Dans un village reculé
de l'Italie du Sud, La Lupa (« La Louve »), une femme à l'attitude et aux mœurs
libres, fascine et attire maris et fils qui ne peuvent lui résister. Pourtant,
elle s'éprend tout particulièrement de Nanni qui cultive l'olivier et qui souhaite
plutôt épouser la fille de celle-ci, Maricchia. Sur les instances de sa mère,
Maricchia se marie avec Nanni. Mais, « la Louve » rôde toujours autour de ce
dernier, au grand désespoir de Maricchia, sa fille.
Alberto Lattuada signe avec La Louve de Calabre l’adaptation d’une nouvelle de Giovanni Verga
où il trouvera matière au pan le plus charnel de son œuvre. Les terres d’un
village reculé du sud de l’Italie (l’austérité du cadre laisse supposer sans la
nommer que l’on se trouve en Sicile) révèlent ainsi drame tournant autour d’un
désir à la fois coupable et libéré. « La Louve » (Kerima) est une
femme mûre dont la soif de liberté se conjugue à l’assouvissement de ses désirs
charnels. Cette indépendance repose sur le pouvoir que lui confère ses charmes
sur les hommes du village et dont elle use plus qu’à son tour.
La Louve par son allure languide et provocante est ainsi une
figure émancipée et moderne en décalage avec les environnements et mœurs moyenâgeuses,
provoquant la jalousie et la malveillance des autres femmes. Le problème
surviendra par l’habitude d’user de ces charmes comme instrument de pouvoir à
des fins viles et narcissiques le plus souvent, notamment quand elle met à rude
épreuve les sens de don Pietro (Mario Passante) patron de l’usine du village.
La Louve ne se résume plus ainsi qu’à cette présence tentatrice (il est
largement supposé que nombres d’hommes du village ont cédés en échange de
divers services) et à une toute puissance ne pouvant être contrariée. Le drame
se noue ainsi lorsque sa fille Maricchia (May Britt) tombe amoureuse du même
homme que sa mère avec le viril Nanni (Ettore Manni).
La présence virginale,
innocente et juvénile de Maricchia s’oppose ainsi à la présence provocante de
sa mère dans un triangle amoureux en huis-clos particulièrement tendu. Lattuada sait capturer les jeux de regards et de corps
assurés et tentateur de la Louve, happant l’attention d’un Nanni soumis à ses
pulsions charnelles. Le réalisateur fustige par le comportement de la Louve non
pas pour sa liberté de mœurs mais par sa malveillance morale et égoïste. La
satisfaction ne repose pas sur le rapprochement, mais sur la domination et
supériorité que sa sensualité lui confère par rapport aux autres.
Sans égale
face aux autres femmes du village, la blessure est narcissique pour la Louve
quand on lui préfère une rivale qui s’avère être sa fille. May Britt s’avère un
peu trop pleurnicharde pour constituer une antagoniste intéressante et c’est
bien la présence sulfureuse de Kerima qui fascine, ses formes se confondant au
panorama montagnard dans les compositions de Lattuada. A la fois humaine dans l’affichage
sans fard de ses charmes et détestable par l’usage qu’elle en fait, c’est une
figure tragique ne pouvant survivre dans ce cadre binaire. Les montées de
chaleurs charnelles parsemant le film trouvent ainsi leurs réponses dans un
final apocalyptique où leur désir interdit peut se consumer, littéralement.
Visible en ce moment dans la rétro Alberto Lattuada à la Cinémathèque française
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