Un groupe d'adolescents s'arrête dans une station-service en sortant de discothèque. À la suite d’une bagarre, le personnel en service est tué par le groupe. Toute une nuit, ils jouent au chat et à la souris avec la police.
Yim Ho est un des réalisateurs piliers de la Nouvelle Vague hongkongaise dont il pose les bases avec The Extras (1978). Cependant les grands films (reconnaissance publique et critique, récompense prestigieuse locale et en festival) du réalisateur se feront en dehors de ce courant, à travers le magnifique récit de « retour au pays » Homecoming (1984), la fresque historique Red Dust (1990), le drame The Day the Sun Turned Cold (1994) ou encore The Sun Has Ears (1996). Avant cela, Yim Ho va connaître un passage plus difficile après le coup d’éclat de The Extras, notamment lorsqu’il va engager une collaboration compliquée avec le studio Golden Harvest. Il va y réaliser la comédie adolescente Wedding Bells, Wedding Belles (1981) qui sera un échec commercial, puis entamer le tournage d’un projet plus personnel mais dont la production sera interrompue. Entre ces deux expériences mitigées, il signe pour le studio l’étonnant The Happenings.
Le postulat suit le temps d’une nuit un groupe de jeunes gens à la dérive, embarquée dans une spirale de violence avec le braquage maladroit d’une station essence car il n’avait pas assez d’argent pour régler la note. Le film est voisin dans son argument de deux autres sommets de la Nouvelle Vague hongkongaise sortis la même année, L’Enfer des armes de Tsui Hark et Nomad de Patrick Tam à là aussi des circonstances malheureuses mènent des jeunes désœuvrés dans une escalade de violence. Tsui Hark choisit la voie d’un nihilisme radical dans son film, tandis que le spleen papier glacé de Patrick Tam capture l’ennui d’une jeunesse dorée qui va se perdre dans une conclusion brutale. Dans The Happenings, Yim Ho prend une voie intermédiaire, oscillant entre le ton enjoué de ses comédies adolescentes et un côté plus sombre et imprévisible.La veine teenage est dans un premier temps la plus agaçante même si remarquablement mise en scène, lors des premières scènes où l’on découvre le groupe de personnages débordant d’énergie hystérique et de comportement infantile lors de scène de boite de nuit bariolée. Quelques prémices du désastre à venir se devinent dans les dialogues et situations, trahissant la superficialité des protagonistes. Des garçons discutant de la manière de draguer deux filles qui leur plaisent embrayent sur l’éventuel projet de les mettre sur le trottoir et devenir leur maquereau pour gagner de l’argent facile. Ces deux mêmes filles qui vont se ruer vers un jeune rédacteur de magazine de mode arrivé dans la boite de nuit, dans l’espoir d’un raccourci vers la célébrité et la belle vie. Si tout cela paraît inoffensif dans le cadre de ce club de danse, cette mentalité douteuse se propage à l’extérieur, Yim Ho faisant un montage alterné entre les pistes de danses et l’extérieur où l’un des amis vole une voiture, concrétisant par les actes ce que l’on a entrevu par les mots.Ensuite la virée du groupe d’amis va virer au cauchemar, à cause de hasards malheureux en apparence mais tous provoqués par cette quête de facilité, cette immaturité et inconscience. L’interprétation est très bancale et surjouée, l’émotion passant plus par la mise en scène que par des acteurs trop dans le surjeu pour être attachant malgré quelques situations se prêtant au drame. D’un côté ce chaos permanent joue pour le film et trahit l’inconséquence des personnages, mais de l’autre ce côté agité brasse beaucoup de vent sans la moindre accalmie. Yim Ho filme une Hong Kong nocturne de ces environnements les plus hédonistes et tapageurs jusqu’à une descente aux enfers dans les quartiers les plus sordides et reculés où le groupe doit désormais se cacher. Il confronte l’égoïsme des personnages (capables à tout moment de s’invectiver et se trahir entre eux) aux conséquences toujours plus catastrophiques de leurs actes dans une escalade apocalyptique qui culmine dans un final qui justifie à lui seul la vision du film. Piégés sur le toit d’un immeuble et encerclé par la police, le groupe de héros sème la mort et la violence aveuglément dans un pur instinct de survie, le tout filmé avec une furie barbare par Yim Ho, lorgnant sur la conclusion dantesque du pourtant postérieur Le Bras armé de la loi (1984). Donc assez inégal (surtout comparé au Patrick Tam et au Tsui Hark) mais sacrément électrisant, et surprenant vu que le talent de Yim Ho s’épanouira dans des eaux plus apaisées à l’avenir.Sorti en dvd hongkongais chez Fortune Star