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samedi 31 juillet 2010

Quasimodo - The Hunchback of Notre Dame, William Dieterle (1939)

Un des films qui fit passer la RKO à la fin des années 30 dans la cour des grands studios à coup de productions prestigieuses avec grands sujets, réalisateurs renommés et distribution de stars (même si le soucis d'économies et de savoir faire demeure). Cela se manifeste donc avec cette flamboyante adaptation de Victor Hugo réalisé par William Dieterle. Malgré quelques soucis au niveau de Phoebus fadement incarné par Alan Marshal et une Fleur de Lys un peu sacrifiée, la trame est relativement fidèle au roman et aux thèmes développés par Hugo.

Visuellement très impressionnant le film voit Dieterle déployer tout la puissance évocatrice acquise en Allemagne dans les productions UFA lors des imposantes visions de la cathédrale, l'illustration fouillées de ses intérieurs ou encore les statues exprimant le poids du passé et la piété de cette époque.

C'est également à l'expressionnisme allemand qu'on pense avec la superbe photo de Joseph August lors des passages clairs/obscurs dans la cour des miracles tour à tour inquiétante et chaleureuse (terrifiante scène où Pierre Gringoire voit les estropié surgir de toutes parts des ténèbres). Derrière cette grandiose imagerie gothique, Dieterle dépeint idéalement le drame des différents personnages.

Maureen O'Hara est une magnifique Esmeralda (imposée par Laughton) objet de désir soucieuse de faire cesser les persécution sur son peuple gitan. Elle n'a pas encore l'assurance de ses grands rôles à venir mais irradie déjà de présence et de sensualité (les scènes de danse !) on regrettera juste le noir et blanc qui ne permet pas de profiter de sa chevelure rousse.

Cedric Harwicke ténébreux Frollo tiraillé entre désir inassouvi et rigueur est fabuleux également mais c'est le grand Charles Laughton qui les éclipse tous. Le maquillage (largement dissimulé lors de la promotion pour préserver la surprise) grotesque et pathétique est une extraordinaire création (tellement marquant que la dernière version de Disney semble l'avoir repris à l'identique) porté par la prestation poignante de Laughton.

C'est par lui que passe l'émotion comme ce moment où sur le pilori et en proie à la moquerie du peuple Esmeralda seule vient lui donner de l'eau, sous le costume Laugton par son regard et sa gestuelle fait passer une incroyable gamme de sentiments. Son sauvetage d'Emeralda grâce au aux droit d'asile de l'église est incroyablement galvanisant également.

Les questionnements et réflexions de Hugo contre le pouvoir de l'église, l'injustice sociale sont très bien vus à travers la description d'un Paris grouillant et misérable, en proie à l'obscurantisme religieux porté sur la torture. Le morceau de bravoure final est assez inoubliable avec la défense héroïque de Notre Dame.

Sorti en dvd zone 2 dans la collection RKO au éditions Montparnasse.

vendredi 30 juillet 2010

Le Messager - The Go-Between, Joseph Losey (1970)



Un garçon issu d'une famille modeste est invité par son camarade de classe dans une famille de l'aristocratie britannique. Il deviendra ainsi le messager de la jeune fille de la maison vivant des amours interdites.Cette adaptation de Leslie Poles Hartley constitue un des tout meilleurs films de Losey. Mélange de romance et de récit initiatique enfantin, le récit nous dépeint les mésaventures d'un jeune garçon amené à servir de messager à un couple que tout oppose. Elle (Julie Christie) est issue de l'aristocratie et promise à un riche Lord tandis que lui (Alan Bates) n'est qu'un modeste fermier du voisinage. Losey ne décroche jamais du point de vue du jeune Leo (Dominique Guard belle révélation), les différentes thématiques (l'opposition des classes, le cloisonnement des jeunes filles...) se faisant par sa découverte des travers du monde des adultes.

L'intrigue se développe ainsi de manière lente et limpide, Léo se rapprochant de Marian suite à la maladie de son camarade jeu et ne découvrant que de loin dans un premier temps les liens des deux amants. Porté par la musique tour à tour légère et pesante à la fois de Michel Legrand (dont un des thèmes au piano sert de générique à "Faites entrer l'accusé" !) les échanges épistolaires entre les amoureux sont traité de manière ludique dans un premier temps, exprimant l'enthousiasme du messager juvénile ravi de faire plaisir à Lady Marian dont il est amoureux. Rattrapé par la responsabilité énorme qui lui incombe,le jeu tourne court pour le héros qui découvre tout les freins sociaux qui rendent ses vas et vient cruciaux. C'est ce trajet à effectuer qui symbolise finalement le fossé social rendant l'union impossible, Losey évitant le cliché de l'antagonisme frontal entre pauvre et riche pour une approche plus subtile.

Loin de donner dans la grande envolées romantique (alors que le côté film en costume le laisse présager) Losey filme le tout dans un style feutré, presque froid.L'ambiance rurale, estivale et oisive n'est que poudre aux yeux masquant ce qui est une authentique prison dorée pour Julie Christie sous le confort. L'intensité des sentiments se ressent donc au détour de l'ouverture fébrile des courrier, des courses de Léo entre le manoir et la ferme de Bates. Sinon la passion doit se faire mesurée et distante même lorsqu'on est proche physiquement (remarquable séquence musicale) tandis que la seule séquence charnelle sera interrompue de la manière la plus tragique qui soit.

La magnifique photo de Gerry Fisher renforce le côté nostalgique exprimant le regrets de ses moments perdus, renforcé par les retour au présent fragmenté sous forme de voix off puis de cadre moderne où notre messager devenu adulte sera une ultime fois sollicité. Le style feutré de Losey fait merveille tout du long, et le scénario de Pinter (un grand auteur pour en adapter un autre formule gagnante) est remarquablement équilibré. Palme d'or bien méritée en 1971 et The Go Between marquera le retour en grâce de Losey confirmé par ses excellents films suivants.

Film pas disponible individuellement en zone 2 français mais au sein d'un coffret Losey, sinon il faut donc se tourner vers l'édition anglaise pas très chère mais malheureusement dépourvue de sous titres, anglais comme français.


jeudi 29 juillet 2010

Whisky à gogo - Whisky Galore, Alexander McKendrick (1949)


Durant la Seconde guerre mondiale, les habitants d'une petite île écossaise se morfondent pour cause de la pénurie d'alcool, la pire de toute les privation dans ces contrées. Un jour, un bateau chargé en caisse de whisky fait naufrage sur ses côtes pour le plus grand bonheur de tous mais un officier anglais un peu trop zélé veille... Premier film de McKendrick qui signe d'emblée une grande réussite avec ce fleuron du studio Ealing.

La description pittoresque et bon enfant du village écossais est excellente (qui m'a souvent évoqué le truculent Je Sais où Je vais de Michael Powell) et la transition d'humeur entre la communauté dépressive tournant au ralenti puis totalement égayée par le whisky est sacrément comique, offrant des scènes de beuverie mémorables. Plus efficace que les fontaines de Lourdes, le whisky s'avère avoir des vertus miraculeuse puisque réveillant les mourants, ranimant les plus déprimés et redressant les paralytiques lorsqu'il s'agit de défendre la cargaison.

Le casting est excellent que ce soit les non professionnels recrutés en Ecosse aux trognes et à l'accent plus vrais que nature ou encore les acteurs classiques comme Basil Radford parfait en officier anglais rigide et idiot. Le scénario est des plus ludique, se jouant des codes du film de guerre et d'espionnage (l'interrogatoire des villageois, la longue course poursuite finale) où les plans et microfilms habituels sont remplacés par des caisses de whisky et les nazis par des anglais, renforçant l'effet comique (tout en jouant habilement de l'antagonisme Anglo écossais, les uns passant pour des snob coincés et les autres pour de joyeux drilles alcooliques).

McKendrick a fait bien mieux après (L'Homme au complet blanc ou Tueurs de Dames sont d'une plus grande ambition thématique) mais ce premier film témoigne d'une énergie comique et d'une vraie fraicheur sacrément revigorante. Entre ce film là et le mémorable Champagne Charlie (dont j'ai parlé en avril) on peut dire que les scénaristes de Ealing étaient sacrément inspiré sur le sujet, la légende voulant même que les scénarios soient fignolés au pub du coin.

Trouvable dans le coffret zone 2 français consacré au Studio Ealing. De passionnantes interventions de Bertrand Tavernier en bonus.

La mémorable scène d'ouverture

mercredi 28 juillet 2010

Liberté mon amour ! - Libera, amore mio, Mauro Bolognini (1973)


Au début des années 70 dans une Italie politiquement secouée une certaine nostalgie et attirance pour le fascisme s'élevait au sein de la jeunesse pour cette rigueur sentiment d'une nation forte qu'elle n'avait pas connue. Quelques cinéastes s'appliquèrent à rappeller à ces jeunes inconscients la dure réalité que furent ces années là comme Vittorio De Sica dans son beau "Le Jardin des Finzi Contini". On peut aussi penser à "Nous nous sommes tant aimés" de Scola ou au "1900" de Bertolucci avec le film de Bolognini qui fonction sur le même mélange de comédie intimiste douce amère et de grande fresque historique.

Sur une période allant du début des années 30 à l'apogée du fascisme puis la Seconde Guerre Mondiale et la libération, une tranche de l'histoire de l'Italie vue à travers le regard de la bien nommée Libera Amore Anarchia (Claudia Cardinale) fille d'anarchiste et mère de deux enfants. Femme sanguine totalement indisposée par le régime fasciste, elle n'hésite jamais à afficher sa protestation sous toutes les formes possibles : comme arborer une robe rouge écarlate en opposition au tunique noire fasciste ou encore invectiver ouvertement la moindre injustice dont elle est témoin. Ces vélleités ne sont pas sans effet sur sa vie de famille, Libera risquant l'exil plusieurs fois (comme son père) et étant contrainte à une vie itinérante car régulièrement exclue des villes où elle séjourne.

Cette aspect est au départ montré de manière génialement comique avec le pauvre Bruno Cirino entrant dans des rages noires face à cette épouse ne pouvant rester à sa place et obligeant la famille à constamment tout reprendre à zéro. Les empoignades mari/femmes dévoilent aussi une des plus belle relation de couple du cinéma italien où l'amour est le plus fort, Cirino malgré son agacement soutenant toujours Claudia Cardinale et reconnaissant dans la dernière partie qu'elle avait sans doute raison. L'engagement de Libera atteindra le point de non retour lorsqu'elle aidera un exilé évadé à quitter le pays et la seconde partie du film en pleine guerre de basculer dans une veine plus sombre et mélancolique.

L'équilibre familial s'en trouve définitivement bouleversé tandis que le chaos se déchaîne, Bolognini distillant des images historiques d'archives en transparence lors des transition du quotidien des héros. La reconstitution est une nouvelle fois somptueuse (et comme pour Bubu totalement immersive l'apparat ne fait jamais dériver de l'attention du récit), Bolognini ayant pu tourner sur les lieux des évènements, utilisant notamment toutes les bâtisses de l'architecture fasciste bien présents, rendant encore plus pesante l'oppression du régime de Mussolini (dénonciation, calomnies, surveillances).

Le scénario ose les grandes envolées romanesque pour son héroïne, jusqu'à l'excès même je ne suis pas convaincu de la nécessité de nous la montrer en maquisarde dynamitant les ponts. Même si c'est dans la logique de l'évolution de son personnage, la figure du fils aurait pu être une sorte de réalisation des enseignements de Libera (et de son père magnifique Adolfo Celli) plutôt que de faire d'elle une une résistante active. Claudia Cardinale (toujours magnifique servie par Bolognini) est néanmoins incandescente, vibrante et émouvant en Libera pour ce qui est sans doute un de ses très grands rôles. Les interprètes masculins ne sont pas en reste, Adolfo Celli et Bruno Cirino émouvant en mari dépassé, mais aussi Bekim Fehmiu en démocrate lettré amoureux de Libera

Un autre des grands thèmes du film et faisant le lien avec le présent de sa réalisation, c'est la manière dont l'Italie a raté le coche d'une vraie purge de ses institutions en réinstallant dans les hautes sphères des fascistes ayant retourné leur veste à temps. Le leitmotiv est répété plusieurs fois durant le film, la chute du fascisme, ce n'est pas la fin mais le début de la révolution... Une révolution qui n'aura finalement jamais lieu, pour aboutir à la situation contemporaine ayant motivé la mise en oeuvre du film.


Sorti récemment en dvd chez Carlotta

Extrait

mardi 27 juillet 2010

Le Vengeur agit au crépuscule - Decision at Sundown, Budd Boetticher (1957)

 


A Sundown, une petite ville de l'ouest des Etats-Unis. Tous les habitants se préparent dans l'allégresse à assister au mariage du maire, Tate Kimbrough, et de la jolie Lucy Summerton. Mais, le jour des noces, Bart Allison jette un froid dans l'assemblée réunie en accusant Tate d'être responsable de la mort de sa femme. Il se montre prêt à en découdre avec le futur mari pour venger l'honneur de sa famille.  

Un des très grands Boetticher qui sous l'apparent récit de vengeance classique révèle une finesse psychologique étonnante. On a souvent fait le rapprochement entre Randolph Scott et Clint Eastwood et cela n'a jamais été plus vrai que dans Decision at Sundown. Le début du film instaure d'emblée une tension qui ne se relâchera plus. Randolph Scott déboule dans une petite ville pour se venger du notable qui la terrorise car il le juge responsable de la mort de sa femme. Taciturne et déterminé, le phrasé court Scott campe là son personnage le plus sombre et menaçant et Boetticher multiplie les séquences d'intimidation dont un face à face chargé d'électricité avec le shériff corrompu dans un saloon. Scott annonce là divers figures emblématique du western à venir, le Josey Wales de Eastwood avec cet homme rongé par le ressentiment mais aussi "Harmonica" de "Il était une fois dans l'Ouest" où on ressent la même maturation de la vengeance Scott prévenant même son ennemi à son mariage plutôt que de le tuer froidement afin d'avoir droit à son duel avec lui. 

On pense être engagé en terrain connu quand le ton change brusquement à mi film. Les motifs de la vengeance se font plus flous lorsqu'il apparaît que la femme de Scott n'était pas la sainte vertueuse qu'il idéalisait et remet soudainement en cause toute son action. Parallèlement les actions du héros auront réveillés la conscience des habitants de la ville restés impuissants devant l'affrontement inégal, Tate Kimbrough envoyant une véritable armée abattre le seul Scott. C'est un autre des points étonnants, le méchant incarné par John Caroll est un couard absolu se dissimulant derrière ses hommes grâce à son argent, ces derniers ne valant guère mieux, tueurs adepte de la balle dans le dos. Le personnage est un faible régnant par la tyrannie mais Boetticher parvient à le rendre touchant par la relation qu'il entretient avec un Valerie French et le fait qu'on ne donne finalement pas cher de sa peau seul face à un Randolph Scott haineux. 

Le final sonne donne la révolte de la ville mais Randolph Scott est contraint de se remettre en question et d'abandonner son objectif. En dépit de la tournure positive pour la collectivité, Bart Alison demeure donc une âme sèche et amère qui doit réapprendre à vivre. La conclusion est une des plus sombre et désespéré vu dans un western, un peu comme si "Josey Wales" n'avait jamais fini par trouver la paix (il est d'ailleurs question ici à nouveaux de la Guerre de Sécéssion en toile de fond). Un des meilleurs Boetticher qui a trouvé un matériau à la mesure de son talent avec le scénario de Charles Lang pour un film remarquablement équilibré. Le début est tonitruant et regorge d'actions et de rebondissements, avant que les tourments intérieurs fassent place pour un suspense finalement plus psychologique.

  Disponible dans le coffret zone 1 Sony consacré à Budd Boetticher et dotés de sous titres français.

dimanche 25 juillet 2010

Went the day well ? - Alberto Cavalcanti (1942)


1942. Un détachement de l'armée britannique s'établit dans un village de la campagne anglaise. Les soldats s'intègrent à la communauté, avant que des évènements tragiques ne révèlent leur véritable identité : Il s'agit de soldats allemands qui exécutent un plan d'invasion. Les habitants, retenus prisonniers, organisent la résistance.

Du studio Ealing, on retient surtout aujourd’hui les grandes comédies sociales et caustiques que sont Tueurs de Dames, Noblesse Oblige ou encore Whisky à gogo. Ce versant n’est pourtant apparu que plus tard avec le succès de l’excellent Champagne Charlie, Ealing œuvrant auparavant dans tous les genres, notamment le fantastique comme le prouve le très bon film à sketch Au Cœur de La Nuit, réunissant la crème des réalisateurs du studio. Dans ce contexte, il n’était donc pas étonnant de le voir s’attaquer au film de guerre, la surprise venant de l’extrême noirceur du propos, en faisant un des films les plus atypiques de Ealing, voire du cinéma anglais tout court. Il fallait bien le génial Cavalcanti, sans doute le meilleur réalisateur du studio (avec Alexander McKendrick) pour nous livrer une telle œuvre sans concessions.

Adaptation d'un roman de Graham Green, le film sort en 1942 en Angleterre alors que la 2e guerre mondiale fait rage et que Londres est régulièrement pilonnée sous les bombes allemandes. L’invasion nazie est ainsi la grande peur du peuple anglais, déjà exploitée de manière indirecte dans Le 49e Parallèle de Michael Powell décrivant l’errance d’une garnison allemande semant le chaos sur le territoire canadien. Went The Day Well aborde ainsi cette crainte frontalement, en décrivant l’insidieux plan d’invasion allemande dans la campagne anglaise, la résistance héroïque des villageois exaltant le patriotisme du peuple britannique et obéissant ainsi à l’aspect propagandiste voulu. En effet, toutes les œuvres anglaises de l’époque sont financées par l'État et doivent contribuer à l’effort de guerre, soit en dépaysant la population de son quotidien difficile (les exotiques et romanesque production Korda comme le beau Voleur de Bagdad ou Lady Hamilton dont on a parlé ici), soit en lui redonnant espoir avec des figures héroïques (Colonel Blimp de Michael Powell) ou alors en attisant sa peur et sa haine de l’ennemi allemand comme avec ce Went The Day Well. Il est d’ailleurs amusant de constater que le film aura droit à un quasi remake avec L’Aube Rouge de John Millius, les Allemands étant remplacés par des communistes belliqueux, et l’ambiguïté de Cavalcanti par un vrai fond douteux, même si le tout s’avère relativement divertissant.

Le début du film s’inscrit pourtant dans la droite lignée des productions Ealing, avec ce petit village anglais paisible et peuplé de braves gens sans histoire, Cavalcanti appuyant largement sur l’aspect champêtre et chaleureux. Malgré quelques signes avant coureurs (un faux soldat anglais qui malmène un enfant) rien ne nous prépare au choc et à la brutale rupture de ton qui intervient lorsque la supercherie est découverte.

Le film bascule ainsi dans une ambiance sombre et violente où des allemands impitoyables malmènent et déciment ces villageois auxquels on s'est attaché, avant que ces derniers se rebiffent, pour ce qui est en fait un véritable récit de guérilla dans la campagne anglaise. La violence et la cruauté exprimées ici choquent encore aujourd'hui : le curé du village abattu d’une balle dans le dos, la garde nationale mitraillée sans sommation, des enfants torturés, une grand-mère explosée à la grenade... Cela fonctionne également dans l'autre sens, avec nos gentil villageois qui défendent leur terre avec véhémence, donnant ainsi ce qui est sans doute le moment le plus brutal du film : une vieille dame anglaise bien avenante jusque là achève un soldat allemand à la hache lors d’une séquence traumatisante.

Dans une moindre mesure, le siège final voyant des jeunes filles en fleurs décimer des hordes de nazis au fusil participe à cet aspect propagandiste visant à exalter la haine de l’ennemi. Le style fulgurant, la sécheresse et l’indifférence dont fait preuve Cavalcanti (annonçant presque Peckinpah, tel ce moment où un nazi prend une balle en pleine tête sans la moindre censure) pour montrer les débordements de part et d’autre montrent pourtant bien que le propos est moins manichéen qu’il n’y parait.

Dans la lignée du Colonel Blimp de Powell, Cavalcanti en profite également pour égratigner le tempérament et la culture anglaise, ici cause de la propre perte des personnages du film. Ainsi, par leur indifférence et leur nonchalance, ils ne sauront repérer les indices du désastre à venir (dont une séquence où la garde nationale, croyant à une blague, continue son exercice alors que l'alerte est déclenchée) ou réagir à temps une fois le danger imminent (des opératrices préfèrant papoter plutôt que répondre aux appels de détresse). On distingue aussi un message social fort, les figures les plus héroïques du film étant de condition modeste, alors que le traître en apparence honorable est un nanti, campé par Leslie Banks, acteur typique de l'imagerie de l'Anglais colonialiste.

La démarche du réalisateur est donc particulièrement intéressante, fustigeant ici l’adversaire en éveillant les bas instincts de son public, tout en lui renvoyant un reflet peu reluisant de lui même avec cette dénonciation d’une certaine société anglaise de l’époque, thématique qu’on retrouve d’ailleurs dans d’autres film du studio Ealing, tel que Noblesse Oblige et ses fonctionnaires incompétents.

Trouvable en dvd zone 2 dans le coffret Ealing édité il y a quelque années par Studio Canal


vendredi 23 juillet 2010

Comment tuer votre femme - How to murder your wife, Richard Quine (1965)



Stanley Ford (Jack Lemmon) est un auteur de bande dessinée à succès qui raconte chaque jour les aventures de Bash Brannigan, agent secret. Célibataire endurci, il vit avec son majordome Charles Firbank (Terry-Thomas) une vie réglée et immuable. Un jour, sous l'emprise de l'alcool, il épouse une strip-teaseuse italienne (Virna Lisi) qui ne tarde pas à prendre une grande place dans son existence. Stanley Ford ne rêve alors que de sortir de cette situation.

Après L'inquiétante dame en noir et le génial Deux têtes folles, le film qui conclu en quelque sorte unee trilogie entamée par Quine et George Axelrod sur la mise en abîme, les rapport entre réel et création.Le scénario déplace cette fois tout l'aspect référenciel au cinéma des deux précédents film pour une évocation hilarante des rapports hommes/femmes. C'est par la voix off puis la silhouette distinguée de son majordome (Terry Thomas fabuleux en valet british possessif) que nous est présenté le héros Jack Lemmon, dessinateur de bd et célibataire endurci au quotidien réglé comme du papier à musique. Le ton est distancié à souhait avec un Terry Thomas multipliant les clins d'oeils au spectateur tandis qu'il présente l'intérieur cossu de son maître et son mode de vie dont toute relation durable est exclu.

L'argument du film est outrageusement machiste puisque les femmes et le mariage son synonyme d'enfer ultime auquel il convient absolument d'échapper à tout prix. Un enterrement de vie de garçon aux allures de veillée funèbre confirme cette idée de manière jubilatoire avant que l'annulation des fiançailles lance la vraie fête, au lendemain de laquelle Lemmon se réveille marié à la belle Virna Lisi (1ere apparition mémorable en petite tenue sortant d'un gâteau...). Celle-ci joue l'italienne exubérante et sexy dans toute sa splendeur, envahissante pour un Lemmon qui subit tout les clichés liés au mariage puisqu'il s'empâte à force de bon plat, ne dort plus à cause des ardeurs de sa belle et de son addiction à la télévision tandis que la décorations féminine criardes envahissent l'appartement. Le questionnement entre réel et fiction se fait par l'intermédiaire de la bd du héros qui fait de son personnage un extension de lui même. Du temps du célibat, celui-ci était un agent secret à la vie trépidante dont Lemmon expérimente les exploits physiques dans la réalité et une fois la corde au cou c'est à l'aventure du mariage qu'est soumis le double de papier. Lemmon y lâche donc ces frustrations et y projette le meurtre de sa femme, mais est ce vraiment uniquement dans la bd ? Le côté machiste assumé est d'une drôlerie irrésistible, à la convention du devoir de mariage Lemmon argumente pour sa défense dans une grandiose tirade finale le droit de chaque homme à souhaiter un jour tuer sa femme, appuyé par tout les maris présents... Il est d'ailleurs dommage que le scénario n'entretienne pas plus vivement le doute sur la fait que le meurtre ait été effectué ou non, la question étant trop vite résolue.

Quine multiplie les idées de gags fabuleuses tel tout les gaffes commises par Virna Lisi conclues par un gros câlin dont l'image se floute progressivement, le rapport presque marital entre Lemmon et son valet... Virna Lisi au grand potentiel comique n'est pas tout à fait au diapason de Lemmon sur le registre dramatique et la conclusion ne rend pas tout à fait toute l'émotion souhaité après les envolées anti mariage qui ont précédées, même si on saisit la morale de l'histoire (applicable dans les deux sens) en dépit des défauts divers l'autre est indispensable.
 

Sorti en dvd zone 2 français chez MGM

jeudi 22 juillet 2010

Ces Merveilleux Fous volants dans leurs drôles de Machines - Those Magnificent Men in their Flying Machines, Ken Annakin (1965)


Evocation des exploits des pionniers de l'aviation à travers un récit loufoque où des aviateurs du monde entiers disputent une course pour la traversée de la Manche de Londres à Paris. Personnages exubérants d'inspirations bd où chaque nationalité voit les clichés qui s'y rattachent poussés à l'extrême grâce un joli casting de furieux. Les allemands conservent toute leur rigueur militaire même quand il ne savent pas piloter grâce à Gert Fröbe, les français sont des coureurs séducteurs mettant des main aux fesses (Jean Pierre Cassel génial french lover et excellent running gag avec la rouquine qui lui apparait sous différentes identités tout le film) les américains de braves types un peu ploucs...

La première moitié du film essai sans grande conviction de créer des enjeux dramatiques un peu artificiels avec son triangle amoureux ( c'est cependant l'occasion d'admirer Sarah Miles future héroïne de "La Fille de Ryan") mais on s'intéresse plus volontiers aux péripéties délirantes des personnages azimutés grâce à quelque séquences tordantes comme le duel en ballon entre Cassel et Gert Fröbe.


La course en elle même est très impressionnante pour l'époque avec des séquences aériennes virtuoses où pour les moments les plus périlleux des matte paintings et incrustations superbes (hormis la fin où pas une ombre ne passe alors que des dizaines d'avions survolent Paris). De plus les concepteurs se sont bien lâchés au niveau du design des avions avec des modèles bien extravagants. C'est tout de même un peu long pour ce que ça raconte mais le divertissement est assuré.

extrait

mercredi 21 juillet 2010

Du Silence et des Ombres - To Kill a Mockingbird, Robert Mulligan (1962)


Sur un mode plus profond et sombre que son futur Un été 42, Mulligan abordait déjà le thème de la perte de l'innocence dans ce film magnifique. Deux enfants insouciant vont découvrir l'injustice et la noirceur du monde des adultes au cours d'un été où leur père joué par Gregory Peck doit défendre un jeune noir accusé du viol d'une blanche dans le Sud raciste. Le point de vue se fait quasi uniquement du niveau des enfants, abordant chacun de ses thèmes sous l'angle des terreurs enfantines, notamment par l'intermédiaire du la figure de Boo Radley (et comme ça je découvre l'origine du nom du groupe de rock !) et sa légende.

Au fur et à mesure que les enfants perdent de leurs illusions, les séquences se font plus explicites et oppressante comme une tentative de lynchage et surtout une scène de procès tendue à souhait. Gregory Peck est formidable, figure bienveillante souhaitant toujours définir la différence entre le bien et le mal à ses enfants. Ses notions se trouvent ébranlées au final à cause de l'injustice criante du procès, et Peck devra s'accommoder avec ses principes pour que justice soit rendue malgré tout, au dessus des lois des hommes. Les deux enfants sont charmant et toujours juste, notamment la petite jouant Scout et c'est leur regard candide qui atténue la grande noirceur du propos.

Trouvable en dvd zone 2 et pour les parisiens le film ressort actuellement en salle.

mardi 20 juillet 2010

Bubu de Montparnasse - Bubù, Mauro Bolognini (1970)

Partageant avec Luchino Visconti le goût pour le film d’époque en costume, Mauro Bolognini fut souvent comparé au réalisateur du Guépard et dénigré à tort , ses détracteurs ne voyant en lui qu’une pâle copie. La comparaison s’arrête pourtant là, si ce n’est peut-être pour chacun une première partie de carrière s'intéressant à des univers plus modestes et aux thèmes sociaux qui s’épanouiront dans le néo-réalisme pour Visconti, tandis que Bolognini entamera une fructueuse collaboration avec un Pasolini encore scénariste, dans des grands films comme Le Bel Antonio, La Viaccia ou encore Les Garçons.

Adapté d’un roman de Charles Louis Philippe, Bubu de Montparnasse nous dépeint le destin tragique d'une jeune fille sacrifiant tout à l'homme qu'elle aime. Manipulée et contrainte à la prostitution, Berta s'enfonce dans un quotidien sordide, fait de passes répétées avec des inconnus de tous âges (et de la menace de la syphilis), dont la seule illumination vient des retrouvailles avec cet homme qui ne la mérite pas.

Un beau portrait de femme qui inscrit le film dans la tradition des grands personnages féminins sacrificiels de la littérature du XIXe, tous régis par la tyrannie et la lâcheté des hommes. Tyrannie, avec Bubu joué par un Antonio Falsi abject et dont la beauté triste aveugle l'héroïne, et lâcheté avec l'étudiant faible de caractère incarné par Massimo Ranieri, indécis et incapable de sortir la femme qu'il aime de la fange. Le fond sordide accompagne une forme d'une beauté irréelle, entre la photo diaphane d'Ennio Guarnieri et les costumes magnifiques de Piero Tosi dans un Paris fantasmé (le seul vrai lien avec le cadre du roman : la monnaie qui reste le franc) où par la grâce du montage Turin, Milan et Rome ne forment plus qu'une seule et même ville imaginaire.

On saisit là toute la différence avec Visconti tant Bolognini se distingue des enluminures plus pointilleuses de celui-ci. Les moyens moindres et les milieux dépeints contraignent Bolognini à une sobriété et une astuce de tous les instants (une grande scène de marché cadrée uniquement sur la petite parcelle reconstituée comme à l'époque et qui donne l'illusion d'un décor immense alors qu'en arrière plan, tout est resté contemporain sans qu'on le distingue) et rend d'autant plus saisissantes les somptueuses compositions de plan, véritables tableaux en mouvement, inspirés des impressionnistes comme Renoir, Lautrec ou Manet.

En cherchant plus à capter l'atmosphère que le détail, Bolognini offre une vision différente mais tout aussi convaincante que les reconstitutions les plus luxueuses de Visconti. La mélancolie qui se dégage de toutes ses images nous orientent ainsi vers la chape de plomb inéluctable qui pèse sur l'héroïne en dépit de quelques touches d'espoir.

La conclusion plonge dans un abîme de désespoir où Bertha est à nouveau le jouet des hommes qui, brutaux ou sensibles, ne peuvent lui apporter ce qu'elle désire : une vie. Ottavia Piccolo, tour à tour candide, innocente, puis presque rongée par la folie lorsque les événements s'acharnent sur elle, offre une prestation magnifique.


Sorti récemment en dvd zone 2 chez Carlotta

lundi 19 juillet 2010

Cartouche - Philippe de Broca (1962)


 Bagarreur mais charmeur et avec un grand cœur, Cartouche vole la paye du régiment où il avait été enrôlé avec La Douceur et La Taupe, et, accompagnés de la charmante Vénus, ils arrivent à Paris où ils vont prendre le contrôle de la bande de Malichot. Ils détroussent les riches et les puissants avec une certaine bonne humeur, jusqu'à ce que Cartouche tombe amoureux de la femme du Lieutenant général de police, ce qui va lui faire prendre des risques de plus en plus importants...

Tout simplement un des meilleurs film de cape et d'épées jamais réalisé en France avec ce sommet de la collaboration Belmondo/De Broca et cette vision romancée du brigand Cartouche. La première partie donne dans l'aventure picaresque ébouriffante, en narrant l'irrésistible ascension de Cartouche de voleur anonyme de la cour des miracles à soldat déserteur puis son retour triomphal à la tête des brigands. Le ton se fait farceur et rigolard à travers ses péripéties rocambolesque (cette scène de bataille grotesque où nos héros désertent) mais où se dessine néanmoins les thèmes sociaux et la vocation de Robin des Bois français de Cartouche.

Les officiers noble s'y amusent des pertes de leurs soldats, chair à canon dont ils n'ont cure et dont ils n'attendent que de s'approprier la solde. La caractérisation de Cartouche et de ses acolytes donne dans l'inspiration à la Dumas et ses trois mousquetaires. Virevoltant, bagarreur et charmeur Cartouche donne évoque un D'Artagnan tandis que le massif Jess Hahn à la force herculéenne (et ironiquement nommée La Douceur) est un simili Porthos, le raffiné et séducteur Jean Rochefort faisant lui penser à Aramis (et plus précisément inspiré du Capucin, vrai acolyte de Cartouche issu de la noblesse). Le rythme trépidant, les bagarre homériques et l'atout charme de Claudia Cardinale et la mise en scène anarchique de De Broca font le reste mais c'est véritablement dans sa seconde partie que le film décolle complètement.

Cartouche tout puissant y est gagné par l'orgueil et au risque de se perdre poursuit de ses assiduités une comtesse, seul objet qui se refuse à sa convoitise. Le ton change progressivement pour se faire plus mélancolique et sombre, laissant enfin éclater le flamboyant score romanesque de Georges Delerue. La tonalité romantique fonctionne vraiment bien lors des entrevues avec la comtesse (magnififque Odile Versois) mais c'est Claudia Cardinale et le destin de son personnage qui emporte totalement lors d'une conclusion étonnement mélancolique après l'ouverture insouciante et pétaradante.


Même si quelques imperfections se font voir par rapport au souvenir d'enfance (festival de faux raccords durant les bagarres), une grandes réussites qui parvient à être relativement fidèle à l'histoire de Cartouche (la description de la Cour des Miracles, la manière dont il est trahi par un sbires le jalousant).


Sorti en dvd zone 2 chez Studiocanal

dimanche 18 juillet 2010

Les Premiers Hommes sur la lune - First Men in The Moon, Nathan Juran (1964)


En 1964, une mission astronautique internationale (Russes et Américains ensemble) prend pied sur la Lune et y découvre un drapeau anglais et un document écrit qui est une prise de possession de la lune au nom de la Reine Victoria. Grosse surprise des astronautes qui se croyaient les premiers hommes sur la Lune. On retrouve Bedford, le dépositaire de ce document, dans une maison de retraite de l'Angleterre.

Bedford raconte son histoire. À la fin du XIXe siècle, pour échapper à ses créanciers, il s'associe avec un savant un peu fou mais génial, Cavor, qui a inventé une matière, la cavorite, qui, une fois déposée sur un objet, permet à celui-ci de s'affranchir de la pesanteur. Ensemble, et avec Kate, la fiancée de Bedford, ils partent ensemble pour la Lune
...

Un production Charles Schneer/ Harryhausen assez oubliée et peu connue semble t il car rarement citée parmi leur réussite alors que c'est un spectacle des plus convaincant. Un début assez sérieux et "réaliste" (avec des clins d'oeil sympa comme le sigle à damier de la fusée évoquant l'album de Tintin "On a marché sur la lune") de anticipant de quelques années la ferveur populaire que provoquera l'arrivée des premiers hommes sur la lune. La découverte improbable par les astronautes d'un document de 1899 amènent la NASA à faire mener sur Terre une enquête qui va révéler qu'un expédition lunaire à bel et bien eu lieu des décennies auparavant.

Après ce début contemporain, la narration en flashback nous ramène à une Angleterre Victorienne et une adaptation très fidèle d'un des texte les moins connus de HG Wells. Ce dernier était souvent resté dans l'ombre à cause du roman "De la Terre à la lune" de Jules Verne qui avait exploité l'idée des années auparavant, mais le livre de Wells avait néanmoins déjà connu une première version filmée en 1919 et Le Voyage dans la lune de Melies en est pratiquement une adaptation officieuse tant les similarités pullulent.

Le ton du film se fait alors plus léger, entre le héros baratineur et un peu escroc Bedford, ses relations orageuse avec sa fiancée Kate (jouée par la charmante Martha Hyer) et surtout le voisinage du professeur loufoque et maladroit Cavor joué par Lionel Jeffries. Les amateurs de steampunk jubileront devant le principe hors norme qui va permettre à nos héros d'effectuer leur voyage sur la lune. En dépit d'une scène de décollage éblouissante, Harryhausen se loupe un peu dans les séquences spatiale peu crédible et dénuée de magie, ce dont il a dû se rendre compte puisqu'il dépeint l'essentiel du voyage (le retour à la fin sera également très elliptique) depuis l'intérieur de la capsule.

Arrivée sur la lune, c'est une tout autre affaire avec des cadrages et perspectives soufflante et un paysage lunaire très bien rendu. Le film se lâche ensuite dans la fantasy la plus pure avec la rencontre du peuple sélénites lunaire et de leur impressionnant royaume sous terrain. Bestiaires impressionnant, décors monumentaux, machines à l'esthétique improbable et aux fonctionnements inconnus, c'est à une véritable frénésie visuelle lorgnant sur les roman de Edgar Rice Burroughs que se livre Harryhausen. Nathan Juran fidèle collaborateur et réalisateur très doué (on lui doit sans Harryhausen le formidable "Jack le tueur de géant") délivre une réalisation alerte et bourré d'énergie mettant parfaitement en valeur les décors et créatures issue de l'imagination de Harryhausen.

Un autre des points positif est que le scénario respecte parfaitement les thématiques de HG Wells. Homme de science croyant à l'avenir de l'homme à travers le culte du savoir, le personnage pacifiste du professeur cavol semble clairement être le double de l'écrivain dans le roman, et il en va de même dans le film.

L'imperfection et la violence des hommes semble pourtant toujours contrecarrer ses dessein pacifistes, ce qui sera le cas ici avec le héros et narrateur Bedford montré sous un étonnant mauvais jour (surtout après le début du film le rendant sympathique) à l'attitude violente face à l'étranger inconnu (métphore du colonialisme ?). En prime la conclusion offre un joli clin d'oeil dans sa résolution à la manière dont mourrait les martiens dans La Guerre des mondes (Wells a écrit Les Premiers Hommes sur la lune après et a donc recyclé son idée).

Le film est un gros échec à sa sortie et signe momentanément la fin de la collaboration entre Harryhausen et Charles Schneer, qui se retrouveront néanmoins en 1969 pour La Vallée de Gwangi. Sans être leur meilleur production, Les premiers hommes sur la lune est donc un spectacle tout à fait plaisant et visuellement assez époustouflant.

Trouvable en dvd zone 2 anglais doté de sous titres français