Pages

vendredi 24 avril 2020

Wandering Ginza Butterfly - Gincho Wataridori, Kazuhiko Yamaguchi (1972)

Chef de gang, Nami va en prison pour avoir tué un yakuza suite à un conflit territorial. Libérée trois ans après, elle fréquente une salle de billard et va travailler dans un bar à hôtesses de Ginza où elle devient vite populaire...

Sorti parallèlement au célèbre La Femme scorpion (1972), Wandering Ginza Butterfly est une des œuvres qui lance Meiko Kaji au sein de la Toei après son départ de la Nikkatsu. Le studio est donc à travers ses deux films en pleine construction de l'identité de sa nouvelle vedette, notamment pour combler le retrait à venir de Junko Fuji, célèbre héroïne de la saga à succès de La Pivoine rouge. Si La Femme scorpion est un pur film d'exploitation s'emparant du populaire genre du "women in prison, le ton vindicatif, la mise en scène inspirée et inventive de Shunya Ito ainsi que le magnétisme taiseux de Meiko Kaji en faisait un objet unique en son genre. Wandering Ginza Butterfly s'avère plus explicitement un produit de série dans ses codes et sa narration. D'ailleurs le réalisateur Kazuhiko Yamaguchi réalisa l'année précédente le flamboyant Delinquent Girl Boss: Worthless to Confess à la construction similaire, avec son groupe de délinquantes repenties en proie à un groupe d'infâme yakuza symbole de la tyrannie masculine, et trucidé dans un fabuleux final vengeur.

Si l'écrin est bien identifiable, le traitement s'avère cependant très intéressant. On baigne ainsi dans le clinquant et la vie grouillante du quartier de Ginza, entre ses bar à hôtesses et ses clubs de jeu. C'est là que vient se réfugier Nami (Meiko Kaji) après trois années de prison dont le motif restera longtemps mystérieux, mais qui justifie l'aide secrète qu'elle apporte à une veuve malade élevant seule son enfant. Nami devient rapidement une hôtesse populaire et va se lier à la faune des laissés pour compte de Ginza : le voyou élégant Shin (Tatsuo Umemiya), le scout (recruteur d'hôtesse) rigolard Ryuji (Tsunehiko Watase), la "mama" (patronne de bar) bienveillante Kayo (Akiko Koyama). Tous se reconnaissent par leur passé douloureux qu'ils viennent oublier dans les ruelles éclairées de néons, les bars enfumés de Ginza dont Yamaguchi capte magnifiquement l'atmosphère nocturne interlope.

En une poignée de scènes (la rencontre avec la fillette vendeuse de fleur) le background difficile de chaque protagoniste se devine sans être explicatité, et le développement se fait plus précisément avec Nami. Meiko Kaji se trouve là au carrefour des rôles emblématiques de ce début de carrière. Ancienne chef de gang à moto (comme dans la série des Stray Cat Rock -
Stray Cat Rock : Female Boss , Stray Cat Rock : Wild Jumbo, Stray Cat Rock : Sex Hunter et Stray Cat Rock: Machine Animal - tourné à la Nikkatsu), reprise de justice comme dans La Femme scorpion (portant d'ailleurs le même prénom de Nami), Meiko Kaji montre pourtant là une autre facette de son talent. Elle est ici plus élégante, souriante, espiègle, en un mot plus humaine que le bloc vengeur et impassible de La Femme scorpion. Elle se montre touchante dans l'expression de sa vulnérabilité et de sa culpabilité, et la détermination sera plus rageuse que glaciale dans la confrontation avec les yakuzas.

Finalement les passages obligés du film de gangsters sont plutôt succincts, Yamaguchi privilégiant l'étude de caractère et la capture de ce quartier de Ginza. Lorsque la tension reprend ses droits, le suspense et l'action sont cependant rondement menés, que ce soit une haletante partie de billard ou une conclusion sanglante où sabre à la main Meiko Kaji anticipe cette fois sa Lady Snowblood. Belle réussite donc qui connaîtra une suite la même année.

Sorti en dvd zone 1 chez Synapse et sous-titré anglais 

 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire