Dévoreur de pellicule monomaniaque, ce blog servira à commenter pour ceux que cela intéresse tout mes visionnages de classiques, coup de coeur et curiosités. Je vais tenter le défi de la chronique journalière histoire de justifier le titre du blog donc chaque jour nouveau film et nouveau topo plus ou moins long selon l'inspiration. Bonne lecture et plein de découvertes j'espère! Vous pouvez me contacter à justinkwedi@gmail.com, sur twitter et instagram

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mercredi 23 décembre 2020

Mobile Suit Gundam III: Encounters In Space - Kidô Senshi Gundam III: Meguriai Sorahen, Yoshiyuki Tomino (1982)

0079 du Calendrier Universel. Le White Base repart pour l'espace afin de participer à la campagne orchestrée par les Forces Fédérales et qui devra mettre un terme au conflit. Toujours poursuivi par Char Aznable, le vaisseau de nos héros devra déjouer pièges et embuscades afin de connaître le répit, avant de participer aux deux grandes batailles qui scelleront le destin du monde. Par de-là les combats surgira une révélation, celui des New-Types : simples anomalies génétiques ou éveil d'une nouvelle espèce ?

Ce troisième film conclut la première saga Gundam en apothéose après Mobile Suit Gundam (1981) et Mobile Suit Gundam :Soldiers of Sorrow (1981). On se souvient que la série tv originelle avait vu faute de succès sa diffusion écourtée à 43 épisodes sur les 52 prévus, et donc connue un conclusion précipitée. Ce dernier film comme les précédent est en grande partie un montage des épisodes de la série, mais c’est celui qui bénéficie du plus d’ajouts et de modifications pour justement bénéficier d’un développement et de la fin ambitieuse envisagée par Yoshiyuki Tomino. Le premier point à profiter de cet aspect est le rythme du film, qui ne donne plus cette impression « rushée » des deux premiers volets où les batailles s’enchaînaient sans respiration. 

Nous avions laissé l’équipage du White Base de retour dans l’espace après les rudes épreuves rencontrées sur terre. Servant toujours de leurre à la Fédération terrienne, il subit de multiples assauts des troupes du Duché de Zéon. On constate le chemin parcouru entre les «bleus » du premier film et désormais vaisseau rompu aux nombreuses joutes guerrières. Le héros Amuro et son Gundam inspirent désormais la même terreur aux troupes adverses que le fit pour lui son meilleur ennemi, Char Aznable. Alors que les motifs de cette guerre restaient nébuleux dans les deux premiers volets, ils sont enfin développés ici et s’inscrivent dans les questionnements humanistes de Tomino. La Fédération terrienne est une démocratie qui s’avère corrompue (et dont les hautes sphères restent invisibles signes d’un mal insaisissable) auquel s’oppose la colonie spatiale du Duché de Zéon réclamant son indépendance mais dont les bonnes intentions initiales ont dérivées vers un régime totalitaire. Le scénario ramène ces enjeux monumentaux à l’intime de ses personnages. Ainsi dans les deux camps les « newtypes », ces humains ayant développés de nouvelles facultés en grandissant dans l’espace, constituent un des grands enjeux du conflit. 

Ce sont des instruments de guerre qui les mèneront à la victoire pour la Fédération terrienne, et la justification même de la guerre pour Zéon qui dans un principe eugéniste veut en faire la race humaine dominante. Chaque personnage subit les conséquences de cet échiquier politique. Après avoir intimidé sa mère par ses instincts soldats dans le premier film, Amuro se confronte à la froideur de son scientifique de père qui ne voit en lui que l’image de sa réussite d’avoir à la fois conçu l’arme parfaite avec le Gundam, et le pilote idéal à travers son fils. Le froid réalisme guerrier des précédents volets s’orne cette fois d’un mysticisme et onirisme fascinant lorsqu’Amuro va se confronter et tomber amoureux de l’arme ultime de Zéon, la « newtype » Lalah. Ses pouvoirs psychiques lui confèrent une prescience anticipant les manœuvres adverses, et une capacité de destruction spectaculaire. Comme Amuro la jeune fille est manipulée (mais sans avoir trouvé comme lui une famille de substitution avec son équipage) et la manifestation très poétique de ses pouvoirs est imprégnée de son innocence, tout en semant massivement la mort. Lorsque son esprit rencontre celui d’Amuro en pleine joute spatiale, tous deux se reconnaissent dans leurs maux et espérances mais il est déjà trop tard. 

Cette dualité court dans toute la saga Gundam où les vrais méchants sont rares, et où chacun est le bras armé d’un régime, le fruit de souffrances imposées par les puissants. On retrouve donc ici des scènes où les personnages se croisent et sympathisent hors du champ de bataille tant que l’identité (et le camp) de l’autre est inconnu, et cet autre devient un ennemi mortel par la seule injonction supérieure d’enjeux qui nous dépasse. Ce sera le cas entre Amuro, Char Aznable et Lalah sur une planète neutre. Le passé de Char Aznable et ses desseins véritables, ainsi que sa relation avec sa sœur Sayla, donne une perspective toute différente à ses actes pour en faire une figure d’autant plus fascinante et tragique – ce passé qui donnera lieu à un préquel très célébrée par la suite. Même le traitement de la famille militaire dirigeant Zéon donne lieu à une pure tragédie Shakespearienne alors que le premier film amorçait un traitement plus manichéen. 

Ainsi ornées d’enjeux émotionnels bien plus intenses, les batailles spatiales sont absolument monumentales. Tomino démultiplie les armadas de vaisseaux, les Mobile Suit, et les plonge dans une apocalypse de collisions, d’explosion et de manœuvres spectaculaires. Ce gigantisme est toujours contrebalancé par une violence crue et des pertes amères (une romance un peu sacrifiée par le montage parvient quand même à émouvoir lorsqu’est brutalement interrompue), l’enjeu étant d’enfin mettre les facultés « newtype » au service d’actes plus nobles. L’ultime affrontement entre Amuro et Char sera alors idéologique et non plus guidé par les volontés des puissants. C’est vraiment le plus captivant et impressionnant des trois films, conjuguant brillamment enjeux géopolitiques (où les parallèles avec l’histoire du Japon ou même les deux guerres mondiales se font aisément), intimes et philosophiques entrevus précédemment. Une très belle saga SF dans l’ensemble et parfaite porte d’entrée au foisonnant univers Gundam.

La trilogie est sortie en bluray français chez @anime

mardi 22 décembre 2020

La Blonde ou la Rousse - Pal Joey, George Sidney (1957)

L'histoire d'un chanteur de night-club (Frank Sinatra) hésitant entre deux femmes. L'une est belle, jeune et plutôt sage (la blonde Kim Novak), l'autre est richissime, délurée, mais incarne la sécurité (la rousse Rita Hayworth).

La Blonde ou la Rousse est une superbe comédie musicale qui confirme l'ascension de Frank Sinatra au cinéma dans la continuité du succès de Tant qu'il y aura des hommes (1953). Le film adapte un musical de John O'Hara, Lorenz Hart et Richard Rodgers joué à Broadway en 1940 et o un jeune Gene Kelly jouait le rôle repris par un Sinatra plus mûr. Le scénario s'adapte à son interprète en jouant du côté mauvais garçon attachant et séducteur de Sinatra et ce dès la truculente scène d'ouverture où Joey Evans il est expulsé d'une ville après avoir essayé de séduire la fille mineure du maire. Cette réputation sulfureuse le précède dans sa profession de chanteur de nightclub et, échoué à San Francisco, sa gouaille lui permet d'être embauché dans un établissement miteux.

Son charisme et sa répartie vont lui permettre de se mettre toutes danseuses du club dans la poche, à l'exception de la sage Linda (Kim Novak) qui bien qu'attirée préfère garder ses distances. Tous les "trucs" habituels du coureur Joey tombent à plat face à Linda, quand ils titillent la richissime Vera (Rita Hayworth). Linda est insensible à sa part flamboyante, quand c'est ce qui séduit Vera. Joey conscient de ce qu'il est ne franchit jamais complètement le pas avec Linda dont l'innocence pourrait tirer le meilleur de lui. A l'inverse il ne ressent aucune gêne face à Vera, ancienne stripteaseuse qui s'est élevé socialement et qui est de la même trempe que lui (et conquise après qu'il lui ait entonné le fort irrespectueux "The Lady Is a Tramp"). Linda représente un saut dans l'inconnu intime, Vera un plaisant arrangement qui pourrait lui permettre d'ouvrir son propre club. George Sidney joue parfaitement de cette dualité à plusieurs niveaux. Le plus évident est bien sûr la blondeur immaculée, le teint pâle et la présence discrète de Kim Novak qui s'oppose à la rousseur tapageuse, la sophistication et l'allure assurée de Rita Hayworth. 

Sidney poursuit ce parallèle avec deux scènes où Joey entraîne tour à tour Linda et Vera dans des performances scéniques improvisées. Linda est gauche, guidée par Joey qu'elle ne peut s'empêcher de dévorer des yeux quand Vera a l'expérience, l'assurance et le magnétisme pour capter l'attention du public (et le numéro "Zip" constitue un savant clin d'œil à une fameuse scène de Gilda (1941)) tout en masquant savamment son attirance. Enfin les tenues vestimentaires complètent cette opposition avec les robes longues aux couleurs sobre qui épousent la silhouette élancée de Kim Novak, dont la sensualité est "forcée" par les numéros de danse ou l'ivresse alors que sa timidité naturelle la masque. Rita Hayworth choisit des couleurs plus agressives, où la garde-robe s'orne de plusieurs couches et d'oripeaux comme la fourrure, mais là dans une épate destiné à dissimuler plus consciemment ses sentiments. Frank Sinatra en voguant de l'une à l'autre est aussi, tant dans son attitude que ses tenues, le miroir de ce que lui renvoient ses deux love-interest.

C'est le troisième film de Kim Novak avec George Sidney (après Tu seras un homme, mon fils (1956) et le superbe Un seul amour (1957)) et, si de toute façon l'intrigue fait pencher le cœur du spectateur du côté de son personnage, c'est aussi à la grâce de l'inspiration et maîtrise du réalisateur pour la filmer. Les gros plans furtifs qui capturent ses regards aimants à la dérobée sont magnifiques, les attitudes vulnérables touchent même quand l'intention de la scène est comique et les numéros musicaux la magnifie tel le somptueux My Funny Valentine » - où l'illusion est parfaite, la chanteuse Trudy Stevens qui double Kim Novak reproduit parfaite son timbre, bas, grave et fort sexy. Rita Hayworth au vu de son personnage plus dans la distance et le contrôle ne provoque pas le même attachement mais est tout aussi convaincante. Les habiles changements par rapport à la version scénique plus sombre (où Joey perd les deux femmes et repart seul) tendent à en faire une très plaisante et enlevée romance, et un des grands succès de George Sidney.

Sorti en dvd zone 2 français chez Sony

dimanche 20 décembre 2020

Mobile Suit Gundam II: Soldiers of Sorrow - Kidō Senshi Gandamu Tsū Ai Senshi-hen, Yoshiyuki Tomino (1981)

La Guerre continue et le White Base a pour objectif d'atteindre la base de la Fédération Terrienne, situé au fin fond de la forêt amazonienne...

 Mobile Suit Gundam II poursuit la relecture cinématographique de sa saga Gundam avec ce second film, suite direct de Mobile Suit Gundam (1981). Il s’agit de nouveau d’un remontage de la série tv de 1979, agrémenté de scènes supplémentaires et de la refonte de son intrigue. On avait laissé à la fin du premier film le vaisseau White Base de retour sur terre et en route pour une base de la Fédération terrienne. On les retrouve donc dans ce contexte, subissant régulièrement les assauts des ennemis du Duché de Zéon. Après la phase de découverte de l’univers dans le premier volet, on entre de plain-pied dans l’action avec cette fois une vraie construction de film de guerre où s’enchaînent les batailles. Comme dans le précédent film, ce montage de la série tv entraîne un rythme très alerte (parfois trop) et on y devine dans les gros blocs narratifs les intrigues qui ont probablement constitués des arcs complets (sans doute trois sur ce film).

On retrouve la thématique d’une jeunesse prématurément plongée dans des responsabilités de guerre avec l’équipage improvisé du White Base. Après avoir exploré les tourments du héros Amuro, ce sont les dilemmes moraux et les sacrifices d’autres protagonistes comme Kai aspirant à une vie moins contrainte que l’armée. L’intrigue se concentre ainsi toujours sur l’humain, le fond du conflit opposant la Fédération terrienne au Duché de Zéon n’étant jamais développé, ou du moins ne cherchant pas à rendre un camp meilleur que l’autre. Les âmes nobles se trouvent des deux côtés comme le montre la première partie du film où Amuro croise et sympathise presque avec le redoutable stratège Ramba Ral et sa compagne Hamon. Se croisant démasqués et hors de leur Mobil Suit, ils témoignent d’un véritable respect mutuel avant que la loi du champ de bataille ne ravive une opposition artificielle et qui les dépasse. 

Les deux camps se rejoignent en fait dans le peu de cas qu’ils font de leurs troupes, simples pions destinés à faire avancer leur stratégie. Ce film introduit ainsi le concept de « newtype », des êtres humains qui en grandissant dans les colonies spatiales en ont développés des facultés surhumaines. C’est une des explications possibles de la survie du jeune équipage du White Base, mais surtout de la virtuosité d’Amuro aux commandes du Gundam. Dès lors ce sentiment de n’être qu’un potentiel à exploiter s’étend à la fois à Amuro mais aussi à ses acolytes puisque l’essentiel de la mission du White Base est de servir de diversion, d’appât aux vraies manœuvres de la Fédération terrienne. Le Duché de Zéon ne vaut pas mieux avec l’usage d’une jeune fille comme espionne, seul moyen pour cette dernière de nourrir sa famille.

Malgré l’urgence de la narration, tout cet aspect est primordial et la dimension purement héroïque est parcimonieuse pour avant tout faire ressentir les douleurs de la guerre. Néanmoins les différents affrontements entre Mobile Suit offre leur lot de moments épiques (et remarquablement animés) et particulièrement la dernière partie où le redoutable Char Aznable refait surface. Le scénario tisse un mystère toujours aussi fascinant autour du personnage, laissant supposer qu’il est lui aussi le « newtype » du camp ennemi et laisse en suspens le secret de la séparation avec sa sœur Sayla, et de leur présence dans des camps opposés. Un deuxième filmtout aussi prenant donc et qui continue à justifier la réputation de Gundam dans la SF japonaise. 


 La trilogie est sortie en bluray français chez @allanime