Dan Kehoe, un aventurier qui vient d'arriver à Touchstone, une petite ville de l'Ouest, apprend qu'une certaine Ma McDade, propriétaire d'un ranch voisin, accueille les visiteurs à coups de fusil. Quelque temps auparavant, les quatre fils de celle-ci ont été pourchassés par le shérif et ses hommes après avoir dévalisé une banque. Trois d'entre eux ont péri carbonisé dans l'incendie de la grange où ils s'étaient retranchés. Le quatrième s'est enfui, mais nul ne sait lequel a survécu. Et les quatre veuves sont restées auprès de Ma en attendant que le survivant vienne récupérer le magot que sa mère a enterré quelque part....
Raoul Walsh signait un western des plus atypique avec The King and Four Queens où toutes les facettes les plus récurrentes et attendues du genre sont absentes : action, fusillade, notion de voyage... Tout commence pourtant de formidable et trépidante manière le temps d'une saisissante course poursuite d'ouverture où Clark Gable tente d'échapper à des poursuivants dans le désert. Walsh déploie toute sa maestria visuelle, entre une énergie saisissante dans le surgissement des cavaliers au galop, le sens de l'espace fabuleux un décor naturel qui se révèle avec une la limpidité exemplaire et virtuosité avec ce morceau de bravoure où Gable dévale une colline à cheval en un plan. Après cette saisissante entrée en matière, c'est un tout autre film qui commence pourtant.
Notre fugitif Dan Kehoe (Clark Gable) apprend l'existence d'un magot dont il n'est séparé que par une vieille femme revêche et quatre charmante jeune femmes, respectivement mère et épouses d'un gang décimé ayant dissimulé leur butin dans la ferme. Kehoe va donc devoir jouer de roublardise et de séduction pour arriver à ses fins, devant autant amadouer la matrone à la poigne de fer que séduire les belles filles sur lesquelles elle veille jalousement avec cette formidable idée de script laissant le doute sur celle étant veuve. Les "quatre reines" ont des personnalités fort différentes entre la cynique et calculatrice Sabina (Eleanor Parker), l'écervelée et sexy Birdie (Barbara Nichols), l'innocente Oralie (Sara Shane) et la vénéneuse Ruby (Jean Willes). Walsh instaure une ambiance cynique (toutes ces dames restant là dans l'espoir de trouver le magot) et érotique à la fois, les jeunes femmes n'étant pas insensible au charme viril de Gable après deux ans d'isolement. Il représente ainsi autant une solution de départ qu'un moyen d'assouvir un désir trop longtemps frustré.
Le réalisateur s'en donne donc à cœur joie pour exhiber les charmes de son casting féminin affolant les moments équivoques sont légions tel cette baignade commune entre Birdie et Kehoe avorté par un coup de fusil, l'entrevue nocturne avec Oralie et surtout ce moment où Gable arpente les portes des chambres en sifflotant tandis que de l'autre côté les jeunes femmes trépignent de désir dans l'espoir qu'il y pénètre. On a ainsi un long et joyeux marivaudage dont le genre varie selon le personnage féminin visé. Plutôt caustique et enlevé avec Eleanor Parker, torride avec Jean Wiles, décalé pour Barbara Nichols et plutôt touchant dans la candeur de Sara Shane jeune fille séduite par l'homme qu'il ne fallait pas.
Toutes les actrices sont formidables mais c'est réellement Eleanor Parker qui domine ce casting féminin. On peut regretter cette mise en avant vu qu'en développant un peu (le film dure moins d'une heure et demie) on pouvait avoir des portraits plus approfondi de chacune (ce que laisse augurer une scène de confession touchante avec Sara Shane) mais il aurait sans doute fallu pour cela une distribution plus prestigieuse quand ici on devine les tests de la Fox en vue de futurs starlettes (les manières de sous Marilyn de Sara Shane le laisse largement deviner). Ce qu'on perd en complexité est gagné en rythme et en drôlerie.
Chevelure rousse flamboyante magnifiée par le technicolor, Eleanor Parker tout en séduction et calcul offre un répondant parfait à un Clark Gable charmeur et cynique. L'acteur impose un héros atypique dans le western hollywoodien de l'époque qui préfigure la distance d'un Eastwood dans la trilogie des dollars, il passe ainsi d'une femme à une autre avec la même froideur que l'homme sans nom vendu au plus offrant selon les circonstances dans
Une poignée de dollars. L'émotion et la légèreté parviennent néanmoins à se glisser à l'ensemble notamment la mère (magnifique Jo van Fleet vingt ans plus jeune que le rôle l'illusion fonctionne totalement) exprimant des regrets sur ses vauriens de fils hors la loi ou encore la superbe scène de danse où Gable passent de l'une à l'autre de ses quatre cavalières.
Donc pour résumer un western en quasi huis-clos, sans le moindre coup de feu et où il ne se passe concrètement pas grand-chose et c'est formidable ! Les dix dernières minutes où tout s'accélère à coup de multiples retournements de situation rendent pour de bon l'ensemble jubilatoire. On est finalement plus proche du Walsh des comédies enlevées du début des années 30 et c'est fort plaisant.
Sorti en dvd zone 2 français chez Sidonis dans la collection westernExtrait
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