Rob Gordon tient à Chicago une boutique de
disques fréquentée par des amateurs de vinyles, d'albums rares et
ésotériques des années soixante et soixante-dix. Sa vie entière est
placée sous le signe de la pop. C'est en elle qu'il puise le courage
d'affronter le quotidien, c'est elle qui l'accompagne depuis toujours
dans ses tribulations sentimentales et donne un sens à son existence.
Après avoir enduré moult ruptures, Rob est une fois de plus plaqué. Il
s'efforce de comprendre les raisons de ce nouvel échec. Il décide de
relancer ses ex pour trouver la clé de l'énigme.
Stephen Frears adapte avec High Fidelity le cultissime roman éponyme de Nick Hornby. Deuxième livre d'Hornby, High Fidelity forme avec Carton jaune et À propos d'un gamin une sorte de trilogie sur l'immaturité du trentenaire masculin. Avec Carton jaune (qui connaîtra deux adaptations) et High Fidelity,
Hornby centrait une partie des problèmes de ses héros autour de leurs
passions pour le football et la musique qui sont également celles de
l'auteur et revêtent donc une grande part autobiographique. Stephen
Frears avait apprécié le livre sans en être non plus un grand admirateur
et c'est grâce à la volonté de John Cusack et du scénariste D.V.
DeVincentis, tous deux dingues de musiques, que le projet verra jour.
Le
film perd un peu de la spécificité du livre en transposant l'intrigue
de l'Angleterre aux Etats-Unis et plus précisément de Londres à Chicago.
La grisaille londonienne sied mieux au moment de spleen de Rob (John
Cusack) et malgré une volonté évidente de montrer un Chicago plus
interlope (une seule séquence révèle réellement l'urbanité de la ville)
on ressent tout de même qu'un certain esprit s'est perdu en route. De ce
choix découle aussi une bande-son chiadée (The Velvet Underground,
Bruce Springsteen, Aretha Franklin) mais plus attendue et moins au
centre du récit (le légendaire passage où Rob se trouve face une épouse
aigrie bradant la collection de rêve de son mari volage sera tournée
mais coupée au montage). Stephen Frears ne parvient pas à traduire par
un film réellement "musical" le côté obsessionnel de son héros (les
fameux tops 5 musicaux divers et variés du livre sont amenés de façon
quelconque ne suscitant pas la même jubilation que pour le lecteur
mélomane) et s'appuie plutôt sur l'étude de caractère à travers la
géniale interprétation de John Cusack.
L'acteur offre un hilarant
patchwork de tares masculines en se montrant tour à tour jaloux, de
mauvaise foi, imbu de lui-même ou pathétique d'auto-apitoiement. Le fil
rouge sera le souvenir de ses cinq plus douloureuses ruptures pour
atténuer celle de sa plus récente avec Laura (Iben Hjejle) dont il peine
à se remettre. Montage dynamique et astucieux accompagne des monologues
rompant le quatrième mur pour dresser le caractère autocentré de Rob
dont la passion musicale aura toujours constitué un refuge/prétexte face
à la réalité (la manie de reclasser ses vinyles après une rupture
amoureuse) et empêché d'avancer.
Frears met au cœur du récit cet aspect
en interrogeant l'obsession musicale de Rob comme cause ou conséquence
de ses déboires, les moments embarrassants avec Laura se conjuguant aux
hilarantes scènes en magasin avec les deux acolytes Dick (Todd Louiso)
et Barry (Jack Black révélation du film qui comporte ce degré de folie
et d'outrance qui manque au reste). Là encore la dimension musicale
reste en surface et prétexte comique quand tous les moments intimistes
fonctionnent parfaitement, l'agitation de John Cusack étant
contrebalancée par la résignation silencieuse d'une excellente Iben
Hjejle.
L'universalité recherchée par Frears en fait un modèle de
comédie romantique subtile mais fait perdre une partie de l'humour et
du sens du rythme inhérent à la geekerie musicale (malgré quelques éléments comme la compilation cassette) contenue dans
l'écriture de Nick Hornby. Un film attachant et agréable mais à
l'identité moins forte que son modèle papier (Carton jaune
(1997) sur un scénario de Nick Hornby était plus équilibré entre
l'intime et univers des footeux) pour toucher au plus grand nombre. Détail amusant alors que le contexte du film tendait à être désuet les années suivantes, il redevient vivace avec le nouvel essor du vinyle et l'objet physique.
Sorti en bluray et dvd zone 2 français chez Touchstone et le roman est édité aux éditions 10/18
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Je n'ai pas lu le bouquin d'Hornby, mais c'est avec ce film que j'ai découvert l'acteur Jack Black, qui compose ici un personnage de vendeur ultra pointilleux (au point de refuser de vendre un disque à un client qui décrète t'il: ne le mérite pas ! ha ha ), les meilleurs moments d'ailleurs sont les scènes dans la boutique, c'est souvent hilarant.
RépondreSupprimerIl faut vraiment lire le livre qui est bien meilleur. j'aime bien le film mais en le voyant j'ai le sentiment qu'on pourrait facilement remplacer la passion musicale du héros par autre chose (les livres, les timbres ou autres) sans que ça ne bouleverse son déroulement général. Le livre à l'inverse ne pouvait être écrit que de cette façon dans sa description de l'obsession musicale du personnage. Vraiment à lire si tu en a l'occasion c'est autre chose !
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