées, décors studio somptueux (la magnifique séquence sous la neige entre les trois héroïnes) et ambiance rétro, tout est fait pour caresser l’œil du spectateur par une esthétique chatoyante. Toute la "dream team" des bijous à venir de la FilmWorkshop est d’ailleurs ici réunie pour la première fois : James Wong à la musique, Ching Siu Tung qu’on ne présente plus à la chorégraphie, David Wu au montage et Poon Hang-Sang (à l’œuvre dans Histoire de Fantômes chinois entre autre…) à la photo.
Le tout se joue dans une intrigue trépidante et galvanisante où Tsui Hark convoque tous les genres. Typique de l’aspect "fourre-tout" du cinéma hongkongais, se croisent donc film historique, d’espionnage et grosse comédie dans le plus pur style serial, où rebondissements et coups de théâtres s’enchaînent sans répit. Le rythme haletant se fait encore tolérable en comparaison d’autres films plus frénétiques du réalisateur (tendance typique de la FilmWorkshop), en réalisant une de ses œuvres les plus accessibles.
Le cadre du monde du spectacle s’avère particulièrement pertinent sur le fond comme dans la forme. Le personnage de Ling Ching Hsia joue difficilement son rôle d’agent double, fille aimante mais forcée de trahir son père dont elle ne partage pas les opinions politiques. Ce dernier ne lui en tiendra d’ailleurs pas rigueur lorsqu’il le découvrira, faisant passer avant tout sa fibre paternelle dans une scène d’adieu déchirante. Sally Yeh au contraire n’arrive pas à jouer son rôle de jeune fille chinoise modèle et introvertie, pour s’acharner à être elle-même par tous les moyens, une artiste de talent. Cherie Lung navigue elle de l’une à l’autre, cherchant sa personnalité, son « rôle » à tenir : amie sincère ou petite fouine vénale courant après son butin.
Il est donc normal que deux des meilleurs moments du film se jouent sur une scène. Une scène comique tout d’abord, dans laquelle Sally Yeh profite de la confusion pour enfiler le costume et enfin s’exprimer sur les planches, suscitant l’admiration de tous, avant qu’une Cherie Lung moins douée donne un tour plus ouvertement comique à cet instant. Vient ensuite la conclusion splendide où Tsui Hark livre sa réinterprétation de To be or not to be. Pourchassé par la police militaire, tous nos héros se réfugient dans le théâtre. Les hommes en uniformes assistent au spectacle tout en inspectant les lieux, tandis que les héros, déguisés et sur scène, s'éclipsent tour à tour des lieux au nez et la barbe de leurs ennemis. Cette ultime représentation se conclura par un moment épique : une course poursuite haletante sur les toits, anthologique scène d’action dont Tsui Hark a le secret.
Parfait condensé du cerveau en ébullition de Tsui Hark, Peking Opera Blues sera un immense succès au box office de Hong Kong, mettant pour de bon sur les rails la FilmWorkshop, mais ceci est une autre histoire… De fantômes chinois...
Toujours inédit en dvd zone 2 français, se pencher donc sur la très belle édition hongkongaise parue chez Fortune Star et dotée de sous titres anglais.
dimanche 29 mai 2011
Je t'aime, je t'aime - Alain Resnais (1968)
Suite à l'échec de son suicide, Claude Ridder se voit proposer de participer à une expérience de voyage dans le temps qui n'a été testée jusqu'à présent que sur des souris. Mais l'expérience tourne mal, et Claude entame un voyage aléatoire dans son passé.
Entre Marguerite Duras pour Hiroshima Mon Amour ou Alain Robbe-Grillet sur L'Année dernière à Marienbad, Alain Resnais se sera plu à convoquer des écrivains novice du cinéma pour alimenter la touche anticonformiste de ses films. Je t'aime, je t'aime allait ajouter une nouvelle pierre à l'édifice par sa collaboration avec l'auteur Jacques Sternberg. Plutôt porté sur le fantastique et de la science-fiction, celui-ci s'était fait maître dans l'art de la nouvelle et la capacité à délivrer un récit intense et inventif dans ce cadre restreint. L'idée du scénario co écrit par Resnais et Sternberg sera donc de construire un récit entier sur des moments courts, en creux et anodins. La construction en flashback logique pour une telle entreprise sera donc amenée par le postulat de science fiction que constitue le voyage dans le temps.
On assiste donc à l'étrange destin de Claude Ridder (Claude Rich), un homme dépressif ayant perdu le goût de vivre et qui suite à une tentative de suicide ratée se voit proposer par une équipe scientifique d'expérimenter un voyage dans le temps qui ne durera qu'une minute. Seulement la machine se détraque et au lieu de remonter seulement un an en arrière, c'est sur les vingts dernières années de son existence que va se plonger le héros. Après de premières minutes d'exposition austères et vaporeuses (le trajet en voiture vers le centre scientifique sur la musique hypnotique et inquiétante de Krzysztof Penderecki), le film laisse ainsi la place aux expérimentations narratives et visuelles du duo Resnais/Sternberg. Pour comprendre la structure de Je t'aime, je t'aime, il faut imaginer l'existence comme un puzzle dont on aurait soudainement mélangé les pièces qui se révèlent donc à nous de manière totalement aléatoire.
Le film alterne donc les émotions qui accompagnent une vie que ce soit la joie, l'amour l'exaltation ou l'ennui. C'est pourtant ce dernier aspect qui domine par le choix des auteurs de ne privilégier que les moments quelconques et sans éclats, notamment ceux où Claude ronge son frein dans des emplois ingrats et ennuyeux. Ce parti pris permet de révéler de manière fragmentée et indirecte ce qui constitue l'enjeu principal, la découverte de la raison du mal être de Claude. L'énigme se révèlera progressivement, notamment au travers de la relation tumultueuse que Claude entretient avec son épouse qui se s'avérera être décédée...
Je t'aime, je t'aime doit une partie de sa réputation à sa narration alambiquée transcendant un récit intimiste et qui ouvre la voie par sa modernité à de grandes réussite à venir comme Eternal Sunshine of the Spotless Mind, L'Armée des douze singes (Resnais aura d'ailleurs un projet avorté avec Chris Marker dont La Jetée inspire ce dernier et c'est lui qui conseillera au réalisateur de travailler avec Sternberg) ou le récent Inception. Pourtant si le film a pu sembler terriblement nébuleux au spectateur de 1968 on se rend compte que sous l'aspect éclaté Resnais donne toute les clés à la compréhension de son histoire. Profitant de l'idée de la machine détraquée, le montage se fait déroutant avec son jeu sur la répétition des séquences faussement identiques mais avec toujours la légère variante de cadrages ou de positionnement de caméra qui change tout, comme un souvenir qui se transforme. Ces variantes jouent aussi sur la durée des scènes, escamotant ou ajoutant constamment des informations essentielles en début ou fin de séquences de manières impromptues.
Cela concerne notamment l'histoire d'amour entre Claude Rich et Olga Georges-Picot dont on voit le début, l'épanouissement, le lent délitement puis la fin. Tout cela s'exprime dans une dimension onirique fortement prononcée, que ce soit par les apparitions improbables (la charmante jeune femme dans son bain) ou la mise en scène de Resnais comme son choix une fois dans le passé de cadrer constamment Claude Rich au centre de l'image, que la caméra soit en mouvement et l'accompagne ou qu'elle soit statique. Après tout dans nos rêves ne sommes nous pas toujours au centre des évènements ?
Dernier point fort la prestation magnifique de Claude Rich. Sans le moindre artifice de maquillages il parvient par son seul jeu à faire deviner chacune des époques de la vie de son personnages, adulte ou juvénile, heureuses ou triste grâce à une expressivité subtile. Il est l'âme du film et notre guide dans ce kaléidoscope. Un beau film qui constitue une des grandes réussites de l'époque pour Resnais.
Sorti en dvd aux Editions Montparnasse
Extrait
vendredi 27 mai 2011
Morgan - Morgan: A Suitable Case for Treatment, Karel Reisz (1966)
Morgan, marxiste tendance King-Kong, campe sous les fenêtres de sa femme, qu'il cherche à reconquérir.
Troisième film de Karel Reisz, Morgan: A Suitable Case for Treatment voyait le réalisateur progressivement s'éloigner des préoccupations du free cinema tout en offrant un prolongement idéal a son Saturday Night and Sunday Morning. La filmographie de Karel Reisz est peuplée de personnages excentriques, obsessionnel et totalement en décalage avec leur environnement. Cela peut être le Albert Finney rebelle à l'autorité de Saturday Night and sunday Morning, Vanessa Redgrave totalement absorbée par son art dans Isadora, James Caan accro au jeu dans Le Flambeur ou encore Nick Nolte meurtri par l'expérience du Vietnam dans Who'll stop the rain.Dans Morgan Reisz offre sans doute sa figure la plus emblématique et réussie dans cette veine, et qui plus est obsédée par la plus noble des causes, l'amour.
Cela va du décalage sur les physiques ou des personnages croisés se voit comparés à une bête quelconque (une femme à la coiffure sophistiquée évoquant un paon, un agent de métro bien en chair un hippopotame) à l'association d'idées presque expérimentale (de nombreux stock shots animaliers offre un pendant sauvage des séquences comme la traque finale croisée à un safari chassant une girafe) voire même référentielle avec la reprises de séquences entières du King Kong original mais aussi d'un Tarzan de Johnny Weissmuler. Ces différents aspects permettent à reisz de totalement se réapproprier un matériau à déjà mis en scène à la BBC sur un scénario de David Mercer.
Le film est ainsi parsemé de scènes d'une drôlerie et d'une inventivité irrésistible à travers les stratagèmes spectaculaires de Morgan pour attirer l'attention de sa belle et faire enrager son très snob nouveau prétendant joué par Robert Stephens. S'il se plaît à signaler le décalage constant de Morgan, Reisz est loin de le condamner, bien au contraire. C'est cette dinguerie qui le rend singulier, vivant et donc humain dans un environnement très aseptisé. C'est finalement plus un fossé social qu'un désamour qui sépare le couple, ce qu'on entrevoit d'abord dans les obsessions gauchistes de Morgan opposé à la superficialité de Leonie.
Morgan est issu d'un milieu ouvrier et chaleureux (les scènes avec Iren Handl jouant la mère aimante et compréhensive dégagent une belle tendresse) quand Leonie est un pur produit de l'aristocratie. Elle entretient ainsi un rapport/amour haine avec Morgan puisque partageant la même nature extravertie mais toujours rattrapée par la culpabilité dû à son éducation. Vanessa Redgrave tour à tour espiègle ou tourmentée, légère ou glaciale mérite bien tout ses efforts et exprime avec brio toutes ces nuances quand le regard aimant s'oppose à l'attitude récalcitrante et inversement. D'une beauté et d'un naturel radieux qui irradie l'écran, elle délivre une magnifique prestation (récompensée d'un Oscar et d'un prix d'interprétation à Cannes) et l'alchimie amoureuse avec David Warner est palpable.
Reisz exacerbe de plus en plus ses différents motifs jusqu'à rendre dramatiques ce qui n'était que comédie jusque là, les moyens de séductions forcée de Morgan dépassant les bornes tout comme les conséquences qu'il a en subir en retour. La dernière partie aligne donc les moments les plus étranges (dont une mémorable apparition de Morgan déguisé en gorille...) où les fantasmes de Morgan vire au cauchemar surréaliste et psychanalytique tel cette longue séquence symbolique nous préparant au sort du héros lorsqu'une camisole surgit de nulle part dans le décor d'une décharge. Lorsqu'un personnage si entreprenant et indestructible dans sa quête baisse les armes sans prévenir on comprend que tout est fini, le joli épilogue montrant que bien que les sentiments soient intact tout rapprochement semble désormais impossible.
Sorti en dvd zone 2 anglais et ne comportant pas de sous titres anglais ou français malgré le logo Studio Canal une fois de plus...
Extrait
jeudi 26 mai 2011
Hercule contre les Vampires - Ercole al Centro Della Terra, Mario Bava (1961)
Pour libérer sa bien aimée d’un mal étrange, Hercule doit descendre aux enfers, là d’où aucun être vivant n’est jamais revenu, pour y prendre la pierre de vie. Accompagné d’un fidèle compagnon, il entame le voyage qui va d’abord le mener au jardin des Hespérides…
Après Hercule et la Reine de Lydie la série des Hercule allait perdre de son unité en étant systématiquement réalisée par une équipe différente et un metteur en scène qui y appliquerais sa personnalité. La donne avait donc changée avec le troisième volet La Vengeance d'Hercule où Pietro Franscisci écarté par les producteurs et Steve Reeves renonçant au rôle par solidarité se voyaient remplacé respectivement par Vittorio Cottafavi et Mark Forrest avec une grande réussite.Nouveau changement avec cet opus où Mario Bava directeur photo (voire plus) des deux épisodes de Francisci est intronisé réalisateur et Reg Park, un des principaux rivaux de Steve Reeves dans les concours culturistes reprend le rôle.
Parmi les grosses faiblesses on pointera un scénario moins riche et intéressant que les deux premiers volets (le rapport à la mythologie est bien plus superficiel), une interprétation dans l'ensemble assez fade notamment un Reg Park composant un Hercule très balourd et mono expressif qui peine à faire oublier Steve Reeves et Mark Forrest. Mario Bava de son côté n'est vraiment pas à l'aise dans les scènes de péplum classique et le début fait un peu peine à voir comparé au beau classicisme de Francisci.
Par contre une fois que le récit est lancé, c'est un spectacle flamboyant qui nous est offert pour une réussite essentiellement visuelle. Peu intéressé par le genre péplum, Bava réoriente progressivement le film vers l'épouvante gothique pour un mélange improbable et réussi. Doté d'un budget bien inférieur aux volets précédents, le tournage se fait essentiellement en studio où Bava par sa maitrise des éclairages, du système D (décors réutilisés masqués par la fumée, sous une lumière différente, arrières plans dessinés) et son sens du cadrage parvient à créer un environnement foisonnant et onirique.
Les grands moments expressionnistes et débordants de couleurs ne manquent pas comme l'arrivée en bateau dans le jardin des Hespérides dans une lumière rougeoyante sous un ciel se modifiant à coup de filtre ou encore la traversée d'un lac de lave. Le tout nous apparait évidemment factice mais foisonnant et cauchemardesque car renforçant l'aspect irréel et la tonalité fantastique du film. Certains décors demeurent sacrément impressionnant aujourd'hui encore comme l'arbre abritant la pomme d'or ou les extérieurs du palais de Christopher Lee.
Mieux encore, Bava orchestre certains moment semblant directement issu du cinéma d'épouvante, encouragé par la présence de Christopher Lee qui offre une facette du vampire bien éloigné de ses rôle à la Hammer. On peut citer le début où Dejanira se redresse d'une tombe, les apparitions furtives de Christopher Lee dans les pièces du palais tel un certain Dracula et surtout le formidable affrontement final qui voit Hercule assailli par une horde de spectres surgissant du du sol, grand moment de terreur se concluant de manière plus musclée à coup de lancer de rocher... Les entrevues surréalistes avec la Sybille entretiennent largement cette l'ambiance oppressante qui à de rares exceptions est essentiellement nocturnes.
Bava prouvait làune nouvelle fois son grand talent en s'appropriant un genre bien éloigné de ses prédilections et en lui conférant une classe et une identité visuelle inespérée vu les moyens à dispositions. Un péplum atypique (l'expérience sera retentée par son ancien complice Riccardo Freda avec moins de réussite pour le médiocre Maciste en enfer où Maciste surgit en plein XIXe gothique !) et un de ses tout meilleurs films.
Sorti en dvd zone 2 français français chez Opening
mercredi 25 mai 2011
La Dernière fois que j'ai vu Paris - The Last Time I Saw Paris, Richard Brooks (1954)
Charles Wills, correspondant de guerre, épouse Helen, une américaine rencontrée à Paris. Mais le bonheur est de courte durée...
Un joli mélo où Elizabeth Taylor offre une de ses plus touchante interprétation. L'histoire est une adaptation de la nouvelle Retour à Babylone de F. Scott Fitzgerald où il s'inspirait en partie de l'animosité entre l'auteur et sa belle soeur Rosalind qui lui reprochait par son train de vie de contribuer aux problème mentaux de son épouse Zelda et tenta de lui arracher la garde leur fille une fois cette dernière interné. Le couple du film (et de la nouvelle donc) s'inspire grandement de celui bien réel et destructeur Fitzgerald/Zelda ainsi que des conflits qui naquirent entre eux durant leur séjour à Paris bien que la période passe du lendemain du crash de 1929 sur papier à celui de la Seconde Guerre Mondiale dans un Paris libéré à l'écran.
L'image de liberté symbolisée par Paris garde son sens néanmoins, sorte d'idéal propre à la romance en réponse à une période et des évènements douloureux. C'est ainsi qu'on le voit au début du film avec de glorieuse images de joie et de communion parmi lesquelles vont se rencontrer Van Johnson et Elizabeth Taylor qui échangent déjà un baiser furtif dans le tumulte sans se connaître. Brooks filme ce Paris euphorique de manière idéalisé avec une photo de Joseph Ruttenberg donnant une aura féérique au monument de la capitale, en captant l'énergie festive des multiples célébrations se déroulant en parallèle. C'est d'ailleurs ce qui offre une des plus belles scènes du film lorsque Elizabeth Taylor rejoint Van Johnson lors du premier allumage des lumières sur Paris depuis la libération et que lorsque tout s'éclaire en un regard échangé on ressent le coup de foudre qui saisit nos héros.
Le reste du film bien plus sombre ne fait alors que courir après la grâce de ses premiers instants dont le souvenir de bonheur s'éloigne de plus en plus. Tout les éléments qui réunissait le couple dans cette ouverture s'inversent progressivement. De ville animée Paris devient soudain un nid de tentations et de rencontres peu recommandable, de la nécessité heureuse on passe à une opulence faussement bénéfique lorsque le train de vie s'améliore. Les premières frustrations apparaissent alors avec les ambitions littéraires contrariées de Van Johnson et la dépression progressive de Liz Taylor. Cette dernière est aussi troublante en jeune fille délurée qu'en épouse mûre et malheureuse et offre une prestation splendide et contenue quant Van Johnson sans démériter s'avère un peu trop démonstratif dans les instants les plus dramatique.
On signalera au passages une des toutes premières apparitions de Roger Moore coureur prétendant de Elizabeth Taylor, Donna Reed excellente également en belle-soeur dissimulant sa jalousie et ses rancoeurs et un savoureux Walter Pidgeon en père immature. La structure en flashback alourdit un peu le film, autant au début que lors de l'épilogue et surligne inutilement ce qui se devinait sans se dire (la jalousie de Donna Reed) même si la conclusion s'avère touchante. Hormis ces petits défauts (dont quelques longueurs tout de même) un joli moment dont le titre plus touchant que celui de la nouvelle s'inspirait d'une chanson à succès de Joseph Kern (déjà entendue dans le film Lady Be good en 1941) dont la mélodie se fait entendre à plusieurs reprises durant le film.
Sorti en dvd zone 2 français chez Aventi mais la copie est assez moyenne donc mieux vaut éventuellement tenter le zone 1 mais là aussi il va falloir jongler entre plusieurs éditions douteuse pour trouver la bonne. Si quelqu'un le possède en zone 1 il pourra préciser l'édition à prendre en priorité en commentaires.
mardi 24 mai 2011
La Vengeance d'Hercule - La Vendetta Di Ercole, Vittorio Cottafavi (1960)
Hercule est en train d'accomplir le Douzième et dernier de ses Travaux : maîtriser Cerbère, le chien à trois têtes gardien des Enfers. A Œchalie, tout le monde le croit mort, à commencer par le roi Eurytos, son ennemi de toujours. Ce dernier s'est mis en tête de conquérir Thèbes, sa rivale, et Hercule était l'unique obstacle à son ambition. L'unique ? Non, il reste encore son fils Hyllos. Or Hyllos est amoureux de Théa, la fille d'Eurytos. Il devrait lui être facile de d'attirer le jeune homme dans un traquenard...
Or, contre toute attente, Hercule revient des Enfers, où il a conquis le rubis mystique qui est l'œil du Dieu-Cyclope de la Vengeance. Hercule restitue l'œil au dieu, dans son temple. C'est alors que la Sibylle lui prophétise de nouveaux malheurs. Hercule rentre à Thèbes, retrouve son ami le roi Androclès, mais aussi son épouse Déjanire et son fils Hyllos. Inexplicablement, Hercule s'oppose aux fiançailles de celui-ci avec Théa. Sa véhémence laisse présager un douloureux et honteux secret...
La Vengeance d'Hercule est le troisième et sans doute meilleur film de la saga Hercule qui mêle parfaitement le classicisme et la dimension mythologique des deux premiers volets et l'ambiance fantastique des deux qui suivront. De plus le rôle titre est cette fois porté par un excellent interprète, aussi charismatique et imposant qu'un Steve Reeves tout en étant un vrai bon acteur, ce qui en fait la meilleure incarnation du demi dieu à l'écran.
Le duo gagnant Steve Reeves/Pietro Francisi(Steve Reeves solidaire de Pietro Francisi évincé par la production abandonne le rôle qui l'a rendu célèbre) laisse donc ici la place au touche à tout Vittorio Cottafavi pour sa première incursion chez Hercule (avant de livrer dans la foulée l'excellent Hercule à la conquête de l'Atlantide) accompagné du culturiste Mark Forrest qui en plus de sa carrure a donc une vrai formation de comédien. On regrettera d'autant plus que ce soit sa seule apparition dans le rôle avant de laisser la place au gros balourd Reg Park dès l'épisode suivant dirigé par Mario Bava.
Une vraie dimension tragique, une tonalité sombre et désespérée règne dès les premiers instants du film, bien plus prononcée encore que dans le Hercule contre les vampires de Bava qui devait tout à son esthétique tandis que Cottafavi parvient à donner une vrai tonalité dramatique en plus de livrer un film plastiquement superbe. On pense d'ailleurs très fort à Bava lors de la scène d'ouverture où Hercule doit descendre au enfers pour effectuer l'ultime de ses travaux et affronter le Cerbère. Ambiance inquiétante et étouffante qui bascule dans l'horreur pure lorsqu'on découvre le fameux Cerbère, étonnement réussi et menaçant, Cottafavi parvenant à rendre le combat palpitant grâce à un sens du montage aiguisé (de même plus tard avec le combat avec un ridicule homme déguisé en ours qui passe plutôt bien). Le ton fantastique et mythologique se poursuit lorsque Hercule va payer son tribut au dieu de la vengeance après sa victoire.
On revient ensuite dans la tonalité des deux premiers épisodes avec des ennemis bien humains et redoutable, entre le tyran Eurytos (superbe prestation de Broderick Crawford) et son conseiller aux plans machiavéliques. Ces méchants animé de motivations guidées par la passion (comme l'amour non réciproque pour Alcinoé) entraînent dans leurs complot des personnages innocents comme le couple Hyllos/Thea, la femme de Eurytos et surtout le personnage tragique de Alcinoé, le plus intéressant du film qui entre vengeance personnelle et son amour pour Hercule va subir de grands tourments. La relation complexe entre Hercule et sa famille monté contre lui par les complots anime toute la première partie presque dénuée d'action mais passionnante. Mark Forrest déborde de charisme et est parfait pour le ton dramatique adopté par le film en Hercule las et aspirant à la paix mais poursuivi par la violence.
La dernière partie qui voit Hercule défier les Dieux pour contrer la prophétie dont il est victime est ainsi palpitante de bout en bout. Cottafavi livre un spectacle de haute volée multipliant les morceaux de bravoures fabuleux : Hercule qui affronte un éléphant pour sauver son fils, défiant un Centaure qui s'est emparé de sa femme et surtout le grand final où il fait s'écrouler les remparts de la citée de son ennemi (pourtant bâtis par les Cyclope) avant un épique assaut final.
Les moyens sont énormes (décors et costumes splendide) et l'écroulement des remparts fait son petit effet tandis que la dernière bataille regorge de détails et de péripéties avec un sens du cadre prodigieux de Cottafavi. En ramenant Hercule à une dimension plus humaine et dramatique (et plus seulement le surhomme venant prêter main forte aux conflits des mortel comme dans les premiers films) Cottafavi réalise le plus palpitant et épique des 5 épisodes de ce qui est la meilleure saga du péplum italien. Pour l'heure parallèlement à ce volet était donc tourné le baroque Hercule contre les Vampires de Mario Bava sur lequel on reviendra très vite.
Sorti en dvd dans la série péplum de la collection Atlas comme les autres épisodes déjà évoqués.
L'amusante bande annonce américaine ou on constatera la disparition de toutes les facettes évoquant la mythologie grecque y compris le non de son héros rebaptisé Goliath !
Or, contre toute attente, Hercule revient des Enfers, où il a conquis le rubis mystique qui est l'œil du Dieu-Cyclope de la Vengeance. Hercule restitue l'œil au dieu, dans son temple. C'est alors que la Sibylle lui prophétise de nouveaux malheurs. Hercule rentre à Thèbes, retrouve son ami le roi Androclès, mais aussi son épouse Déjanire et son fils Hyllos. Inexplicablement, Hercule s'oppose aux fiançailles de celui-ci avec Théa. Sa véhémence laisse présager un douloureux et honteux secret...
La Vengeance d'Hercule est le troisième et sans doute meilleur film de la saga Hercule qui mêle parfaitement le classicisme et la dimension mythologique des deux premiers volets et l'ambiance fantastique des deux qui suivront. De plus le rôle titre est cette fois porté par un excellent interprète, aussi charismatique et imposant qu'un Steve Reeves tout en étant un vrai bon acteur, ce qui en fait la meilleure incarnation du demi dieu à l'écran.
Le duo gagnant Steve Reeves/Pietro Francisi(Steve Reeves solidaire de Pietro Francisi évincé par la production abandonne le rôle qui l'a rendu célèbre) laisse donc ici la place au touche à tout Vittorio Cottafavi pour sa première incursion chez Hercule (avant de livrer dans la foulée l'excellent Hercule à la conquête de l'Atlantide) accompagné du culturiste Mark Forrest qui en plus de sa carrure a donc une vrai formation de comédien. On regrettera d'autant plus que ce soit sa seule apparition dans le rôle avant de laisser la place au gros balourd Reg Park dès l'épisode suivant dirigé par Mario Bava.
Une vraie dimension tragique, une tonalité sombre et désespérée règne dès les premiers instants du film, bien plus prononcée encore que dans le Hercule contre les vampires de Bava qui devait tout à son esthétique tandis que Cottafavi parvient à donner une vrai tonalité dramatique en plus de livrer un film plastiquement superbe. On pense d'ailleurs très fort à Bava lors de la scène d'ouverture où Hercule doit descendre au enfers pour effectuer l'ultime de ses travaux et affronter le Cerbère. Ambiance inquiétante et étouffante qui bascule dans l'horreur pure lorsqu'on découvre le fameux Cerbère, étonnement réussi et menaçant, Cottafavi parvenant à rendre le combat palpitant grâce à un sens du montage aiguisé (de même plus tard avec le combat avec un ridicule homme déguisé en ours qui passe plutôt bien). Le ton fantastique et mythologique se poursuit lorsque Hercule va payer son tribut au dieu de la vengeance après sa victoire.
On revient ensuite dans la tonalité des deux premiers épisodes avec des ennemis bien humains et redoutable, entre le tyran Eurytos (superbe prestation de Broderick Crawford) et son conseiller aux plans machiavéliques. Ces méchants animé de motivations guidées par la passion (comme l'amour non réciproque pour Alcinoé) entraînent dans leurs complot des personnages innocents comme le couple Hyllos/Thea, la femme de Eurytos et surtout le personnage tragique de Alcinoé, le plus intéressant du film qui entre vengeance personnelle et son amour pour Hercule va subir de grands tourments. La relation complexe entre Hercule et sa famille monté contre lui par les complots anime toute la première partie presque dénuée d'action mais passionnante. Mark Forrest déborde de charisme et est parfait pour le ton dramatique adopté par le film en Hercule las et aspirant à la paix mais poursuivi par la violence.
La dernière partie qui voit Hercule défier les Dieux pour contrer la prophétie dont il est victime est ainsi palpitante de bout en bout. Cottafavi livre un spectacle de haute volée multipliant les morceaux de bravoures fabuleux : Hercule qui affronte un éléphant pour sauver son fils, défiant un Centaure qui s'est emparé de sa femme et surtout le grand final où il fait s'écrouler les remparts de la citée de son ennemi (pourtant bâtis par les Cyclope) avant un épique assaut final.
Les moyens sont énormes (décors et costumes splendide) et l'écroulement des remparts fait son petit effet tandis que la dernière bataille regorge de détails et de péripéties avec un sens du cadre prodigieux de Cottafavi. En ramenant Hercule à une dimension plus humaine et dramatique (et plus seulement le surhomme venant prêter main forte aux conflits des mortel comme dans les premiers films) Cottafavi réalise le plus palpitant et épique des 5 épisodes de ce qui est la meilleure saga du péplum italien. Pour l'heure parallèlement à ce volet était donc tourné le baroque Hercule contre les Vampires de Mario Bava sur lequel on reviendra très vite.
Sorti en dvd dans la série péplum de la collection Atlas comme les autres épisodes déjà évoqués.
L'amusante bande annonce américaine ou on constatera la disparition de toutes les facettes évoquant la mythologie grecque y compris le non de son héros rebaptisé Goliath !
lundi 23 mai 2011
Train de nuit pour Munich- Night Train to Munich, Carol Reed (1940)
Le 3 septembre 1939 à Prague — juste avant la déclaration de guerre —, le professeur Axel Bomasch, inventeur d'un procédé de blindage, ne voulant pas que sa trouvaille tombe aux mains de l'Allemagne nazie, parvient à s'enfuir à Londres, mais laisse derrière lui sa fille Anna, arrêtée par la Gestapo et envoyée en camp de concentration. Là, elle rencontre Karl Marsen, prisonnier comme elle. Ils parviennent à s'évader et à gagner Londres à leur tour. Par l'intermédiaire d'un agent des services secrets britanniques, Gus Bennett, la jeune femme retrouve son père, mais Karl, en réalité un officier nazi, kidnappe les Bomasch qui sont transférés à Berlin. Gus se rend alors dans la capitale du Reich, sous l'identité d'un officier allemand du Génie — il est germanophone —, pour tenter de ravir Anna et le professeur à la Gestapo et de les ramener en Angleterre...
Un Reed très mineur mais pas désagréable puisque si l'on ressent aisément ses objectifs de film de propagande la décontraction et le rythme enlevé de l'ensemble offre un bon moment. On peut même parler d'exercice Hitchcockien revendiqué puisque l'accumulation des péripéties invraisemblables rappelle grandement les extravagances dont le Maître du Suspense se plaît à truffer ses intrigues. Plus précisément c'est à Une Femme disparaît que l'on pense ici puisqu'on en retrouve l'interprète principale Margaret Lockwood, le cadre du train et surtout le duo de scénaristes Sidney Gilliat et Frank Launder qui en signent une intrigue voisine où ils replacent même le duo de personnages comiques Charters et Caldicott incarné par Basil Radford et Naunton Wayne.
L'intrigue dépeint donc une course poursuite et un jeu de faux semblants entre nazis et anglais pour s'assurer les connaissances d'un savant tchèque et de sa fille. Si le début alignant les images oppressantes de la mainmise nazie progressive sur l'Europe donne dans la gravité, c'est vraiment par sa tonalité presque légère que le film surprend. D'abord par la double face de ses héros masculins, Paul Heinreid avec son allure athlétique a tout du héros en puissance avant que l'on déchante grandement à son sujet et à l'inverse Rex Harrison tout en décontraction paraît bien inoffensif en agent dissimulé en chanteur populaire.
Ce relâchement de l'ensemble peut également jouer contre le film puisque tout les éléments sont là pour susciter un suspense au cordeau et que finalement la tension ne se fait guère sentir malgré quelques rebondissements bien amenés.
On se raccrochera donc au rythme enlevé (il y aurait de quoi nourrir au moins 2 ou 3 films avec ce qui se déroule ici en 90 minutes), la mise en scène élégante de Reed (qui a bénéficié de gros moyens le temps de quelques séquences spectaculaires ou de décors impressionnants comme les maquettes de l'usine tchèque, l'intérieur du QG de la Gestapo) et d'un Rex Harrison épatant en espion précieux et insouciant (pour un peu James Bond n'est pas loin dans certaines de ses attitudes).
Le final spectaculaire en téléphérique fait son petit effet (malgré là encore cette mollesse et manque de tension qu'on peut déplorer) annonçant une scène proche du futur Quand les aigles attaquent et conclu de manière satisfaisante cette production peu mémorable (dans ce mélange de tension et de second degré Reed fera bien mieux plus tard notamment Notre Homme à la Havane) mais sympathique.
Sorti en dvd zone chez Critérion et doté de sous-titres anglais
Extrait