Dans la petite ville de Silver Lode, le jour de son mariage, Ballard est accusé de meurtre par quatre cavaliers inconnus, dont l’un, nommé Ned Mac Carthy se dit « federal marshall ». Progressivement, Ballard, au départ largement soutenu par la population de Silver Lode, voit ses appuis se défaire, ses amis douter puis se retourner contre lui. Une chasse à l'homme s'ensuit.
Réalisateur phare
du cinéma Hollywoodien au temps du muet, Allan Dwan vu son prestige lentement
s’étioler à l’arrivée du parlant. Revenu en fin de carrière à des productions
plus modestes, le cinéaste retrouvera un regain d’intérêt auprès des cinéphiles
lorsqu’il intégrera la RKO déclinante pour collaborer avec le producteur Benedict
Bogeaous et signer quelques série B modestes par leur budget mais grande par
leur ambition comme le film noir Deux Rouquines dans la bagarre (1954). Silver
Lode est la première œuvre de cette nouvelle ère et un des westerns majeur
des années 50. Le film sort au moment où le maccarthysme bat son plein avec
cette chasse aux sorcières jetant un voile de paranoïa aux Etats-Unis et
notamment à Hollywood où nombres de carrières seront brisées et contraindront
certains artistes à l’exil.
Une atmosphère retranscrite dans un contexte de western de
manière magistrale. Dan Ballard (John Payne) est un concitoyen admiré et
respecté de la ville de Silver Lode et en ce 4 juillet jour de fête nationale
s’apprête à épouser la fille de l’homme le plus riche de la ville. Quatre
sinistres individus vont pourtant interrompre les festivités avec à leur tête
l’agent fédéral McCarthy (Dan Duryea) porteur d’un mandat d’arrêt contre Dan
pour meurtre et vol. La victime n’est autre que le propre frère de McCarthy qui
y met une abnégation toute personnelle où l’on devine que le transport jusqu’au
lieu de jugement tournera court pour notre héros. Les amis proches de Dan le
défendent aussitôt, mais l’opprobre est jetée et avec cette accusation son
image souillée auprès des habitants de la ville se souvenant alors qu’après
tout ils ne le connaissent que depuis deux ans et son installation en ville.
Les manigances d’un McCarthy en quête de vengeance et la tournure dramatique
des évènements où tous semble accuser Dan retourne ainsi la situation contre
lui avec une population méfiante, hostile puis assoiffée de sang qui le
traquera impitoyablement dans la dernière partie.
La population symbolise bien sûr le peuple américain
malléable, suspicieux et capable au gré de la propagande de soudainement
accuser et trahir son voisin, ami ou collègue par simple peur de l’autre. Dan
Duryea est terrifiant en méchant assoiffé de vengeance incrustant cette peur au
sein des habitants comme un virus mortel. En le nommant carrément McCarthy, le
script ne se cache même pas de l’analogie au fameux sénateur chasseur de rouge
et les élans inquiétants et psychotiques d’un Duryea aux yeux fous en disent
long sur l’équilibre précaire et le peu de fiabilité sur ce marshall/censeur
peu recommandable. Loin de ne mettre la situation que sur le personnage de
McCarthy, Dwan nous signifie à plusieurs reprise que ce dernier ne fait au bout
du compte que réveiller les rancœur des concitoyens de Silver Lode pouvant
alors donner libre cours à leur haine et jalousie envers cet étranger ayant
réussi sur leur terre et épousant le meilleur parti de la ville.
Ils sont
représentés comme une foule indicible se parant de morale (les femmes
distinguées) ou de justice et vengeance (les hommes rustres et brutaux) pour
s’abandonner à leur bas-instincts envers un innocent. Le fait que le récit se
déroule un juillet est d’une cinglante
ironie, cette fête nationale américaine synonyme d’entraide et de rassemblement
ayant cours au moment où s’exprime le pire de l’âme humaine et de ces
américains. Au contraire les plus fidèles et clairvoyant seront ceux habitués à
ces regards hautain et au rejet comme la prostituée jouée par Dolores Moran.
Tout cela est rondement mené par un Allan Dwan développant
toute ces thématiques tout en délivrant un spectacle tendu et alerte en à peine
plus d’une heure. Le postulat évoque grandement Le Train sifflera trois fois de
Zinnemann mais où malgré sa noirceur il suffisait à la fin pour Gary Cooper et
Grace Kelly l’espoir de se reconstruire ailleurs que dans cette ville de lâche,
Ballard ne quittera pas lui le lieu du drame. Nul refuge dans cette Amérique du
doute et de la peur, et après avoir constaté le soutien de ses
« amis » on devine Ballard se tenir à l’écart de la communauté pour
au bout du compte une célébration d’un violent individualisme plutôt qu’une
idéologie collective et viciée.
Sorti en dvd zone 2 français chez Carlotta
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