À Acireale dans la
province de Catane en Sicile, années soixante. Le marchand de vêtements Ignazio
La Brocca, veuf avec trois enfants, prend une nouvelle bonne à tout faire,
Angela, qui débute le jour même de l'enterrement de sa femme. Ignacio constate
au fil des jours qu’Angela assure un service épatant. Nino, dans les quatorze
ans, tombe profondément amoureux de la jeune femme mais constate aussi les
intentions de son père et n’a alors de cesse d’essayer de les entraver.
Malizia fut le
film qui fit définitivement de Laura Antonelli une star. L’actrice y définit sa
persona filmique plus complexe que la seule image sexy à laquelle on pourrait
la réduire. Laura Antonelli par la candeur virginale de son visage et les
formes provocantes de sa silhouette parvient ainsi à être dans ses
interprétations tout à la fois un fantasme soumis au désir masculin, une âme
innocente surprise par son propre désir et enfin une véritable partenaire de
jeu érotique assumant ce désir. Ainsi dans l’excellent Ma Femme est un violon de Pasquale Festa Campanile, elle incarne
une ménagère subissant, accompagnant et s’amusant des jeux voyeuristes de son
époux dans un équilibre ne tenant qu’à cette espiègle innocence. Dans cette
idée Luigi Comencini saura tirer de l’actrice le meilleur dans Mon Dieu, comment suis-je tombée si bas? (1974), où elle symbolise la volupté entravée puis furieusement libérée de la
bourgeoisie sicilienne dont elle défie l’archaïsme. Il en va de même chez
Visconti avec L’Innocent (1976) où
Laura Antonelli incarne l’humanité surmontant les préceptes figés de l’écrivain
Gabriele D'Annunzio.
Laura Antonelli ravive donc la pulsion machiste ordinaire et
plus spécifiquement rattachée à la société italienne, définit la libération des
mœurs sexuelle des 70’s mais aussi l’émancipation féminine dans ses fantasmes
assumés. Toute cette identité contradictoire de Laura Antonelli est contenue
dans Malizia. La jolie servante
Angela (Laura Antonelli) est ainsi le miroir des désirs de cette famille d’hommes
ayant vu fraîchement disparaître leur seule présence féminine avec cette mère
décédée. Pour le père Ignazio (Turi Ferro) c’est la possible amante et l’espérée
épouse qui viendra remplacer la maîtresse de maison disparue. Pour le fils aîné
et jeune adulte Antonio (Gianluigi Chirizzi) ce n’est qu’une belle plante à
posséder par les approches les plus rustres qui soient tandis que le benjamin à
la langue bien pendue Enzino (Massimiliano Filoni) y voit une présence
maternelle retrouvée – la tendresse avec laquelle Angela s’évertue à ce qu’il
ne fasse plus pipi au lit.
La relation au cœur du film est celle entre le fils cadet et
adolescent Nino (Alessandro Momo) et Angela. Le jeune homme en construction
sentimentale et découverte de son désir manifeste pour Angela un sentiment
romantique naïf et typiquement adolescent (les roses qu’il dépose dans la poche
de sa blouse quotidiennement), et la matérialisation d’un fantasme ludique
et/ou explicitement machiste. Si toutes les interactions entre Angela et les
autres figures masculines rend ces dernières clairement libidineuses (Antonio
et son père se rinçant l’œil chacun de leur côté sous la robe d’Angela faisant
le ménage), Nino semble surtout incertain dans sa manière d’exprimer ce qu’il
ressent pour Angela. La touchante maladresse initiale en fait un chevalier
servant face aux assauts des autres, mais ses propres pulsions (les photographies
sexy qu’il collectionne, les échanges verbaux assez crus avec ses camarades de
classes) et la jalousie de l’amoureux frustré le font à son tour céder à cet
élan machiste. Toute la différence se fait avec ce que renvoie la prestation de
Laura Antonelli, proie mais certainement pas victime sachant se rebiffer face
aux regards insistants et mains baladeuses des uns et des autres.
Le contrepoint du personnage du père entravé par la religion où l’autorité
maternelle pour assouvir son désir montre ainsi la relation Nino/Laura comme un
vrai espace de liberté face aux adultes encore soumis aux institutions. La
question se pose sur l’interprétation à faire entre rêve et réalité quant à la
nature de ce rapprochement, ambiguïté manifeste dans la splendide scène d’orage
nocturne démarrant comme un thriller pour finir dans un vertige érotique aussi
sobre que vénéneux.
L’ultime regard entre Nino et Angela trahit ainsi une
complicité, une intimité qui ne semble pas feinte. Salvatore Samperi réussit
tout cela sans tomber dans une quelconque vulgarité et parvient à offrir un coming of age troublant en diable. Le
film sera un immense succès qui amènera à réunir la même équipe (Salvatore
Samperi, Laura Antonelli et Alessandro Momo) dans Péché véniel. Un revival sera même tenté en 1991 avec un Malizia
2000 qui vaudra des déboires irréversibles à Laura Antonelli.
Uniquement disponible en dvd et BR italien et espagnol
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