Dévoreur de pellicule monomaniaque, ce blog servira à commenter pour ceux que cela intéresse tout mes visionnages de classiques, coup de coeur et curiosités. Je vais tenter le défi de la chronique journalière histoire de justifier le titre du blog donc chaque jour nouveau film et nouveau topo plus ou moins long selon l'inspiration. Bonne lecture et plein de découvertes j'espère! Vous pouvez me contacter à justinkwedi@gmail.com, sur twitter et instagram

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mardi 15 juin 2021

Tornade - Passion, Allan Dwan (1954)


 La Californie mexicaine au XIXème siècle. Juan Obreon rentre chez lui après de longs mois à convoyer un troupeau. Découvrant qu'il a un fils de Rosa, sa compagne, Juan projette de l'épouser et de s'installer sur le ranch familial. Mais Don Domingo, le propriétaire terrien, exige qu'on lui cède les terres...

Tornade s’inscrit dans la dernière partie de carrière d’Allan Dwan où il signa plusieurs réussites dans la série B western sous la houlette du producteur Benedict Bogeaus. C’est justement après une brouille sur leur collaboration précédente La Reine de la prairie (1954) que Bogeaus rappelle Dwan à la rescousse sur Tornade alors que le réalisateur choisi ne donne pas satisfaction. Le film est assez précurseur dans sa manière d’introduire le thème de la vengeance pas encore si présent et radical dans le western américain. Des réussites à venir comme The Bravados d’Henry King (1958), Le Dernier train de Gun Hill de John Sturges (1959), Nevada Smith d’Henry Hathaway ((1966) ou encore Josey Wales, hors la loi (1976) en offriront de magnifiques lectures, sans parler de tout un pan du western spaghetti. 

Tornade n’est pas à la hauteur de ces glorieux successeurs mais dispose cependant de plusieurs autres éléments qui détonnent dans le western hollywoodien classique comme le cadre de la Californie encore espagnole et une violence assez prononcée (le massacre de la famille, le héros provoquant ses adversaires au poignard durant sa vendetta). La concision du film (1h20 à peine) est une qualité et un défaut, avec un début très emballant, des personnages parfaitement brossés et une action en place dès les vingt premières minutes. Certaines sous-intrigues assez bâclées (l’amitié entre Cornel Wilde et le shérif joué par Raymond Burr, sa relation avec la belle-sœur) et surtout la conclusion où l’instigateur des méfaits n’est pas puni à l’écran (plus par confusion narrative que volonté de contourner cette thématique de la vengeance) sont assez frustrantes et montre que Dwans n’a pas réussi complètement à redresser une production démarrée sous de mauvais hospices. 

Autre souci : Cornell Wilde, peu coutumier de ce genre de rôle, n’est pas très convaincant en héros vengeur et semble bien lisse dans l’évolution radicale de son personnage. Mais cet aspect se marie assez bien au semblant de morale hollywoodienne servi en guise de conclusion, et apporte une forme d’aura positive et rédemptrice au héros, malgré les tueries qu’il a orchestrées. La logique de série B à formule dessert un peu la trajectoire plus sombre attendu du récit. Sans être désagréable, ce Dwan n’égale donc pas ses grandes réussites de l’époque comme Quatre étranges cavalier (1954) ou Le Mariage est pour demain (1955). 

Disponible en bluray et dvd zone 2 français chez Sidonis

dimanche 13 juin 2021

Laura Antonelli n’existe plus - Philippe Brunel

A la suite du coup de fil énigmatique d’un producteur, le narrateur embarque pour Rome investi d’une obscure mission  : retrouver Laura Antonelli, l’actrice oubliée dont Visconti disait qu’elle fut «  la plus belle femme du monde  ». Il erre dans une Rome caniculaire, traversant les décors mythiques qu’on connaît, à la rencontre des témoins de sa vie tragique. Il épluche les vieux tabloïds et les interviews pour tenter de raconter, sans la trahir, cette femme insaisissable.

Laura Antonelli incarne l’un des destins les plus tragiques du cinéma italien. Auréolé du titre mérité de « plus belle femme du monde » dans les années 70, elle connaît durant cette décennie une ascension fulgurante. Après avoir triomphé au box-office dans des comédies polissonnes mettant sa plastique en valeur, elle démontre peu à peu ses talents dramatiques et collabore avec les plus grands réalisateurs italiens d’alors : Luigi Comencini, Dino Risi, Ettore Scola, Mauro Bolognini ou encore Luchino Visconti. En coulisse, elle sera en couple avec Jean-Paul Belmondo pendant 8 ans. Une terrible déchéance l’attend pourtant, tout d’abord lorsqu’en 1991 elle est arrêtée pour possession de cocaïne et jetée en pâture aux médias dans une instruction à charge.  Pressée par les producteurs de Malizia 2000, suite tardive de son premier grand succès Malizia (1973), elle accepte de se faire faire des injections de collagène pour maintenir l’aura juvénile du précédent film. Elle en fera une réaction allergique qui va la défigurer. Ruinée, traquée par la presse à scandales et escroquée par des « amis » peu scrupuleux, elle va se retirer du monde pour vivre dans le dénuement le plus complet 25 ans durant. Elle disparait dans l’anonymat et la solitude en 2015, les dernières images vues d’elles nous la montrant méconnaissable, hagarde et en surpoids. Elle se fermait aux derniers amis qui cherchaient à lui venir en aide en leur disant un définitif « Laura Antonelli n’existe plus ». 

Entre les visions du temps de sa splendeur et cette sinistre fin, Laura Antonelli sera cependant restée un vrai mystère dont Philippe Brunel va donner son interprétation dans ce captivant ouvrage entre fiction et biographie. L’auteur brode un prétexte pour inciter son personnage principal à marcher sur les traces de Laura Antonelli et dénouer les fils de sa triste destinée en tentant de percer le fameux mystère de sa nature profonde. Philippe Brunel entremêle souvenirs personnels (ce camarade de classe disparu qui était fan de l’actrice qui intervient dans le récit) et évocation de Laura Antonelli, à travers les rencontres et révélations de proches dont elle s’est détachée et qui en révèlent des pans inattendus. Tout cela se fait dans la traversée d’une Rome bercée du souvenir de la grandeur du cinéma italien, où la traversée de différents espaces éveillent le souvenir d’images mythiques. 

Le livre avance au fil des réflexions du narrateur et de son obsession pour Laura Antonelli, alimentée des éléments factuels et médiatiques la concernant, et que chaque rencontre va auréoler d’un regard nouveau. Son enfance instable avec la fuite de sa famille de leur Istrie natale la marque durablement, notamment la communication difficile avec un père taciturne et amputé d’un bras (laissant supposer des accointances politiques douteuses qui explique la fuite du pays). Laura Antonaz devient Laura Antonelli et après un premier métier de professeur de sport, elle va gravir les échelons en posant pour des couvertures de magazines, faisant de la figuration et obtenant des petits rôles jusqu’au triomphe de Malizia. L’aura sensuelle de ce film ne la quittera plus et sera autant une bénédiction qu’une malédiction. Philippe Brunel s’attarde plus sur cette image qu’elle dégage que sur les films en eux-mêmes où, au-delà de sa plastique affolante elle amène un mélange de dérision, de tragédie et de distance pour des classiques comme Ma femme est un violon de Pasquale Festa Campanile (1971), Sexe fou de Dino Risi (1973) ou L’innocent de Luchino Visconti (1976). Brunel interprète ce charme vénéneux comme source de ses triomphes mais future cause de ses problèmes (ironiquement annoncés dans le titre de certains de ses films comme Mon dieu comment suis-je tombé si bas ? de Luigi Comencini (1974) ou Péché véniel de Salvatore Sampari (1974)) lorsque la liberté de mœurs de ses personnages sera l’axe sur lequel s’appuiera la justice et l’opinion publique quand elle sera mise en accusation.

C’est la toute l’ironie d’une Italie acceptant les écarts à l’écran quand ils sont dictés par et pour les hommes (avant le succès les auditions et demandes dégradantes de producteurs seront légion pour Laura Antonelli) mais qui les punit en retrouvant son catholicisme inquisiteur quand ils sont librement exécutés dans la vie par une femme. Assez ironiquement l’auteur met en parallèle l’arrestation « scandaleuse » et l’incarcération de l’actrice pour possession de cocaïne quand le lendemain et pour la même raison Diego Maradona est immédiatement relâché par les autorités argentines à Buenos Aires. Brunel imagine que Laura Antonelli, éduquée dans une stricte foi religieuse qu’elle défia par sa carrière, vit dans ces malheurs comme une punition divine à ses dérapages. Ni la société italienne (quelques captivants passages laissent supposer que son arrestation fut un coup monté « pour l’exemple ») ni le ciel ne semblait lui pardonner sa liberté et en expiation elle vivra en recluse pieuse et à la santé mentale vacillante pour le restant de sa vie. 

Le mystère Laura Antonelli reste cependant entier car cette mélancolie, cet attrait pour l’autodestruction existait en creux même au temps de sa splendeur et les malheurs les activent de manières différentes lors de sa déchéance. Le roman se conclut d’ailleurs en partie sur la réelle entrevue que Philippe Brunel réussit à avoir avec Laura Antonelli, rencontre étrange et forcément décevante face à cette femme meurtrie qui justifie le titre de l’ouvrage. C’est remarquablement écrit, captivant pour le connaisseur de la carrière et destin de l’actrice mais cela peut tout autant intéresser le néophyte qui ira forcément creuser plus loin après sa lecture. Philippe Brunel ancien journaliste à L’équipe et célébré pour son livre Vie et mort de Marco Pantani sait assurément équilibrer son style entre le mythe et l’intime dans une écriture ciselée.

Disponible chez Grasset

vendredi 11 juin 2021

Super 8 - JJ Abrams (2011)


Été 1979, une petite ville de l'Ohio. Alors qu'ils tournent un film en super 8, un groupe d'adolescents est témoin d'une spectaculaire catastrophe ferroviaire. Ils ne tardent pas à comprendre qu'il ne s'agit pas d'un accident. Peu après, des disparitions étonnantes et des événements inexplicables se produisent en ville, et la police tente de découvrir la vérité, une vérité qu'aucun d'entre eux n'aurait pu imaginer.

Installé depuis longtemps dans le milieu hollywoodien en tant que producteur et scénariste (Forever Young, Armageddon),JJ Abrams accède à la notoriété avec la création des séries Felicity et surtout Alias, narrant les aventures mouvementées de l’agent secret Sidney Bristow. C’est ensuite avec Lost qu’il confirmera les promesses pour ce qui sera la série phénomène des années 2000. D’un postulat faussement simpliste (les rescapés d’un crash sur une île déserte), la série s’élève à des hauteurs insoupçonnées, où une intrigue tortueuse nous promène dans tous les genres et se permet les audaces narratives les plus folles. Une des clés de ses différentes réussites est également la science d’une communication savamment orchestrée. Elément qui montrera ses limites lors de son passage au cinéma.

En 2006 en effet, Tom Cruise en personne convoquera Abrams pour mettre en scène le troisième volet de la franchise Mission : Impossible. La déception est de taille tant les qualités d’Abrams se transforment en terribles défauts dans ce passage du petit au grand écran. L’artificialité de la narration ne reposant que sur des astuces de scénariste et l’efficacité de l’instant se fait criante et ne fonctionne que le temps d’un pré-générique mémorable, l’intrigue se révélant par la suite terriblement creuse. Là où John Woo avait contourné un script indigent par sa virtuosité dans le deuxième volet, Abrams se révèle incapable de donner l’ampleur souhaitée à ses scènes d’action, leur conférant un chaos non maîtrisé qui culmine lors de l’illisible évasion du méchant, pourtant spectaculaire sur le papier. L’intérêt croissant pour les séries offrira paradoxalement bonne presse au film pour ces même raisons : avoir transposé les codes tv au cinéma, mais malheureusement sans les adapter à ce médium tout différent.

Abrams corrigera une partie de ses failles lorsqu’il se chargera de relancer la saga Star Trek. L’esprit bien plus « serial » du célèbre space opera convenant bien mieux à la patte Abrams qui, tout en respectant l’esprit et les codes de la série, lui offre un lifting mémorable. Le script malin s’inscrit dans l’esprit ludique à rebondissements qu’affectionne Abrams, mais la mise en scène s’avérait à nouveau très limitée lors des morceaux de bravoure et indigne des moyens alloués. A l’inverse, sa production Cloverfield en mettait plein la vue, avec son Godzilla revu et corrigé à la sauce Blair Witch, mais l’art du buzz d’Abrams montrait ses limites par un récit indigent et bourré de facilité, puisque transposant une simple intrigue soap (un homme cherche à se réconcilier avec sa fiancée et la retrouver) dans un cadre spectaculaire, sans l’élever.

Avec Super 8, la phase d’apprentissage d’Abrams semblait terminée et on pouvait enfin attendre de lui une approche réellement cinématographique. Le film est la fusion de deux projets différents, l’un intimiste sur des adolescents des seventies réalisant des films en Super 8 et l’autre, plus spectaculaire, imaginant un déménagement de la fameuse Zone 51 qui tourne mal. Les film vue s’équilibre parfaitement entre ces deux options, notamment l’introduction entre présentations des jeunes protagonistes et mystères autour de la créature extraterrestre. Il ne manque que le logo Amblin’ pour définitivement appuyer la patine 80’s de la chose, et pour cause, Spielberg est à la production. Un appui de poids qui semble inspirer Abrams puisque, tant dans le jeu parfait du jeune casting que dans le mélange d’intime et de fantastique plane l’ombre du réalisateur d’ET (1982) et du producteur des Goonies (1985.

On sent pourtant poindre la patte d’Abrams dans la difficile relation du héros et de son père après la perte récente de sa mère, qui n’est pas sans rappeler celle entre Sidney Bristow et son géniteur dans Alias. Abrams exprime ce fossé le temps d’une courte scène de dialogue tout en non-dits d’une belle subtilité. L’aspect le plus personnel réside dans les séquences ludiques montrant les adolescents en action pour tourner leur film. Là encore, les portraits sont croqués avec tendresse et humour dans une scène limpide qui esquisse une jolie amourette adolescente. Le point le plus intéressant semble également être la mise en scène d’Abrams, enfin au diapason. Le déraillement de train qui voit s’échapper la créature est un sacré morceau de bravoure que des cadrages amples et des mouvements virtuoses rendent terriblement efficace, les héros dévalant autour des débris s’écroulant sur eux. 

Enfin, la furtive attaque de la créature dans une station-service porte indéniablement la marque de Spielberg par sa lente montée en puissance, l’humour latent (qui ne désamorce par l’angoisse) étant dû à Abrams et définissant bien l’objectif du film. C’est néanmoins dans la partie intimiste que l’émotion fonctionne pleinement, la dimension spectaculaire étant un peu trop référentielle au fil de l’avancée du récit. On aurait préféré que Super 8 assume de pencher davantage vers la mélancolie du Stand by me de Rob Reiner (1986) plutôt que la pyrotechnie finale (où l’on peine à ressentir quelque chose pour la créature) car Abrams est sans doute contraint par son image d'entertainer, mais dans l’ensemble c’est tout à fait digne des meilleurs divertissements des 80’s. Sans doute le meilleur film de JJ Abrams, même s’il semble avoir été éclipsé par le succès de la série Stranger Things par la suite, nourrie des mêmes influences dans une veine plus feuilletonesque.

Sorti en bluray et dvd zone 2 français chez Paramount

mardi 8 juin 2021

Les Exilés romantiques - Los exiliados románticos, Jonas Trueba (2015)

Une fourgonnette, l’été devant soi et une envie de dévorer des kilomètres... soit les parfaits ingrédients d’un road movie alternatif entrepris par trois amis trentenaires en mal d’aventure. Sur fond de musique folk signée Tulsa, le trio s’arrête à Paris, Toulouse et Annecy, à la recherche d’amours éphémères et idylliques.

Quelques années avant son récent et magnifique Eva en août (2020), Jonas Trueba nous proposait déjà une belle errance estivale, romantique et existentielle avec Les Exilés romantiques. On trouve déjà là un récit à la narration volontairement lâche, ici avançant au rythme des pérégrinations d’un trio d’amis voyageant entre l’Espagne et la France. Luis (Luis E. Parés), Vito (Vito Sanz) et Francesco (Francesco Carill) sillonnent donc les routes à bord de leur fourgonnette orange, entre indolence et rires potaches. Sous la langueur apparente, le récit se structure à travers les villes et les rencontres que chacun des personnages va y faire, entre Toulouse, Paris et Annecy. Chaque étape correspondra à des retrouvailles amoureuses (effectives ou espérées) qui correspondront à un certain questionnement sur le passage à l’âge adulte, les responsabilités, la quête amoureuse. 

La très courte durée du film (un peu plus d’une heure) rend chacun de ces moments très fugaces, participant à l’inconséquence et aux atermoiements des personnages sans s’appesantir outre mesure. Ce ne sera qu’au fil des situations, interactions et bribes d’informations glanées au détour d’un dialogues que les petits manques de chacun se révèleront. Ainsi Francesco retrouve à Toulouse Renata (Renata Antonante), jeune femme amoureuse de lui mais avec laquelle il ne se résout pas à entamer une relation plus sérieuse. On devine un certain narcissisme et une habitude de se dissimuler sous un mal-être factice pour fuir les attentes, ce que Jonas Trueba laisse transparaître en situation lorsqu’il interprète à sa façon une lecture commune, mais aussi par le regard de ses amis qui ont l’habitude (et regrettent) de le voir se comporter ainsi face à ses petites amies. 

Plus tard ce seront les retrouvailles parisiennes entre Luis et Isabelle (Isabelle Stoffel), où cette fois la quête de stabilité un peu bohème de la jeune femme (qui souhaite devenir mère) se heurte à la fuite en avant de l’éternel étudiant Luis englué depuis des lustres dans sa thèse. Là encore l’éternelle post adolescence est un refuge, une manière de prolonger une jeunesse qui commence à nous échapper. Cette éternelle candeur s’incarnera avec Vito qui renoue avec une Française et amour d’un été (Vahina Giocante) à laquelle il vient faire une aussi touchante que maladroite déclaration d’amour. La réaction embarrassée de cette dernière annonce d’emblée l’échec de la tentative, qui donne un moment aussi poignant qu’embarrassant. Cette fois c’est le pragmatisme de l’âge adulte (la distance géographique qui rend difficile une vraie relation) qui vient briser les espoirs romantiques de Vito. 

Jonas Trueba ne fige aucun des protagonistes dans leur perspectives initiales, mais ne fait néanmoins pas reposer leur évolution sur une grand révélation, un aspect plus dramatique. Ce sont tout simplement les moments passés ensembles, les gestes furtifs et les regards tendres qui font changer les comportements initiaux. Le réalisateur travaille cette tendresse assumée avec pudeur, filmant chaque rapprochement à distance, dans des plans d’ensemble où le romantisme naît du décorum de chacune des villes et en illustrant l’accomplissement (le baiser et/ou les paroles douces échangées) et l’espoir (le regard des deux autres amis heureux et implicitement en attente d’un même bonheur) au sein de la même image. 

Même l’échec de Vito sera une forme de soulagement d’avoir ouvert son cœur et Trueba réunit alors l’ensemble de ses protagonistes libérés de leurs entraves intimes comme sociétales (le dernier dialogue sur le test de Bechdel) pour saluer leur communion le temps d’une baignade dans un magnifique panorama d’Annecy. Toutes les qualités qui brilleront dans une matière plus étirée et maîtrisée dans le futur Eva en août (la bande-son folk, le côté hors du temps notamment lorsque l’amorce d’une discussion politique est évacuée) s’expriment déjà là de fort belle manière. 


 Sorti en dvd zone 2 français chez Arizona Distrib en bonus du dvd de "Eva en août"