Dévoreur de pellicule monomaniaque, ce blog servira à commenter pour ceux que cela intéresse tout mes visionnages de classiques, coup de coeur et curiosités. Je vais tenter le défi de la chronique journalière histoire de justifier le titre du blog donc chaque jour nouveau film et nouveau topo plus ou moins long selon l'inspiration. Bonne lecture et plein de découvertes j'espère! Vous pouvez me contacter à justinkwedi@gmail.com, sur twitter et instagram

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vendredi 24 septembre 2021

Les Chemins de la gloire - The Road to Glory, Howard Hawks (1936)

Première Guerre mondiale, 1916, sur le Front en France : le capitaine Laroche commande une Compagnie du 39e régiment d'infanterie. Malade et diminué, il dirige pourtant avec poigne et rappelle aux soldats les hauts faits d'armes de ce régiment. L'un de ses officiers, le lieutenant Denet, fait la connaissance d'une jeune femme, Monique, et s'en éprend, ignorant qu'elle est l'amie de son supérieur. Une fois de plus, le régiment monte en première ligne... 

Les Chemins de la gloire est un des premiers gros projets de la fraîchement créée 20th Century Fox après la fusion en 1935 de Twentieth Century Pictures et de Fox Film Corporation. Darryl Zanuck désormais à la tête du studio va être très impressionné à la vision des Croix de bois de Raymond Bernard (1932) et va chercher à en produire un remake. Il engage Howard Hawks pour le réaliser, ce dernier faisant appel à William Faulkner pour écrire le scénario suite à une première collaboration réussie sur Après nous le déluge (1933). Même si Les Chemins de la gloire reprendra des séquences entières du film de Raymond Bernard, ce processus d'écriture éloigne l'intrigue de celle des Croix de bois pour des thématiques plus spécifiquement rattachées à Hawks ou à l'œuvre littéraire de Faulkner. Le postulat est ainsi voisin de celui de La Patrouille de l'aube réalisé par Hawks en 1930 tandis que certains éléments se rapprochent du roman Absalon, Absalon! de William Faulkner.

L'histoire nous plonge en plein triangle amoureux sur fond de Première Guerre mondiale sur le front de France. Le cœur de la jeune infirmière Monique (June Lang) balance entre le capitaine Laroche (Warner Baxter) et le Sergent Denet (Fredric March). Laroche est un officier usé par la guerre, noyé sous les addictions qui lui permettent de toujours repartir au front, mais qui s'avère un meneur d'hommes brillant qui suscite l'admiration des troupes. Denet et d'un caractère plus frivole mais capable d'empathie et de courage au combat. Leur rapport à Monique est très différent. La jeune femme est le dernier élément qui permet à Laroche de ne pas sombrer mais cette mort imminente qui conduit sa vie depuis trop longtemps l'empêche de totalement s'engager auprès d'elle. A l'inverse Denet après une tentative de séduction très désinvolte va se découvrir des sentiments sincères pour Monique, qui troublée de cette sincérité après les attitudes taciturnes de Laroche, va en tomber à son tour amoureuse. Malheureusement un Laroche sans raison de vivre en fait un être plus vulnérable sur le front, ce qui menace la réussite d'une campagne décisive.

Howard Hawks équilibre parfaitement cette dimension intime avec les enjeux guerriers. On trouve éclaté en deux personnages ce mélange de désinvolture et de froide distance toute masculine qui caractérisera un Cary Grant dans Seuls les anges ont des ailes où, pour s'exposer au danger il faut savoir s'astreindre de toute sentimentalité pour accomplir son devoir. Chacune des scènes romantiques obéit à cette dichotomie. La première rencontre sous les bombardements ennemis entre Monique et Denet se dote d'une tonalité triviale et romantique dans le plus pur charme hawksien. Le décalage entre le bruit des bombes et un Fredric March jouant du piano pour une June Lang alanguie est assez saisissant quant à l'inverse, les sobres et poignants adieux de Monique et Laroche avant son départ au front adopte tout une gravité et solennité à la hauteur de l'évènement. Chaque protagoniste masculin apprend à connaître et apprécier l'autre, laissant leur caractère s'imprégner de chacun, poussant l'un vers une plus grande conscience des responsabilités militaire et l'autre vers un lâcher prise plus intime. Denet est ainsi prêt la mort dans l'âme à oublier Monique quand il comprend les conséquences sur le moral de Laroche, et celui-ci est forcé de se détacher de la seule préoccupation militaire quand son propre père (Lionel Barrymore truculent) s'engage clandestinement dans le bataillon.

Tout cela va se jouer dans d'impressionnantes séquences militaires. Hawks fait planer le danger et la mort dans un mélange de noirceur et d'humour dans la caractérisation du régiment, notamment quand ses derniers doivent placidement accepter que les Allemands soient en train d'installer des mines sous leur pieds. Hawks s'inscrit dans les éléments classiques des séquences attendues d'un film sur la Première Guerre mondiale mais trouve son originalité par ce ton où au plus fort du chaos et du danger (impressionnantes scènes d'assaut) un protagoniste truculent trouvera le temps de lancer un bon mot ou d'adopter une attitude décalée. Cela n'empêche pas la mort de frapper, mais nous attache au moindre personnage secondaire grâce à ces brefs apartés qui l'aura maintenu en mémoire du spectateur. 

Le réalisateur sait également soigner les séquences sentimentales où il magnifie totalement la beauté élégante de June Lang, vraie oasis de douceur dans l'enfer ambiant. Les cadrages, certains gros plans saisissants et la photo superbe de Gregg Toland mettent en valeur comme rarement l'actrice qui surnage dans cet environnement de boue, baraquement insalubre et désolation. La conclusion sacrificielle célèbre cet héroïsme faussement machiste mais vraiment pudique où la conscience du devoir doit se prolonger au détriment des aspirations intimes (le leitmotiv du discours empathique et galvanisant repris par un autre personnage en conclusion). 

Sorti en dvd zone 2 français chez Opening

mercredi 22 septembre 2021

Les Amours d'une blonde - Lásky jedné plavovlásky, Milos Forman (1965)

Dans la fabrique de chaussures où travaille Andula, la population féminine est en surnombre, ce qui n'aide pas la jeune fille dans sa quête amoureuse... Jusqu'à ce que le responsable culturel trouve une solution et fasse implanter un cantonnement militaire à proximité pour animer les bals. Et si ce sont tous des réservistes quadragénaires, Andula a la chance de rencontrer le pianiste de l'orchestre...

La Nouvelle vague tchèque naît en partie de la politique du dégel du régime soviétique dont l’étau se desserre avec l’arrivée au pouvoir de Khrouchtchev. Cela contribue à l’épanouissement des arts avec en Tchécoslovaquie les premiers romans de Milan Kundera et donc au cinéma la Nouvelle vague tchèque. Celle-ci s’inscrit dans un courant mondial initié par son équivalent français (et contemporain du Free Cinema anglais, Nouvelle vague japonaise…) et poursuit les mêmes idéaux sociaux célébrant une jeunesse s’affranchissant des aînés, ainsi que les révolutions formelles recherchant un plus grand réalisme. On trouve de cela dans les premières œuvres de Milos Forman libérée du carcan idéologique communiste, qui filme une jeunesse épanouie (l’irruption des concerts et bal rock’n’roll) et rebelle dans le moyen-métrage L’Audition (1963) ou le long L’As de Pique (1963). 

Les Amours d’une blonde se situe dans ce courant mais porte déjà en germe le désenchantement qui mènera au difficile retour sur terre qui mettra fin au Printemps de Prague. Nous suivons Andula (Hana Brejchová), une jeune femme travaillant dans une fabrique de chaussure dans la petite ville provinciale de Zruc. Son quotidien se partage donc entre les journées de travail et les maigres loisirs que constituent les bals où elle fera diverses rencontres masculines. Contrairement à l’évasion que constituaient ces moments dans les précédents films, c’est ici l’ennui morne qui domine et l’on s’amuse de jeux de séduction pathétiques et de silences gênés entre Andula, ses amies et les prétendants. Parmi eux des soldats de passages lourdement insistants mais aussi Milda (Vladimír Pucholt) un séduisant jeune pianiste. 

La volonté d’échapper à ce quotidien terne place Andula sous le joug d’hommes entre le machisme et la muflerie ordinaire, dont tous les efforts de séduction ont pour but de l’attirer dans leur lit. Andula après moults hésitation cède au plus jeune et attirant Milda mais tout dans la mise en scène de Forman (ce magnifique plan sur son dos et corps nu) consiste à en faire dans ces scènes d’amour une victime (bien que le rapport soit consentant) qui s’offre par quête d’affection plus que par désir. Forcément cette nuit d’amour doit dans son idéal mener vers une romance qui lui fera quitter cette existence terne. 

C’est tout le sens de ce plan d’ensemble emblématique la voyant faire du stop la valise à la main pour rejoindre son aimé à Prague. Le simili conte de fée s’arrête pourtant là (initié par le jugement moral régnant au sein des dortoirs de jeunes filles où les comportements « scandaleux » sont pointés du doigt) avec l’accueil glacial et inquisiteur qui l’attends à Prague. Le brio de Forman est d’inscrire ce retour sur terre d’une manière triviale où la drôlerie se dispute au pathétique. Les parents de Milda joués par des acteurs non-professionnels donnent un grand numéro de bougonnerie et d’indignation qui prête à rire d’un côté, tout en rendant la situation de notre héroïne intenable. 

Dès lors les amourettes et loisirs ne constituent que des chemins de traverses qui nous ramènent inéluctablement à notre point de départ. L’intrigue forme ainsi une boucle en démarrant et se concluant dans les dortoirs des travailleuses, les péripéties n’ayant été qu’une illusion et par extension le Printemps de Prague, cette ouverture et ce dégel. Les Amours d’une blonde se trouve à mi-chemin d’un constant qui sera effectif dans Au feu, les pompiers ! (1967) réalisé peu avant l’invasion des chars russes en 1968. 

Sorti en bluray français chez Carlotta

lundi 20 septembre 2021

Via Margutta : la rue des amours faciles - Via Margutta, Mario Camerini (1960)


 Portraits de femmes vivant dans la rue Margutta, à Rome, abritant de nombreux artistes affranchis de toute morale. L’une veut rester une éternelle enfant, une autre plus vieille épouse un bellâtre bon à rien, une troisième se sacrifie à un homme odieux, une dernière tente de sauver son mari du suicide…

Via Margutta est une des dernières réalisations de Mario Camerini, réalisateur talentueux qui sut traverser avec brio les époques et les différentes mues du cinéma italien. Il excelle notamment dans la comédie sentimentale où il exprime tendresse et bienveillance tout en livrant un regard sans fard sur les milieux dépeints. Antifasciste sans être pour autant un cinéaste militant, il s’affranchit à l’image d’un Alessandro Blasetti (contemporain et autre touche à tout d’une longévité et d’un éclectisme impressionnant) de l’idéologie du cinéma de l’ère mussolinienne et fait le pont entre les époques notamment en révélant certains talents comme Vittorio de Sica. A partir des années 50, il accompagne le mouvement du néoréalisme vers le néoréalisme rose, puis de ce dernier pour la comédie italienne. Il dirige ainsi le couple Marcello Mastroianni/Sophia Loren dans le plaisant Par-dessus les moulins (1955), mais accompagne aussi la montée du cinéma de genre avec le péplum Ulysse (1954), se rappelant au bon souvenir de ses débuts où il dirigea un Maciste muet, Maciste contro lo sceicco (1926). 

Via Margutta est une tranche de vie s’attardant sur la communauté d’artistes vivotant dans la rue Margutta à Rome. Ce lieu réunit de tout un vivier d’artistes arrivés à Rome plein d’espoirs et qui, au fil des années piétinent et voient leurs ambitions contrariées. Mario Camerini n’exploite pas tant que cela le quotidien et les déconvenues de ses personnages dans leur cadre de leurs disciplines artistiques respectives (aspirants peintres, acteurs, sculpteurs, chanteurs…) et s’intéresse plutôt à la façon dont leur statut les rend singuliers. On a l’impression de voir une sorte de Les Vitelloni (dont on retrouve l’un des acteurs, Franco Fabrizi dans un rôle très proche) chez les artistes où l’insuccès aurait enfermés les protagonistes dans leur singularité. Pour le plus drôle, cette singularité en fait des adulescents immatures dont on s’amuse des facéties notamment les tentatives de séduction des personnages masculins. Ce temps qui passe sans entrevoir la réussite semble peser plus lourdement chez certains, que ce soit le très torturé Stefano (Gérard Blain) ou Donata (Antonella Lualdi) voyant autant la carrière d’actrice que la volonté de fonder une famille s’éloigner.

La persévérance de chacun reposera sur ce qu’il recherche dans cet accomplissement artistique. La réussite pécuniaire pour Giosué (Franco Fabrizzi) qui abandonne toute prétention dès qu’il sera devenu le gigolo d’une protectrice âgée, la gloire nourrissant son narcissisme pour Stefano… Ce fossé les séparant d'une vie rangée et normale qu'ils fuient explose lors de l'hilarante scène de mariage où nos héros jouent les piques-assiettes et scandalisent par leurs moeurs désinvoltes. La dimension triviale peut néanmoins déboucher sur une certaine émotion quand l’égo s’oublie le temps d’un quiproquo et d’une supercherie pour enfin lier Marco (Spiros Focás) et Marisa, sa femme de ménage secrètement amoureuse. 

L’indolence qu’autorise la voie des arts offre aussi un doux refuge pour le truculent américain Bill (Alex Nicol) totalement dans son élément et définitivement assimilé par son oisiveté toute latine. Mario Camerini alterne ainsi les destinées tragiques de ceux qui ont trop d’attentes et d’égo, celles inattendues de ceux qui se laissent porter par l’instant et l’entre-deux où tout reste ouvert, où l’air les maintient en vie telle Marta (Yvonne Furneaux), éternelle chanteuse de 24 ans. Cela biaise également les relations du groupe où, selon l'ascension de chacun, la camaraderie cède à la rivalité ou à la jalousie comme le montrera une très cruelle scène de réunion finale. La drôlerie  se dispute à la noirceur dans un équilibre qui repose sur le contraste des artistes, de leurs attentes et de leur évolution face à leur réalisation ou pas. C’est le très beau message de la dernière scène, où nos héros observe ému l’arrivée d’un nouveau pensionnaire candide et émerveillé rue Margutta. 

Ressortie en salle cette semaine

vendredi 17 septembre 2021

Cléo de 5 à 7 - Agnès Varda (1961)


 Cléo, belle et chanteuse, attend les résultats d'une analyse médicale. De la superstition à la peur, de la rue de Rivoli au Café Le Dôme, de la coquetterie à l'angoisse, de chez elle au Parc Montsouris, Cléo vit quatre-vingt-dix minutes particulières. Son amant, son musicien, une amie puis un soldat en permission lui ouvrent les yeux sur le monde.

Agnès Varda s’était signalée en éclaireuse de ses amis et collègues de la Nouvelle Vague en réalisant La Pointe courte en 1955. Entre-temps, François Truffaut avec Les 400 coups (1959) ou Jean-Luc Godard et A bout de souffle (1960) avaient attiré la lumière et inscrit la Nouvelle Vague dans le paysage cinématographique français et mondial. Cléo de 5 à 7 bénéficie ainsi de cette aura en étant le premier film vraiment produit d’Agnès Varda (par Georges de Beauregard producteur emblématique de la Nouvelle Vague) après le tournage semi-amateur de La Pointe courte

 Agnès Varda prolonge ici les expérimentations et innovations esthétiques de ses collègues, en mettant en scène cette fois une héroïne et ses états d’âmes. L’unité de temps va permettre en suivant l’errance de Cléo (Corinne Marchand) et l’attente fébrile de ses résultats médicaux, de déployer toutes sortes d’approches formelles pour accompagner son désespoir. Cela frappe dès la scène d’ouverture filmant le tirage de carte de tarot sur la table d’une voyante en couleur. On n’entend d’abord que les voix de Cléo et de la voyante tandis que les cartes et leur interprétation semblent confirmer toutes les angoisses de notre héroïne. L’avenir s’assombrit et l’image bascule alors en noir et blanc pour observer le visage défait de Cléo. Le compte à rebours à commencé d’ici la fatidique échéance de 19h qui rendra son verdict, et entre-temps Agnès Varda suit, indication horaire à l’appui, les pérégrinations de Cléo et les différentes rencontres qu’elle fera.

Seul moyen pour Cléo d’oublier ses maux, se réfugier du monde. Ce sera d’abord un refuge intime dans sa beauté où dès qu’elle scrute son visage dans les reflets de vitres et de miroirs, son visage parfait la rassure un temps. L’isolation fonction neaussi par l’évolution dans son environnement, toujours à l’abri du regard des autres par ses trajets en voiture dans Paris où elle observe le monde de l’extérieur, sans s’y mêler. Ces deux refuges conjugués s’articulent autour des artifices, des colifichets de son allure tel la perruque qui dissimule sa vraie chevelure ou cette ceinture qui étouffe sa taille. Ses proches habitués à ses caprices ne peuvent comprendre sa détresse, que ce soit un amant absent à qui elle n’ose dire la vérité, ou des amis la rassurant par des phrases toutes faites. Dans ces moments-là, Agnès Varda use d’effets de montage cut, ou de transitions en fondus au noir heurtés qui donnent un aspect halluciné adoptant le point de vue de Cléo. Le début du film offre quelques séquences plus amples filmant Cléo à la grue, en plongée pour traduire son élégance et sa confiance lorsqu’elle déambule dans les rues. La caméra à l’épaule tient en partie ce rôle, capturant les regards des hommes admiratifs devant cette belle jeune femme. Mais ce filmage sur le vif fait également ressortir les démons de Cléo, se sentant dévisagée par les passants qu’elle pense deviner son mal. Les tranches de vie parisiennes passe de la veine documentaire à une imagerie hantée.

La séquence fondamentale est celle de la répétition où soudain frappé par les mots d’une chanson, son interprétation poignante est accompagnée d’une mise en scène scrutant à vif ses peurs et sa détresse. Les carcans de la bienveillance forcée mais surtout de l’incompréhension des siens se font trop fort, elle fait sa mue en adoptant sa vraie coiffure et endosse une robe noire plus sobre. Il est temps d’oser se perdre dans le monde, la rencontre avec son amie Dorothée (Dorothée Blanck) et son métier de modèle de nu pour artistes en étant une métaphore explicite. Le film dans le film, cette parodie de film muet (où l’on croise Jean-Luc-Godard, Jean-Claude Brialy, Sami Frey, Anna Karina et quelques autres amis de la Nouvelle Vague) déploie également en accéléré amusé la lumière, l’apaisement et l’amour auxquels aspire Cléo de fort belle manière.  

Cléo vaincra ses peurs par sa rencontre avec Antoine (Antoine Bourseiller). Ce dernier, soldat en permission mobilisé pour l’Algérie, voit également d’une façon différent la mort planer autour de son destin. Cela en fait un confident idéal pour notre héroïne bientôt imprégnée de la placidité et légèreté avec laquelle il accepte son sort. Les effets inquiétants et agressifs s’estompent soudain pour une balade radieuse et élégiaque dans le Parc Montsouris, puis à travers le bus parisien, moyen de transport ouvert sur le monde et les autres plutôt que s’en cachant comme la voiture. Les échanges se font badins, triviaux, profonds dans une atmosphère apaisée et baignée de la photo estivale de Bernard Evein. Rassurée et oubliant enfin de s’apitoyer sur elle-même, c’est au bout du voyage elle qui servira d’ange bienveillant et de raison de survivre à son compagnon. Le film sera un triomphe et installera définitivement Agnès Varda à la table des ténors de la Nouvelle Vague avec notamment le Prix Méliès et le Prix FIPRESCI. 


 Sorti en dvd zone 2 français chez Arte Vidéo et disponible sur Netflix